Nigeria: Manifestations - Le président Tinubu a-t-il prêché dans le désert ?

Après 3 jours de manifestations de rues qui ont fait 7 à 13 morts et se sont soldées par environ 700 arrestations, selon les sources, le président du Nigeria est sorti de son silence. Dimanche dernier, dans une allocution diffusée en direct par les radios et télévisions publiques, le "faiseur de rois" devenu "roi" est monté au créneau contre les manifestants, mettant en avant les acquis et les bonnes perspectives de sa politique économique.

Parmi les mesures prises pour sortir de la crise économique, il a cité le plus que doublement du Smig, le programme de prêt aux étudiants, la compensation d'obligation de change en cours avec un soutien d'environ 5 milliards de dollars US, la mise en place de facilités pour les crédits à la consommation (consumer credit coorporation) avec un fonds de 200 milliards de nairas, les allocations de 570 milliards de nairas à chaque Etat pour accroître le soutien aux ménages les plus vulnérables, ainsi que les mesures de soutien aux micro, petites, moyennes et grandes entreprises par des crédits à faible taux (moins de 10%) d'1 million à 1 milliard de nairas, etc.

Ce discours présidentiel, si renseigné soit-il, n'a pas convaincu les leaders du mouvement de contestation, qui n'ont d'yeux que pour leurs "Take it back" ou leur "End bad governance", traduisez, « oui au retour à la subvention à l'électricité et aux hydrocarbures et non à la mal gouvernance ». Les mécontents mettent à l'index également la rareté des produits vivriers et demandent la diminution des taxes pour en faire baisser les coûts. Le principal leader du mouvement de protestation a donc soutenu que le président Tinubu n'avait pas entendu leur message et que les manifestations se poursuivraient, car il n'a annoncé aucune mesure contre la vie chère et la mal gouvernance.

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Comme pour lui répondre, l'inspecteur général de la police nigériane a déclaré que le gouvernement pourrait faire appel à l'armée, non sans ajouter qu"'il ne doit plus y avoir de rassemblement... tout rassemblement de ce type (contestataire) est illégal et illicite... Nous allons appliquer toute la rigueur de la loi". La police est donc dans la logique du gouvernement et du président Tinubu qui a, dans son discours, réaffirmé son rôle de garant de la Constitution, du maintien de l'ordre, de la sécurité des personnes et des biens. Dans cette logique, il appelle à la fin des manifestations pour "créer un espace de dialogue".

Sera-t-il entendu ? En tout cas hier lundi a été une journée relativement calme dans les principales villes du pays. Mais des analystes appellent à la prudence, car ce calme pourrait annoncer une autre vague de manifestations. Mais peut-être bien qu'à l'exemple de l'Ouganda, qui a su étouffer ses croquants en moins d'une semaine, les autorités nigérianes sont sur le point de calmer la colère de la rue. Tant mieux si c'est le cas, car la région ouest-africaine, durement éprouvée par les attaques terroristes au Sahel, n'a certainement pas besoin d'un autre pôle d'instabilité.

En montant au créneau, le président Bola Tinubu a-t-il repris la main et l'initiative de terrain aux contestataires ? On attend de voir.

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