Sud-Soudan: Le projet de loi sur la sécurité renforcera la répression, alertent des enquêteurs de l'ONU

La Commission des Nations Unies sur les droits de l'homme au Soudan du Sud continue de documenter les violations des droits.
10 Juillet 2024

Le projet de loi sur le service de sécurité nationale au Soudan du Sud, adopté par les parlementaires la semaine dernière, renforcera la détention arbitraire et la répression par le Service de sécurité nationale, ont souligné mercredi des enquêteurs indépendants de l'ONU, appelant à une révision de ce projet de loi.

Alors que ce pays d'Afrique de l'Est se prépare à tenir ses premières élections depuis l'indépendance, la Commission des Nations Unies sur les droits de l'homme au Soudan du Sud estime que les citoyens doivent pouvoir exercer leurs droits civils et politiques sans crainte de représailles.

« Ces amendements en matière de sécurité étaient censés ouvrir l'espace civique, mais dans leur forme actuelle, ils ont l'effet inverse », a déclaré dans un communiqué, Barney Afako, membre de cette Commission créée en mars 2016 par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

Selon les enquêteurs onusiens, l'article 54 de la loi de 2014 sur le service de sécurité nationale autorise les agents à arrêter et à détenir, sans mandat, toute personne soupçonnée d'avoir commis une infraction contre l'État.

Ces infractions sont définies de manière très large et imprécise à l'article 7 de la loi, ce qui fait que de nombreuses personnes sont arrêtées et détenues pour des activités civiques et politiques légitimes. Bien que tout détenu doive être présenté à un juge dans les 24 heures, cela se produit rarement. L'article 55 de la loi autorise les agents à procéder à des arrestations après avoir obtenu un mandat, mais cette disposition est rarement utilisée.

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Pouvoirs d'arrestation et de détention

« Dans une société démocratique, les services de renseignement ne devraient pas avoir et n'ont pas de pouvoirs d'arrestation et de détention. Les pouvoirs incontrôlés du Service national de sécurité sont une nouvelle manifestation de l'absence d'État de droit et de tout contrôle judiciaire », a fait valoir Carlos Castresana Fernández, autre membre de la Commission, relevant les risques de détentions arbitraires.

Face à ces menaces, les enquêteurs indépendants onusiens exhortent le Président Salva Kiir à renvoyer le projet de loi aux législateurs afin de l'aligner sur les obligations internationales de Djouba en matière de droits de l'homme.

« S'ils sont acceptés par le président, ces amendements à la loi sur le Service national de sécurité indiqueraient que les violations des droits commises par cette puissante institution sont approuvées non seulement par le reste du gouvernement, mais aussi par les législateurs », a insisté Yasmin Sooka, Présidente de la Commission.

« Le projet de loi devrait être renvoyé aux législateurs pour qu'ils travaillent sur des amendements conformes à l'engagement du gouvernement de supprimer les pouvoirs d'arrestation de cette institution, qui sont systématiquement abusifs et illégaux », a-t-elle ajouté.

Des détentions prolongées et arbitraires sans contrôle judiciaire

Ces projets d'amendement interviennent alors que la Commission a déjà publié des rapports détaillés sur les violations des droits de l'homme commises par le Service national de sécurité, notamment la pratique illégale des détentions prolongées et arbitraires sans contrôle judiciaire ni obligation de rendre des comptes. Les victimes ont été torturées et beaucoup sont mortes en détention.

Les violations des droits incluent des restitutions extraordinaires de membres de la société civile sud-soudanaise et d'opposants politiques des pays voisins, qui ont été placés en détention par le Service de sécurité nationale.

« Même au cours de la semaine dernière, des dirigeants de la société civile critiquant les politiques du gouvernement ont été poursuivis et menacés de détention, voire pire », a rappelé la Commission, précisant que le processus de modification de la loi de 2014 sur le Service de sécurité nationale est en cours depuis plus de six ans. Jusque-là, les progrès étant bloqués en raison de désaccords sur les pouvoirs d'arrestation et de détention des agents du service de sécurité nationale.

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