L'intervention du président Ahmed Bola Tinubu était attendue bien avant le début des manifestations. Il a choisi de parler au quatrième jour des manifestations prévues pour dix jours.
Il n'a pas indiqué s'il reviendra sur sa politique, de supprimer les subventions sur le carburant l'une des principales revendications des manifestants ou à mettre fin à l'ancrage de la monnaie locale au dollar.
"J'ai donc pris la décision douloureuse mais nécessaire de supprimer les subventions sur le carburant et d'abolir le système de change multiple, ce qui a entraîné des difficultés économiques pour notre nation, explique-t-il. Ces décisions que nous avons prises étaient nécessaires pour nous permettre de mettre fin à la mauvaise gestion économique qui a duré plus d'une décennie qui ne nous a pas aidée."
"Le discours n'a pas répondu aux préoccupations des manifestants, il n'a même pas répondu à une de nos revendication. Le discours ressemblait plutôt à un discours de campagne", a immédiatement critiqué l'un des meneurs des manifestations, l'activiste et avocat Deji Adeyenju. Le président n'a pas abordé les questions liées à la manière de lutter contre la faim dans le pays, la seule chose que le président a dit qu'il est prêt à dialoguer avec les manifestants, aussi noble que cela puisse paraître, cela ne suffit pas."
L'ancien candidat à la présidentielle de 2023 du parti ADC Dumebi Kachikwu partage cet avis. "Je n'ai pas vu dans le langage corporel du président aujourd'hui un homme affecté par ce qui s'est passé la semaine dernière, dénonce-t-il. Un président du pays qui a perdu dix-neuf de ses citoyens à cause d'une manifestation sanglante, où des commerces ont été fermés. Je ne l'ai pas vu de regret dans son langage, j'ai juste vu un homme lire un discours préparé."
Treize morts selon Amnesty
Apparemment le message du président Tinubu n'a pas convaincu non plus les manifestants qui menacent de poursuivre leur mouvement. Les manifestations, qui ont débuté pacifiquement, sont devenues violentes dans certaines régions, faisant des morts dans les États de Borno, Jigawa, Kano, Kaduna et d'autres.
"Pour que les Nigérians se rassemblent et expriment leur mécontentement face à la mauvaise gouvernance, face à la corruption et face au pillage de notre trésor national, personne ne sponsorise ce mouvement, assure Kingdom Ekere, un manifestants. C'est une prise de conscience sur les réseaux sociaux qui a été déclenchée par la faim."
Amnesty International a évalué le bilan à 13 morts dans tout le pays et a appelé dimanche à mettre en place une commission d'enquête indépendante.
Au pouvoir depuis mai 2023, le president Tinubu a défendu ses réformes économiques, qui incluent la suppression des subventions sur le carburant et l'électricité et la dévaluation du naira, comme étant nécessaires pour mettre fin à des années de mauvaise gestion économique.
Des milliers de personnes ont commencé à descendre dans la rue le 1er août pour protester contre la politique gouvernementale et le coût élevé de la vie. Ils se sont également mobilisés en ligne pour exiger, entre autres, une baisse des prix de l'essence et de l'électricité.
La police nigériane a déclaré avoir arrêté près de 700 personnes au cours des deux premiers jours des manifestations, les accusant de vol à main armée, incendie criminel et de destruction de biens.