À Madagascar, des associations ont organisé le 29 juillet 2024 à Antananarivo une conférence sur les violences gynécologiques ou obstétricales. Pour les acteurs engagés dans la lutte contre ces violences, la priorité est encore la libération de la parole sur ce type d'abus encore banalisé.
À Madagascar, ce sont les prémices d'une lutte contre les violences gynécologiques et obstétricales. Comme dans beaucoup de pays, ce type d'abus est encore banalisé. Les violences se passent souvent dans l'intimité de la salle d'examen et des chambres d'accouchement. Quelques voix, notamment du corps médical, s'élèvent tout juste pour lever le voile et sensibiliser les femmes à cette réalité. C'était l'objet d'une conférence organisée le 29 juillet 2024 à Antananarivo par des associations qui oeuvrent pour la santé sexuelle des femmes.
Banalisation des douleurs, pression abdominale au moment de l'accouchement : c'est ainsi une grande première dans le pays, car des mots sont posés ce matin-là sur les formes de violences gynécologiques ou obstétricales, physiques ou verbales, souvent ignorées par celles qui les subissent.
Dans le public, des femmes se reconnaissent pourtant dans ces situations décrites, comme Angela, 36 ans. Elle n'avait jamais osé, avant ce jour, poser le terme de violences sur son vécu. « Je me suis reconnue dans tout ce qui a été dit ici, explique-t-elle. Toutes les phrases qui ont été dites "C'est normal d'avoir mal pendant l'accouchement, tout le monde a eu mal ici, il ne faut pas que tu prennes de péridurale. L'épisiotomie, c'est un acte banal pour que le bébé sorte indemne...", ce n'est pas vrai. Dans mon cas, mon bébé faisait 2,5 kilos et [le recours à l'épisiotomie] n'était pas justifié ».
« À Madagascar, il y a 0,3 sage-femme ou infirmière pour 1 000 habitants »
Le recours à l'épisiotomie, systématisé au moment de l'accouchement, mais non moins à risque et traumatisant, est une des manifestations courantes de ce type de violences. Claire Bertin, de Douleurs sans frontières, l'ONG à l'initiative de cette sensibilisation, soulève des failles dans le monde médical qui favorisent ces abus.
« À Madagascar, on compte qu'il y a 0,3 sage-femme ou infirmière pour 1 000 habitants, affirme-t-elle. Donc, on est sur des ressources humaines qui ne sont pas suffisantes et on a besoin de renforcer ça. Pour pouvoir mettre un patient au centre du soin, il faut avoir du temps. Il faut être à l'écoute. Pour être à l'écoute, il ne faut pas être dans l'urgence en permanence. »
Jusqu'alors absent des débats liés à la santé sexuelle des femmes, le sujet émerge tout juste dans le pays. Pour les acteurs engagés dans la lutte contre ces violences, la priorité est encore la libération de la parole, première étape avant de repenser les pratiques et humaniser les soins au sein du monde médical.