Afrique: Zlecaf - Les Bayam Selam du Cameroun plaident pour un commerce transfrontalier équitable

25 Juillet 2024

ONUFEMMES et UNDP ont organisé du 18-19 juillet 2024 à Douala capital économique du Cameroun, une rencontre de haut niveau sur la Zone de Libre Échange Cameroun Afrique Centrale (ZLECAF).

Lors de cette cérémonie dont le thème était "Genre et commerce intra-régional en Afrique centrale: opportunités et défis pour une ZLECAF inclusive", les organisateurs ont sollicité l'intervention de l'association des Bayam Selam du Cameroun au regard de la grande expérience de cette organisation sur le plan national.

Le commerce étant l'activité principale de ce groupe de personnes, Mme Balla BILOA Marie a entretenu les participants à travers un exposé riche d'expériences en ces termes.

- Mme le Ministre de la Famille et de la Promotion de la Femme du Cameroun,

- La représentante de Mme la Commissaire en charge de la promotion du Genre, Développement humain et social de la CEEAC,

- Le Coordinateur Résident du Système des Nations Unies au Cameroun,

- La représentante de ONU Femmes au Cameroun,

- Le Directeur du Bureau Sous-Régional de la CEA en Afrique Centrale. En remerciant tous les partenaires et participants pour leur engagement à promouvoir l'égalité de genre et le commerce inclusif en Afrique centrale.

« C'est la ZLECAF à sens unique avec nos deux pays frères : les Gabonais et les Guinéens peuvent entrer dans nos marchés même dans nos champs sans être inquiétés contrairement aux camerounais qui seront pris pour des indésirables s'ils traversent la frontière. Je vous parlerais donc de quelques déboires que subissent les Bayam Selam dans les marchés frontaliers du SUD : KYE OSSI ET ABANG MINKO.

LE CAS DE KYE OSSI

Le marché à KYE OSSI se fait tous les jours. Nous constatons à l'arrivée que l'offre est plus forte que la demande par manque d'organisation du côté du Cameroun pour réguler le ravitaillement des vivres. Lorsque les vivres frais (tomates, plantains entre autres) arrivent, il n y'a pas assez d'acheteurs.

Par conséquent, ces vivres frais sont vendus très moins chers à KYE OSSI qu'à Yaoundé ou Douala. Quand les vivres frais arrivent au niveau de KYE OSSI en grande quantité et qu'il n'y a pas moyens de les conserver, la Bayam Selam est donc obligée de les brader au risque de tout perdre ou alors les donner à crédit à nos frères du Gabon ou de la Guinée Equatoriale à leur risque et péril car ne pouvant pas traverser pour réclamer son dû. Ce qui créait un grand manque à gagner dans leurs fonds de commerce qui ne sont pas consistants. De plus, avec toutes les tracasseries policières, douanières, la marchandise arrive parfois amorties.

Lorsque nous additionnons le prix d'achat, la location des véhicules, les frais de route, l'impôt libératoire, il est difficile pour la Bayam Selam de mettre un bénéfice sur un prix de revient déjà trop élevés car les ventes faites sur place ne peuvent pas donner un bénéfice consistant. Seuls, les habitués peuvent survivre avec ce système.

Aussi, il y'a de grave problèmes d'insécurité car la ville de KYE OSSI n'est pas électrifiée. Quand la Bayam Selam arrive tard, elles sont victimes de viol, vol et agression car elles dorment à la belle étoile. Les conditions d'hébergement sont vraiment difficiles. Il y'a également un manque criard de toilettes publiques.

Imaginez une jeune fille en période de menstrues qui ne peut pas faire sa toilette intime....

LE CAS D'ABANG MINKO

Le marché d'ABANG MINKO se fait deux fois par semaine : vendredi et samedi. C'est également difficile de vendre un stock de marchandises consistants en deux jours. Nos frères des pays voisins préfèrent arriver le samedi dans l'après-midi lorsque la Bayam Selam est déjà aux abois. Etant donné qu'elle ne peut pas rentrer avec la marchandise, ils prennent donc à des prix dérisoires et le reste à crédit.

