Sud-Soudan: La plus jeune nation du monde à la croisée des chemins

Shoko Noda, Sous-secrétaire général des Nations Unies et Directrice du Bureau de crise du PNUD
analyse

Treize ans après son accession à l'indépendance, le Soudan du Sud est confronté à de graves problèmes humanitaires.

Le jour de l'indépendance du Sud-Soudan a été porteur d'un grand espoir. Je me souviens des foules qui se réjouissaient dans les rues, brandissant haut le nouveau drapeau du pays. Treize ans plus tard, la plus jeune nation du monde, à peine entrée dans l'adolescence, est confrontée à de profonds défis.

Shoko Noda, Sous-secrétaire général des Nations Unies et Directrice du Bureau de crise du PNUD Au coeur des défis du Soudan du Sud se trouve une crise humanitaire aux proportions stupéfiantes. Étant donné que sept millions des 12,4 millions d'habitants du pays risquent de souffrir de la faim cette année et que neuf millions ont un besoin urgent d'aide humanitaire, on ne saurait trop insister sur la gravité de la situation.

Une personne sur dix n'a pas accès à l'électricité. Soixante-dix pour cent n'ont pas accès aux soins de santé de base. Il s'agit là de droits de l'homme fondamentaux dont la grande majorité des gens sont privés.

J'ai pu constater de visu la situation humanitaire désastreuse du Soudan du Sud lorsque je me suis rendu dans le pays en mars. J'ai rencontré des femmes et des enfants déplacés par le conflit - certains pour la deuxième fois de leur vie - dans un centre de transit à Malakal, la capitale de l'État du Haut-Nil. Ils n'avaient rien et dépendaient entièrement de l'aide. Leur situation est toujours présente dans mon esprit et dans mon coeur.

À l'occasion du 13e anniversaire de son indépendance, le Soudan du Sud se trouve à un moment charnière de son parcours de construction nationale.

L'aide humanitaire ne peut à elle seule démêler l'écheveau des défis auxquels le Soudan du Sud est confronté. Une approche holistique est nécessaire, qui jette les bases de l'autosuffisance, de la paix et du développement durable.

Alors que le processus d'élaboration de la constitution est en cours et que des élections se profilent à l'horizon, les efforts que nous déployons aujourd'hui façonneront la trajectoire du pays pour les générations à venir. Nous devons renforcer les institutions, favoriser la stabilité et responsabiliser les jeunes, qui sont la force motrice des aspirations de la nation au progrès et à la prospérité.

L'aide humanitaire ne peut à elle seule démêler l'écheveau des défis auxquels le Soudan du Sud est confronté. Une approche holistique est nécessaire, qui jette les bases de l'autosuffisance, de la paix et du développement durable.

L'autonomisation des femmes et des filles, qui sont confrontées à des défis et à des vulnérabilités disproportionnés face aux conflits, aux déplacements et au changement climatique, est au coeur de cette démarche. Les violences fondées sur le genre, les mariages d'enfants et les taux de mortalité maternelle sont alarmants, soulignant le besoin urgent d'interventions ciblées qui donnent la priorité aux droits et à la dignité des femmes et des filles.

Lors de ma visite à Malakal, j'ai rencontré des jeunes femmes dont les récits m'ont dépeint de manière saisissante les obstacles auxquels elles sont confrontées au quotidien : elles craignent pour leur sécurité, se sentent incapables de parler de leurs espoirs et de leurs aspirations, ou se voient refuser des opportunités de travail.

Il ne devrait pas en être ainsi.

Notre équipe sur le terrain travaille dur pour améliorer la vie des femmes et des filles au Soudan du Sud. J'ai été impressionnée par les tribunaux de Juba, mis en place avec le soutien du PNUD, qui se concentrent sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Nous nous efforçons également de garantir l'inclusion des femmes dans les processus de consolidation de la paix, de promouvoir l'égalité des sexes et de créer des opportunités pour les femmes et les jeunes afin qu'ils puissent s'épanouir.

Mais il reste encore beaucoup à faire.

Avec 75 % de la population, les jeunes représentent à la fois le plus grand défi du Soudan du Sud et son atout le plus prometteur. Négliger d'investir dans la jeunesse revient à négliger l'avenir du pays lui-même, un risque que nous ne pouvons pas nous permettre de prendre.

Leurs voix doivent être entendues, leurs aspirations nourries et leur potentiel libéré.

Le Soudan du Sud est à la croisée des chemins.

Avec un soutien adéquat, le pays a le potentiel de créer un avenir défini par l'espoir, une plus grande prospérité et la stabilité pour tous. L'alternative est l'aggravation d'une crise déjà profonde et prolongée.

Le Soudan du Sud ne peut pas s'engager seul sur cette voie. Il a besoin d'un soutien qui dépasse ses frontières pour surmonter la myriade de défis auxquels il est confronté. Il est urgent de renforcer la coopération au développement, afin d'aider les populations à rompre le cycle de la crise et à mener une vie plus sûre, plus stable, plus résiliente et plus durable.

J'espère revenir dans dix ans et voir les familles que j'ai rencontrées au centre de transit de Malakal s'installer pacifiquement, leurs enfants grandir et s'épanouir, avec des moyens de subsistance stables et un accès à tous les services dont ils ont besoin pour les soutenir et nourrir leurs espoirs et leurs aspirations pour l'avenir.

Voilà à quoi ressemble le développement.

Shoko Noda est Sous-secrétaire général des Nations Unies et Directrice du Bureau de crise du PNUD.

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