Rwanda: Kagamé encore et toujours

16 Juillet 2024

C'est le contraire qui aurait étonné, tant sa popularité et sa mainmise sur le Rwanda sautent aux yeux. En attendant la confirmation de sa victoire, Paul Kagamé est arrivé en tête de la présidentielle, du 15 juillet 2024, avec 99,15% des voix, après un dépouillement de 78,94% des suffrages, selon la Commission électorale nationale (NEC).

Les premiers résultats sortis des urnes semblent laisser entrevoir un nouveau plébiscite pour l'homme fort de Kigali, qui n'a laissé aucune chance à ses deux adversaires. En l'occurrence, l'écologiste et transfuge du parti au pouvoir, Frank Habineza et l'ancien journaliste, Philippe Mpayimana, qui avaient déjà échoué à le défier dans les urnes en 2017. Au pouvoir depuis 2000, Kagamé est quasiment assuré d'entamer un quatrième mandat de 5 au lieu de 7 ans, comme l'impose désormais une révision constitutionnelle de 2015. Il reste le maitre du jeu et devrait poursuive son ambition de faire du Rwanda, un pays émergent.

En la matière, les acquis de Kagamé parlent en sa faveur, tant il a travaillé à développer sa patrie pour en faire un modèle de développement sur le continent africain. Le Rwanda, sous son règne, est considéré comme un miracle économique, avec une croissance soutenue, des investissements à la pelle dans divers domaines (santé, industrie, éducation...) et une amélioration remarquable du niveau de vie. Selon des données émanant de la Banque africaine de développement (BAD), l'extrême pauvreté a reculé de 47 % en 2019 à 45 % en 2021 et le chômage a baissé de 43,4 % en août 2022 à 40,2 % en août 2023. Ce pays d'Afrique de l'Est de plus de 13 millions d'habitants est entré dans la cour des grands, s'il n'est pas devenu un acteur stratégique à l'échelle continentale et mondiale.

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C'est à croire que le Rwanda ne traine pas un passé sombre, marqué par le génocide de 1994, qui a fait 800 000 morts, dont la majorité est de l'ethnie Tutsi. Le pays des mille collines a pansé ses plaies et a réussi à se faire une place au soleil. C'est tout à l'honneur de Kagamé dont on n'a pas toujours chanté les honneurs à l'international. Certaines ONG oeuvrant dans le domaine des droits humains l'accusent régulièrement d'avoir travaillé à asseoir parallèlement un Etat répressif dans lequel les opposants n'ont pas droit de citer.

Cette réputation de dictateur colle à la peau du chef de l'Etat rwandais dont l'implication supposée ou avérée dans la situation sécuritaire dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC) alimente régulièrement la polémique. L'ONU n'accuse-t-elle pas, plusieurs rapports à l'appui, Kagamé de soutenir la rébellion du M23 dans l'Est congolais, dans le but de profiter des richesses de sous-sol de son voisin.

Si le président rwandais n'a pas formellement démenti la présence de forces rwandaises dans l'Est de la RDC, son nom est permanemment associé à ce conflit ravageur. Kagamé gagnerait donc à clarifier définitivement son rôle dans cette situation et à oeuvrer à apaiser les relations avec ce pays voisin. L'image de grand bâtisseur qu'il s'est forgé ne s'accommode pas avec celle de déstabilisateur qu'on lui prête avec insistance.

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