Congo-Kinshasa: Des vidéos alarment à nouveau sur les conditions «inhumaines» des détenus à la prison de Makala

La maison carcérale de Makala, située dans la capitale Kinshasa en RDC, accueille dix fois plus de détenus que sa capacité d'accueil. Vendredi 19 juin, le journaliste congolais Stanis Bujakera a publié des vidéos montrant des détenus entassés dans une cellule, le menant à qualifier cette prison d'« inhumaine » et de mouroir. Condamné à six mois de prison pour un article mettant en cause les renseignements militaires dans la mort d'un opposant, il y a lui-même été incarcéré dans cette prison.

En République démocratique du Congo, les prisonniers de Makala, la plus grande prison du pays, vivent un calvaire. Officiellement construite pour une capacité de 1 500 détenus, elle compte aujourd'hui plus de 15 000 détenus, en majorité non condamnés et donc en détention préventive. Cette surpopulation carcérale fait de ce lieu un mouroir pour les détenus, selon la fondation Bill Clinton pour la paix, auteure d'un rapport publié en décembre 2023.

C'est dans cette même prison que le journaliste congolais Stanis Bujakera était détenu. Ce vendredi, ce dernier a commencé à publier sur les réseaux sociaux des vidéos prises à l'intérieur de la tristement célèbre prison centrale de Makala à Kinshasa.

Dans ces vidéos, disponibles sur le compte X de Stanis Bujakera, l'on peut voir des détenus entassés les uns sur les autres dans des couloirs, dans des toilettes ou dans des douches. « Ce sont des détenus. Des gens souffrent dans cette maison carcérale parce qu'il n'y a plus d'espace », explique le journaliste.

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Condamné à six mois de prison pour un article mettant en cause les renseignements militaires dans la mort d'un opposant, il a lui-même été incarcéré dans cette prison qu'il qualifie d'inhumaine et de mouroir. Aujourd'hui libre et en exil, Stanis Bujakera a décidé d'y dénoncer les conditions carcérales en diffusant régulièrement des vidéos qu'il a pu récupérer afin, dit-il, d'interpeller les autorités.

Quand on entend de l'extérieur parler des conditions de détention, on pourrait se dire que c'est normal, qu'ils sont emprisonnés. Mais il faut y être. On ne se rend pas trop compte de ce qui se passe à l'intérieur. Quand vous y entrez, vous vous rendez compte que les gens sont en train de mourir vivant. Je poste ces vidéos pour alerter les autorités sur ce qui se passe dans cette prison, parce qu'il y a des morts tous les jours, des maladies, des gens étouffés et qui souffrent. Or, être prisonnier ne veut pas dire être puni à mort

Alexandra Brangeon La RDC est « l'un des pays modèles sur la question de la prise en charge des prisonniers », selon le ministre de la Justice

Ce samedi, le ministre congolais de la Justice Constant Mutamba a affirmé que des mesures sont en cours pour désengorger toutes les prisons du pays. Selon lui, ces vidéos correspondaient à « de très vieilles images ».

« Le chef de l'État nous a instruits de travailler au désengorgement de toutes les prisons, non seulement Makala. Nous avons mis en place une première commission au niveau national et des sous-commissions au niveau de toutes les prisons nationales. Ces dernières ont travaillé pendant deux semaines. Elles m'ont fait un premier rapport. Je n'ai pas été satisfait. J'ai demandé qu'elles poursuivent le travail pour un rapport beaucoup plus fignolé », explique-t-il.

Constant Mutamba veut libérer les prisonniers au cas par cas, « selon les prescrits des lois de la République » et souhaite attendre le rapport final pour pouvoir envisager « des mesures drastiques qui aideront au désengorgement total et à l'amélioration des conditions de vie ». Le ministre de la Justice poursuit. « Il faut dire que l'État congolais décaisse suffisamment de moyens pour l'alimentation de prisonniers et pour les produits pharmaceutiques. Les conditions ne sont pas mauvaises, nous sommes, je pense, l'un des pays modèles sur la question de la prise en charge des prisonniers, parce que les prisonniers congolais mangent trois fois par jour », termine-t-il.

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