Afrique: L'impact du faible accès à l'énergie sur la santé respiratoire

Une coopérative de femmes en Mauritanie utilise l'énergie solaire pour opérer un système d'alimentation en eau d'un potager.
24 Juillet 2024

Dans une récente étude, des chercheurs ont analysé l'impact de la pauvreté énergétique sur la santé respiratoire dans 34 pays d'Afrique sub-saharienne en s'appuyant sur des données portant sur une durée de 20 ans allant de 2000 à 2020.

Les auteurs de l'étude se sont concentrés sur l'Afrique sub-saharienne en raison du double défi que cette partie du continent doit relever : un accès très limité à l'électricité et à une énergie propre pour la cuisson des aliments, et des taux élevés de maladies respiratoires.

Pour les besoins de ces travaux, les chercheurs ont utilisé deux critères discriminants de la pauvreté énergétique : l'accès à l'électricité et sa qualité pour la cuisson des aliments. En les étudiant, leur principal objectif était de comprendre leurs impacts respectifs sur les maladies respiratoires.

"Les décideurs doivent comprendre le lien qui existe entre l'énergie et la santé pour pouvoir prendre des décisions idoines"Adedoyin Adeleke, Green Growth Africa

Ils en ont conclu qu'un meilleur accès à l'électricité et à une énergie propre pour la cuisine va de pair avec un plus grand bien-être.

« Pour cet article, le plus grand défi a été de pouvoir montrer empiriquement que la pauvreté énergétique qui sévit en Afrique sub-saharienne est la cause de mauvaises conditions de vies, en l'occurrence des problèmes de santé comme les maladies respiratoires », indique Bruno Emmanuel Ongo Nkoa, enseignant-chercheur à l'université de Dschang au Cameroun et un des auteurs de cette étude.

Selon ses explications, les statistiques sur l'énergie ont été obtenues à partir de la base de données de la Banque mondiale ; tandis que pour ce qui est des maladies respiratoires, l'accès aux données et leur analyse a été particulièrement « difficile »

« La difficulté, à ce niveau, réside dans le traitement de ces données pour pouvoir extraire celles qui ont trait spécifiquement aux pays d'Afrique sub-saharienne », a-t-il ajouté à l'occasion d'une interview accordée à SciDev.Net.

Les chercheurs font savoir que l'Afrique sub-saharienne est particulièrement touchée par la pollution de l'air qui conduit à des problèmes de santé respiratoire causés par la mauvaise qualité de l'énergie utilisée par les ménages.

Ils soulignent que l'utilisation du bois, du charbon ou encore de la biomasse expose les utilisateurs à des polluants comme des particules fines et des gaz nocifs. « Cela peut avoir un impact important sur la santé respiratoire dans les régions où ces pratiques sont courantes », disent-ils.

Asthme

A les en croire, la prévalence de l'asthme en Afrique sub-saharienne devrait croître de 35 % d'ici 2025 en raison de l'augmentation de la population urbaine. Citant une étude publiée il y a deux ans, ils font savoir que l'asthme est à la fois mal diagnostiqué et mal soigné en Afrique sub-saharienne. Par exemple, en Ouganda, le taux de mortalité chez les asthmatiques est de 19 pour 1000, soit 90 fois plus qu'au Royaume-Uni.

A partir des résultats ainsi obtenus, les chercheurs estiment qu'il est nécessaire d'encourager les décideurs à adopter de meilleures politiques énergétiques pour que la santé respiratoire puisse s'améliorer.

L'étude montre en effet que l'accès aux sources d'énergie modernes pour la cuisson des aliments, comme l'électricité et l'énergie propre, contribue à la réduction des maladies respiratoires, en particulier en Afrique sub-saharienne.

Adedoyin Adeleke, directeur exécutif de l'ONG nigériane Green Growth Africa, estime que les décideurs doivent jouer un rôle clé en créant une passerelle entre la politique énergétique et la santé publique. Pour cela, « ils doivent comprendre le lien qui existe entre l'énergie et la santé pour pouvoir prendre des décisions idoines ».

De son point de vue, « il faut apporter un soutien financier à la chaîne de valeur énergétique pour attirer les investissements et améliorer l'accès à l'énergie moderne et permettre à la concurrence de faire baisser les prix ».

« En outre, il faut adopter des politiques pour que l'énergie soit produite au niveau local, afin de mettre à profit les ressources disponibles et réduire ainsi les coûts de production et de distribution de l'énergie », affirme Adedoyin Adeleke.

Politiques énergétiques

A l'avenir, conclut-il, il sera fondamental d'adopter des politiques énergétiques qui accordent la priorité aux sources d'énergie renouvelable pour atténuer les impacts sanitaires associés à la pollution de l'air dans les logements.

Les auteurs de l'étude pensent que des stratégies énergétiques devraient être adoptées au niveau national et qu'il faut aussi accorder de l'importance à la coopération internationale pour aider à rendre l'énergie moderne plus accessible.

Parallèlement, ils estiment que la recherche dans ce secteur doit se poursuivre et que le fossé qui existe entre les zones rurales et les zones urbaines doit être réduit.

Comme ils l'écrivent dans leurs conclusions, les pays n'ont pas tous le même niveau de développement, sans parler des politiques de développement énergétique. Par conséquent, les effets de la pauvreté énergétique sur les maladies respiratoires doivent être abordés dans le cas spécifique des pays en développement.

Selon les données existantes, 570 millions de personnes en Afrique sub-saharienne n'avaient pas accès à l'électricité en 2022. Dans de nombreuses régions, ces familles qui n'ont pas accès à l'électricité dépendent de sources comme le bois. Pourtant, une source d'électricité fiable est indispensable pour que les services de santé puissent fonctionner.

Par exemple, grâce à l'électricité, les vaccins et les médicaments peuvent être stockés dans de bonnes conditions et les procédures médicales se dérouler correctement. Il est tout aussi essentiel de disposer d'une énergie suffisante pour pomper et traiter l'eau, nécessaire pour s'hydrater, se laver, et assurer une bonne hygiène...

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