Tunisie: Lecture dans le marché des transferts tunisien - Tendance inflationniste et interférences...

22 Juillet 2024

C'est un marché pas encore développé et non réglementé. Les mauvaises pratiques, la surestimation de la valeur des joueurs et les dépassements font que ce mercato ne permet pas d'enrichir le potentiel du club.

A chaque marché de transferts ses propres règles de jeu, ses outils de régulation et surtout ses tendances. Le marché des transferts estival d'inter-saison est celui le plus significatif par rapport à celui hivernal. C'est le mercato qui décide de l'avenir d'un club et de ses chances pour l'exercice à venir, et même plus. A partir des ambitions et des objectifs tracés et des besoins décelés dans l'effectif, on commence à bouger sur le marché des transferts.

Notre «mercato», comme celui des autres championnats, a des règles générales telles que l'offre, la demande et les prix qui se fixent selon l'interaction de l'offre et de la demande et selon les négociations, le rôle et le relationnel de l'agent du joueur en question, la solidité financière et la crédibilité du club-acheteur, les voeux du joueur...

Dans tout cela, et après des années, notre marché de transferts n'a pu faire son décollage pour rester au stade de l'expérimentation. Pis, c'est un marché qui obéit plus à des règles subjectives et irrationnelles plutôt qu'à autre chose. Quand on voit l'état misérable auquel les clubs sont arrivés, à cause des impayés et des litiges avec les joueurs (tous les clubs sont concernés par ces litiges), on en sait bien des choses sur le comportement des clubs au moment d'acquérir ces joueurs.

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Une chose est sûre, on a une tendance inflationniste qui se confirme d'un mercato à l'autre à tous les niveaux. Qu'il s'agisse de joueurs étrangers ou locaux, de jeunes ou de moins jeunes, on remarque la présence d'une «bulle» virtuelle et gigantesque qui fait que la valeur des joueurs mis sur ce marché soit gonflée et surestimée.

Le joueur tunisien local est surestimé sur tous les plans, et les agents de joueurs, grâce à leurs relations avec les clubs et les dirigeants et entraîneurs (ceux qui déclenchent la demande), réussissent à augmenter follement la valeur de la transaction (pour une commission de plus) et, dans certains cas, des dirigeants gagnent aussi de cette surenchère.

Seul le club, au moment de parapher l'accord sur un contrat, est perdant. Le montant payé par le club et les avantages accordés au nouveau joueur ne correspondent pas souvent à sa valeur intrinsèque (âge, aptitudes, possibilité d'être cédé à l'avenir) et aux ressources du club. Ce mercato, tel que l'on voit, est une cause majeure des litiges qui ont étouffé les clubs. C'est un mercato fou, subjectif, entaché de maintes irrégularités et sans «garde-fous».

L'inflation, seul langage dominant, rend ce mercato dénué de tout sens et de toute transparence. Qui achète? Comment procède-t-il? Négocie-t-il sobrement dans l'intérêt du club? Généralement, on va vers un mercato «sélect» et exclusif à quelques clubs qui ont les moyens. C'est une première étape si l'on veut.

Dans un second temps, on a un autre mercato, celui des clubs mal-clssés et pas aisés qui ciblent des joueurs en fin de contrat dans les grands clubs et des jeunes que les grands clubs forment mais qui les jettent une fois arrivés en équipe A, ainsi que les joueurs étrangers venant de clubs de l'Afrique et que les grands clubs snobent.

Savoir acquérir à bon marché

On s'arrête à ce dernier genre de joueurs africains qui débarquent dans notre championnat sans faire de tapage, mais qui finissent par réussir et par élever leur cote au profit de leurs clubs au moment de les céder. Omarou, N'dao, Aholou, Ba, Conte, Fode, Camara, Diallou, Seydi, voilà des exemples (pas nombreux c'est vrai) de joueurs étrangers qui ont caracolé sans que leurs clubs ne déboursent grand-chose pour les acquérir. Des joueurs «bon marché» qui ont valorisé les clubs et les ont aidés à gagner.

Le ST, l'USM, l'OB, le CAB, voilà quelques clubs qui savent réaliser de bons coups sur le mercato. Et même quand ils sont obligés de les céder, ils réalisent des plus-values notables. C'est cela être rationnel sur un mercato: c'est-à-dire dénicher les bonnes affaires et choisir des joueurs de bonne qualité qui ne coûtent pas cher et qui, sous la direction d'un entraîneur avisé et de dirigeants de qualité, progressent et augmentent leur valeur marchande. C'est pratiquement tout le contraire des clubs aisés qui jouent pour le titre.

Dans l'ensemble, ils ramènent des joueurs onéreux et pas mal d'entre eux ne réussissent pas et ne justifient pas les concessions financières. Dans le majorité des cas, ce sont des circuits personnels où un agent, un ami qui connaît un agent en Europe, qui concluent des transactions ratées et engageantes pour le club, voire étouffantes plus tard.

C'est que pas mal de joueurs étrangers débarquent dans notre championnat pour une ou deux saisons au maximum pour aller jouer en Europe ou dans un championnat arabe où ils sont mieux payés.

Un marché à réguler

Ce mercato est déréglé parce que tous les opérateurs vous disent qu'il n'y a pas de clarté et de crédibilité dans le fonctionnement de ce marché des transferts. La FTF a mis la règle des 10 joueurs séniors à ne pas dépasser et le quota des 6 joueurs étrangers (qui va augmenter), mais en fait la régulation doit être plus profonde.

Il s'agit en fait d'exercer, même à échelle réduite, les règles du «fair-play» financier comme c'est le cas pour l'UEFA. On devra alors limiter la folie des grandeurs des clubs qui ont les moyens et les obliger à restreindre leurs budgets et leurs achats. On ne sait pas pourquoi le FTF a peur d'exercer un contrôle et un audit sur les états financiers des clubs.

Cela permettra de sanctionner les clubs déficitaires qui ont gaspillé leurs ressources dans de mauvaises et coûteuses transactions qui leur ont causé des déficits cumulés. Quand un seuil toléré de déficit cumulé est dépassé, le club a des restrictions sur le marché des transferts. Ce club saura que toute acquisition surestimée et non rentable va alourdir son budget.

Ce n'est pas une question de moyens financiers et de compétences techniques, c'est aussi une question de bon sens et d'un oeil d'expert au moment de choisir et de prendre un joueur sur le mercato.

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