Ile Maurice: Descente dans le Sud et extorsion

«L'express» est en mesure de confirmer cette descente de la Special Striking Team (SST) dont on parle sur les réseaux sociaux, chez un certain Tayseer Goolbar à Chemin-Grenier. Sauf que ce n'est pas de la drogue qui était recherchée mais... de l'argent. Un ministre est aussi concerné.

Le 17 janvier 2023, une équipe de 18 agents, dont trois éléments féminins, de la SST débarque chez l'homme d'affaires Tayseer Goolbar à CheminGrenier. On lui montre un mandat de perquisition mais d'une façon très brève pour qu'il ne puisse pas lire le contenu exact. Tout comme ils le feront avec la femme d'affaires S. R., le 3 avril 2023. On lui fait toutefois savoir qu'ils ne sont pas à la recherche de drogue mais «nou pe rod kass. Kot sa bann black moneyla ete?». L'homme d'affaires reconnaît plusieurs de ces agents. D'ailleurs, on les voit bien sur les images des caméras de surveillance.

Suivez bien le «scénario» mis en place. À l'intérieur de la maison, les membres de la SST veulent démolir un faux plafond pour y chercher de «l'argent planqué» lorsque le chef, qui conduisait la perquisition, reçoit un appel sur son portable. (La conversation a été enregistrée.) Après avoir raccroché, le chef prend l'homme d'affaires à part et l'emmène dans une chambre pour lui parler seul à seul.

Que lui dit-il ? «Bon, on ne va pas insister. Nous repartons. Mais donnez-nous le nom de quelqu'un dans le village où l'on pourra faire une perquisition. Car, ainsi, nous ne nous serions pas dérangés et n'aurons pas fait tout ce chemin de Port-Louis pour rien.» Le perquisitionné ne sait rien des trafiquants de drogue ou d'autres blanchisseurs d'argent, ni dans le coin ni ailleurs. La SST repart donc bredouille. Enfin, Rs 2 000 qui se trouvaient sur une table disparaîtront...

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Garde rapprochée de ministre

Un peu plus tard dans la journée, l'homme d'affaires reçoit un appel d'un certain A. B. qu'il connaît bien, qui gère une entreprise de sécurité et qui agit parfois comme garde du corps d'un ministre et du frère de celui-ci. A. B. lui dit être au courant de la descente de la SST chez lui ce matin-là et lui demande s'il a remarqué qu'à un certain moment de la perquisition, le «chef» a reçu un appel. Et d'expliquer: «Eh bien, c'était moi qui ai appelé.C'est nous kinn sap twa.» «Sap mwa?», se demande l'homme d'affaires. Mais il saura que l'on n'a pas encore fini avec lui.

Car A. B. lui donne rendez-vous le même après-midi à l'hôtel Hennessy à Ébène. Voilà donc le modus operandi: un coup de téléphone «pou sap» Tayseer...

Juste avant la rencontre, A. B. envoie des messages à Tayseer Goolbar lui confirmant le rendez-vous et lui rappelant en deux fois de ne pas oublier de faire «lizaz». Tayseer s'y rend, et il y rencontre A. B. et un certain Nevil, habitant route Bassin, qui se fera connaître dans l'affaire Fulena. Là, Rs 500 000 sont envoyées à A. B. par virement bancaire le même jour. Une demande d'un million additionnel est faite pour «misie- la».

Ce qui sera fait. Il faut savoir que l'homme d'affaires qui gère les biens d'une organisation étrangère subit en ce moment des tracasseries «injustifiées» selon lui et a même vu son entreprise placée sous le coup d'une sanction de la part d'une institution régulatrice. En fait, apprenons-nous, c'est le magot qu'il gère qui suscite les convoitises d'un de ses concurrents qui était très proche, pour ne pas dire faisait partie, du pouvoir. D'ailleurs, on entend prononcer son nom dans l'audio. Mais cela est une toute une autre histoire et nous y reviendrons.

Tayseer a donc accepté de «payer» contre la promesse de pouvoir continuer son business et surtout, pour ne plus recevoir la visite de la SST qui est souvent accusée de planting.

Pour le parti A. B., lui, parle alors d'un des clients étrangers de l'homme d'affaires - comment en est-il est au courant ? On ne le sait pas - et lui demande d'emmener cet étranger qui se trouvait à Maurice au bureau du ministre pour lequel A. B. agit comme garde du corps privé. L'homme d'affaires se rend à Port-Louis le 23 janvier 2023 à 16 h 30 en compagnie de l'étranger, et ils y rencontrent effectivement le ministre en présence d'A. B. et du frère du ministre. Le ministre demande sans hésiter à l'étranger: *«Que pourriez-vous faire pour le parti ?» Après l'incompréhension de l'étranger. On y parle aussi d'investir dans une Management Company.

Le lendemain, le 24 janvier, Tayseer Goolbar transfère deux fois Rs 100 000 sur le compte d'A. B. Et ce qu'il appelle des extorsions ne s'arrêteront pas là. Les demandes pour d'autres sommes deviennent de plus en plus pressantes, accompagnées de rappels «amicaux» que «mo pou koz ar boss-la pou twa». Las de cette situation, l'homme d'affaires a quitté le pays.

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