Comme à KYE OSSI, la Bayam Selam n'a pas accès pour réclamer son argent. Cela dépend maintenant de l'honnêteté de la personne qui a pris la marchandise. Quand les gabonais et les guinéens arrivent dans un marché pour faire les achats, les Bayam Selam même les consommateurs ne peuvent plus s'approvisionner car tous les vivres deviennent chers parce qu'ils achètent en grands stocks avec leurs gros moyens financiers. Alors qu'entrer chez eux pour les camerounais c'est impossible.

CONCLUSION : Le marché frontalier de KYE OSSI et d'ABANG MINKO n'est vraiment pas rentable. Seuls les Bayam Selam habituées résistent et jouent à la survie. Imaginez depuis plus de 06 mois, les frontières Gabon, Guinée Equatorial sont fermées. C'est l'asphyxie total. C'est tout le petit fond de commerce qui va s'envoler.

2- PRENONS LE CAS DE LA FRONTIERE DU TCHAD-NIGERIA-RCA-CONGO BRAZZAVILLE

LE CAS DU TCHAD-RCA-CONGO BRAZZAVILLE

Lorsque nous prenons le cas de la frontière TCHAD, RCA et CONGO BRAZZAVILLE, il n'y a aucun problème. Nous constatons la libre circulation des personnes et des biens.

LE CAS DU NIGERIA

Il est impossible ici d'acheter la marchandise directement aux producteurs ou au commerçants. Nous sommes donc obligés de passer par les intermédiaires qui escroquent ou diminuent la valeur de la marchandise. Cela réduit conséquemment le bénéfice. Nous constatons que dans le Cameroun profond, les Gabonais, les Guinéens et les Nigérians préfinancent la production. Ce qui leur donne droit à toute la récolte.

ANECDOTE : Nous avions une organisation paysanne dénommée CNOPCAM, CNOPGABON, CNOPCONGO etc... dans laquelle nous faisions la rotation. Les gabonais sont entrés avec leurs véhicules. Le tour des camerounais, nos véhicules ont été bloquées à la frontière d'AMBAM et ils nous ont mis dans les véhicules de fortune. A chaque contrôle de police ou douanière, nous devions descendre. Ce qui nous a démoralisé et l'activité s'est arrêtée pourtant c'était une bonne opportunité pour la ZLECAF. Nous trouvons toujours que les camerounais n'ont pas accès à ces pays frères.

QUELQUES PISTES DE SOLUTIONS

Cet atelier nous donne l'occasion d'espérer car nous pensons que toutes ses difficultés vont se transformer en opportunités par les partenaires au développement ici présents.

Nous souhaitons que notre partenaire privilège ONUFEMMES fasse un plaidoyer auprès de la CEA, du PNUD et du bureau de la Sous-Région de la ZLECAF pour nous permettre de :

- L'octroi d'un laisser passer spécial qui nous permettre de circuler librement avec nos marchandises dans la sous-région et même en Afrique en général car le Cameroun est l'Afrique en miniature avec tout ce que cela comporte en terme de production.

- D'avoir des grands magasins de stockage et de conservation adaptés, au besoin avec chambres froides dans tous les marchés frontaliers afin de réguler le marché et permettre la conservation des denrées périssables et dès fois les transformer quand il y'a abondance pour les vendre avec une valeur ajoutée.

- Renforcer les capacités financières, logistiques des femmes et des jeunes pour accroitre la production et atteindre la sécurité alimentaire dans la sous-région.

- Réguler le marché pour que la libre circulation des personnes et des biens soit une réalité dans tous les pays.

- D'avoir de la logistique adaptée pour réduire les coûts de transport et minimiser les prix des denrées alimentaires.

- D'avoir les usines ou le petit matériel pour la transformation de nos produits à forte valeur ajoutée.

- Construire des toilettes publiques avec douches pour leur permettre de faire leurs toilettes intimes convenablement et voir aussi le problème de l'hébergement.

- Construire des cases de santé pour les premiers soins.

Pour conclure, nous avons espoir qu'à l'avenir beaucoup de pistes de solutions seront résolues. Nous pouvons dire que vous autres, vous êtes la qualité et le petit peuple, nous sommes la quantité. La vie étant la complémentarité pour l'atteinte de l'autonomisation de la femme, nous pouvons dire ENSEMBLE NOUS POUVONS-TOGETHER WE CAN»

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