Magasinier reconverti depuis sa retraite en 2008, Issouf Ilboudo est l'un des bénéficiaires du projet sustlives dans la région du Plateau central. Exploitant d'une ferme agroécologique de 2 ha, il partage à travers cet entretien, son appréciation concernant la mise en oeuvre. Il revient sur les différentes activités menées depuis le lancement du projet sustlives, les acquis pour les producteurs ainsi que les leçons tirées.
Sidwaya (S) : Comment avez-vous entendu parler du projet sustlives ?
Issouf Ilboudo (I.I.) : C'est au cours d'un atelier de formation destinée aux producteurs qui a été organisé par la confédération paysanne du Faso que j'ai entendu parler du projet sustlives. Comme je suis curieux de nature, je suis toujours prêt à adhérer à toute nouvelle initiative qui va vers le progrès. J'ai surtout été attiré par les nouvelles connaissances dont j'allais bénéficier si je participe au projet sustlives. Et donc depuis 4 ans, nous sommes ensemble dans le projet avec des chercheurs de l'université et j'ai appris beaucoup de choses qui me servent pour mes autres activités.
S : Quelles sont les activités que vous avez mené dans le cadre de ce projet ?
I.I. : Sur le terrain, les activités ont concerné essentiellement la production du fabirama et du pois voandzou (souma en mooré). Nous avons aussi appris une nouvelle technique de production de sorgho. Mais ici à Loumbila, les oiseaux attaquent systématiquement les épis.
C'est pour cela que nous ne faisons pas cette spéculation. Grâce au projet, je sais d'abord mieux gérer mes activités. Ensuite, les nouvelles techniques me permettent désormais d'exploiter ma ferme tout au loin de l'année et je produis un peu de tout. Du gombo, de la pastèque, de l'ananas, de l'arachide et même du moringa, bref tout ce qui est du gout du marché et facile à vendre.
S : Qu'est-ce que le projet vous a apporté ?
I.I. : Le projet nous a permis d'apprendre de nouvelles méthodes de culture qui sont meilleures que celles que nous connaissions. Ces pratiques me permettent d'augmenter mes rendements d'une part. Elles préservent les sols sur lesquels je travaille d'autre part. De plus, la qualité des denrées que nous allons mettre à la disposition des consommateurs est aussi un aspect important dans le cadre de ce projet. J'ai également appris comment préserver la terre et ne pas la dégrader, comment accroitre les rendements et aussi produire des denrées de qualité qui respectent les normes et ainsi préserve les consommateurs.
Par exemple pour faire le fabirama (pessa en moore), nous avons appris à produire d'abord des boutures que nous repiquons ensuite comme la patate, le manioc. Grâce à cette méthode, avec un peu de semences, on peut emblaver un espace plus grand. Alors qu'auparavant, on sème les tubercules un à un et on attend les récoltes.
Pour le pois voandzou (souma en mooré), nous avions l'habitude de labourer et de semer directement. Ils nous ont appris à faire des buttes sur lesquelles, on sème. Ainsi, lorsqu'il pleut l'eau reste plus longtemps entre les buttes et cela améliore les rendements. Cette technique est tellement géniale que je l'applique désormais pour les cultures que je produis pendant la saison sèche comme le gombo et l'ananas. Une autre innovation est l'utilisation des fertilisants.
S : Comment appréciez-vous la mise en oeuvre du projet ?
I.I. : J'ai surtout apprécié leur présence lors des différentes étapes. Lorsqu'ils vous montrent une nouvelle technique, ils vous suivent dans la phase de la mise en pratique. C'est à dire qu'ils repassent pour voir si on fait comme ils nous ont appris. Je salue particulièrement le fait qu'ils mettent la main à la pâte.
Le projet à confirmer ce que je sais. Le changement est naturel et les chercheurs ont beaucoup de connaissances pour nous aider à avancer dans le bon sens. Dans le cadre du projet, ils sont redescendus jusqu'à ceux qui n'ont pas eu la chance comme moi de faire de longues études pour partager leurs connaissances. Je suis reconnaissant au projet.
Car, il nous a permis de nous rendre compte que les scientifiques ne sont pas éloignés de nos préoccupations, bien au contraire, ils ont des connaissances dont nous pouvons bénéficier pour progresser dans notre activité de production agricole. Les producteurs ont besoin d'eux, qu'ils continuent de partager leurs savoirs avec nous.
S : Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées dans le cadre de la mise en oeuvre du projet ?
I.I. : C'est peut-être l'écart entre les visites. C'est-à-dire que des fois on a le temps de les oublier parce qu'ils ne repassent pas assez vite. C'est lorsqu'ils ont des activités avec vous qu'ils repassent nous voir.
S : Quelles sont vos suggestions pour améliorer les résultats
du projet ?
I.I. : Mon souhait est qu'ils réduisent l'écart entre leurs visites, de sorte qu'on puisse bénéficier de leurs conseils plus souvent lorsque nous avons des difficultés. Pour chaque nouvelle expérimentation, le projet fournit les semences et emporte la production. Pour le paysan, c'est comme si on lui fait seulement miroiter des rendements. C'est pour cette raison que je souhaite qu'ils nous vendent des semences en plus afin que nous gardions la production supplémentaire.
Vu les bons résultats des différentes expérimentations, je voudrais aussi leur demander de nous former à la production des différentes semences introduites, afin de pouvoir passer à une production à grande échelle et approvisionner les autres producteurs. Je ne parle pas de gratuité, car généralement quand c'est gratuit, on n'en prend pas soin. Ce que je veux c'est que l'on mette les semences à notre disposition à des prix subventionnés.