Afrique: Lutte contre l'onchocercose - Les piqûres de mouches noires sont considérablement réduites après la destruction des sites de reproduction

analyse

L'onchocercose, communément appelée cécité des rivières, est une maladie tropicale négligée qui provoque de graves démangeaisons, des affections cutanées qui défigurent et des déficiences visuelles.

Elle peut entraîner une cécité permanente et il existe de solides preuves que l'onchocercose induit directement ou indirectement l'épilepsie.

En tant que maladie tropicale négligée, la cécité des rivières fait partie d'un ensemble diversifié d'affections causées par une variété d'agents pathogènes, avec des conséquences sanitaires, sociales et économiques dévastatrices.

Ces maladies touchent principalement les communautés pauvres des zones tropicales.

Selon les estimations les plus récentes, plus de 18 millions de personnes sont infectées par l'onchocercose dans le monde, dont 99 % vivent en Afrique subsaharienne.

Au Cameroun et au Soudan du Sud respectivement, 11 millions et 9 millions de personnes sont exposées au risque d'infection par l'onchocercose.

8 000 piqûres par jour

Le ver parasite Onchocerca volvulus qui cause l'onchocercose est transmis à l'homme par l'exposition à des piqûres répétées de mouches noires ou simulies (Simulium) infectées. Le parasite peut vivre dans l'organisme jusqu'à 15 ans.

%

Au début des années 1990, une étude des insectes et de leur relation avec l'homme, l'environnement et d'autres organismes a révélé des taux de piqûres de mouches noires extrêmement élevés au Cameroun, atteignant 8 000 piqûres par personne par jour dans certains sites.

Traitement et prévention de la cécité des rivières

La cécité des rivières est généralement traitée avec le médicament ivermectine, qui tue les parasites de la peau chez les personnes infectées.

Toutefois, l'élimination de l'onchocercose par le seul traitement à l'ivermectine serait difficile, car il faudrait traiter 80 % ou plus de la population des communautés endémiques chaque année pendant au moins 15 ans.

Une alternative au traitement médicamenteux est la lutte anti-vectorielle qui vise à réduire les piqûres de mouches noires pour limiter la propagation du parasite.

Par le passé, diverses méthodes ont été utilisées pour prévenir les piqûres de mouches noires, notamment l'application du kérosène ou du citron sur la peau. On a également utilisé des insecticides chimiques tels que le dichloro-diphényl-trichloroéthane (DDT), un insecticide toxique interdit dans de nombreuses régions du monde.

En tant que chercheurs qui étudient la santé mondiale, nous avons travaillé sur les moyens de combattre l'onchocercose dans les foyers endémiques. Nous avons mené deux études au Cameroun et au Sud-Soudan en utilisant la méthode "Slash and clear (coupe et défrichement)", une méthode écologique qui évite l'utilisation des produits chimiques dangereux.

Une nouvelle approche

Nous avons décidé de tester une approche "Slash and Clear" consistant à détruire les sites de reproduction des mouches noires à l'aide de machettes.

Dans notre dernière étude, au Cameroun, nous avons d'abord localisé les lieux de reproduction de ces insectes, généralement le long des rivières à fort débit, où les formes en développement ou larves des mouches noires se développent sur des matières végétales comme les feuilles, les troncs d'arbres ou les rochers recouverts d'algues avant d'émerger en tant qu'insectes piqueurs adultes.

Les mouches noires ayant une durée de vie de quelques semaines, les effets de la méthode "Slash and Clear" ont été observés au bout de quelques semaines, lorsque les mouches noires adultes déjà en circulation étaient toutes mortes.

Les villageois jouent un rôle

L'un des objectifs de l'étude était de déterminer si les habitants des villages touchés par l'onchocercose seraient prêts à utiliser la technique "Slash and Clear", qui a lieu tous les six mois.

Dans le district de Ntui, dans la région Centre du Cameroun, qui compte environ 25 000 habitants, des volontaires de deux villages ont été formés à la méthode "Slash and Clear" sur les sites de reproduction des mouches noires les plus proches de leur village.

Six bénévoles de chaque village ont été emmenés à la rivière et formés à la reconnaissance des sites de reproduction potentiels. Ils ont également reçu des machettes, des gants de jardinage et des gilets de sauvetage pour assurer leur sécurité. Les bénévoles formés ont été chargés de couper les feuilles et les branches d'arbres qui étaient immergés dans les segments d'eau à fort débit. Ils ont également enlevé les algues sur les rochers qui pourraient abriter des larves de mouches noires.

Cette activité a permis de réduire de 50 % le taux de piqûres de mouches noires, en estimant le nombre de piqûres par heure à l'aide de la technique de capture humaine validée par l'Organisation mondiale de la santé.

Des chasseurs formés sont postés sur les berges de la rivière à proximité du site de reproduction et chargés de capturer toutes les mouches noires qui se posent sur eux à l'aide de tubes. Le taux de piqûre est calculé en fonction du nombre de mouches noires capturées en une heure.

À la fin de l'étude, les communautés ont exprimé leur volonté de continuer la lutte contre les mouches noires, sous réserve que les bénévoles aient le matériel approprié pour réaliser le nettoyage.

L'expérience du Soudan du Sud

Nous avons réalisé une expérience plus ancienne et plus longue au Soudan du Sud.

Après trois ans d'exercices semestriels d'abattage et de nettoyage, nous avons constaté une réduction de 90 % des piqûres de mouches noires.

Un autre résultat positif est qu'après trois ans, moins d'enfants de 3 ans ont été testés positifs aux anticorps de l'onchocercose, avec une réduction de 12,5 % avant le projet à 8,8 % après.

Le nombre de nouveaux cas d'épilepsie a également diminué de manière significative.

Les communautés ont continué à utiliser la méthode "Slash and Clear" après la fin de l'étude, et cette méthode est toujours utilisée tous les six mois.

Quels perspectives?

La méthode "Slash and Clear" est une solution efficace, écologique et largement acceptée au problème des mouches noires dans les communautés où l'onchocercose est endémique.

Elle améliore également la qualité de vie en réduisant les nuisances causées par les piqûres douloureuses des mouches noires.

On peut espérer que cette méthode pourra être étendue à d'autres sites endémiques afin d'éliminer l'onchocercose une fois pour toutes.

Joseph Siewe Fodjo, FAR-LeaF Fellow, University of Pretoria

Stephen Raimon Legge Jada, Research project Manager, PhD candidate at University of Antwerp, University of Antwerp

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.