Au Cameroun, elle était une voix forte du paysage médiatique. L'éditorialiste Suzanne Kala Lobè s'est éteinte dans la nuit de mercredi à ce jeudi 1eᣴ août à l'âge de 71 ans. Militante de gauche, elle rejoint aux débuts de la décennie 1990 La Nouvelle Expression, où elle se fera connaître, puis animera de longues années des émissions de débat comme Polémos, ou culturelles comme Livres Noirs et Musique d'Afrique sur la radio Équinoxe avant d'être nommée au Conseil national de la communication.
Une journaliste aux opinions tranchées, fière de son africanité, qui ne laissait personne indifférent. C'est ainsi que Séverin Tchounkeu, PDG du groupe Équinoxe et La Nouvelle Expression, décrit, très ému, Suzanne Kala Lobè. Une amitié et une collaboration de plus de trente ans qui commence à Paris, lorsque, lui, étudiant rencontre Suzanne Kala Lobè, la militante, qui vend à l'époque à la criée le journal Kamerun, bulletin d'information du parti clandestin Manidem, branche radicale de l'UPC, l'Union des populations du Cameroun.
Quand arrivent les années de braise, début 1990, pour accompagner l'avènement du multipartisme au Cameroun, Séverin Tchounkeu demande à Suzanne Kala Lobè de rejoindre son journal La Nouvelle Expression, puis de prendre part à la création de la radio Équinoxe.
Passionnée de débat, férue de musique mandingue et de littérature, Suzanne Kala Lobè est longtemps la voix de Polémos et de Livres Noirs / Musique d'Afrique.
Opposante, communiste, n'ayant pas peur de la controverse, Suzanne Kala Lobè, aspirait à l'alternance politique pour son pays.
Elle fut néanmoins très touchée par l'hommage rendu par les autorités à son père, Iwiyé Kala Lobè, considéré comme un des pionniers du journalisme camerounais.
C'est toujours très douloureux. C'était une amie avant d'être une collaboratrice. Sa disparition aujourd'hui m'émeut beaucoup et, je pense, laisse un grand vide dans le champ du journalisme d'opinion et du débat. Elle avait un esprit critique très affûté et elle aimait beaucoup la controverse. Suzanne était une journaliste d'opinion, elle avait des opinions tranchées qu'elle affirmait à travers ses papiers et elle avait toujours tendance à faire prévaloir ses points de vue et ses débats. Vous pouviez faire deux jours de débat autour d'un sujet. C'était quelqu'un avec un très fort caractère. Nous avions réussi à nous entendre, d'abord parce qu'il y avait une amitié sincère entre nous et, ensuite, nos relations de collaboration n'étaient pas fondées sur une verticalité quelconque, mais c'était une collaboration entre deux êtres qui avaient, qui partageaient, quelques points de convergence idéologique sur la façon dont les sociétés africaines devraient fonctionner et sur ce qu'il faut faire pour que s'installe, dans nos sociétés, une liberté totale, une liberté véritable.