L'appel de l'Organisation des Nations unies (ONU) survient à un moment où l'Afrique repart sur le marché mondial de la dette, alors que les initiatives visant à alléger les coûts que cela représente pour ses pays peinent à évoluer.
En marge du Forum politique de haut niveau 2024 des Nations unies, le secrétaire exécutif de la Commission économique pour l'Afrique, Claver Gatete, a appelé les pays à explorer des réformes du cadre commun d'allègement de la dette en vue de mieux faire face à l'endettement élevé et croissant en Afrique. Il a souligné les défis d'accès aux ressources que connaît le continent africain pour financer ses priorités de développement, en particulier les fonds concessionnels à long terme et moins chers. Il considère que « la réforme du système financier mondial est urgente, car elle peut atténuer l'accès aux ressources essentielles nécessaires à la mise en oeuvre des ODD ».
Des défis désormais bien connus
Claver Gatete, citant la Banque mondiale, a évoqué le fait que la dette africaine a augmenté de 192% entre 2010 et 2023, atteignant un stock de dette extérieure de 1100 milliards de dollars à fin 2023. « Les pays africains paient 163 milliards de dollars par an pour la servir, ce qui leur laisse peu de marge pour mettre en oeuvre les ODD et l'Agenda 2063 de l'Union africaine », a-t-il fait savoir. Il a souligné la nécessité de lutter contre les flux financiers illicites pour mobiliser davantage de ressources intérieures en Afrique et améliorer la fiscalité.
Puis, il a insisté sur l'importance de développer les marchés de capitaux en vue de fournir des ressources à long terme dans le cadre de l'engagement du secteur privé en Afrique. Cette annonce survient alors que le marché de la dette internationale s'est rouvert à l'Afrique en cette année 2024, après deux ans d'exclusion. Le continent africain peut toujours bénéficier des prêts des institutions publiques internationales qui portent un taux plus faible, mais nécessite parfois des réformes coûteuses et contraignantes pour l'économie des pays demandeurs.
Le groupe africain travaille actuellement à influencer les termes de référence de négociation du nouveau cadre de coopération fiscale. Ses propositions en appellent à plus de justice dans l'attribution des droits d'imposition, un impôt minimal suffisamment élevé pour décourager la compétition fiscale des paradis fiscaux. Mais ce projet rencontre une résistance, notamment des ministres des Finances de l'Union européenne qui estiment qu'une convention fiscale de l'ONU « risquerait d'entraîner une duplication des actions internationales en cours » et « serait une perte de temps pour toutes les juridictions ».
Une implication de l'Afrique nécessaire pour trouver la solution
Avec un montant estimé à 50 milliards de dollars par an, les pays africains considèrent qu'ils seraient parmi les plus grands perdants des flux financiers illicites et de l'évasion fiscale. Si la réforme du système financier et fiscal mondial est une priorité pour permettre à l'Afrique de mobiliser les ressources nécessaires à son développement durable, le continent doit aussi faire sa part d'efforts, en réduisant le coût des emprunts sur les marchés locaux et en renforçant la transparence fiscale et financière pour limiter les sorties illégitimes de capitaux du fait des multinationales et des fortunés.