Aïssatou Sangaré est agent de planification familiale depuis plusieurs années au centre de santé Abattoir, dans la préfecture de Faranah, localité située à un peu plus de 400 km de Conakry. L'une de ses responsabilités quotidiennes est d'offrir les services de planification familiale. Un travail pas toujours évident dans un contexte de forte réticence.
"Souvent, les femmes ont peur d'utiliser les services de planification familiale, même quand elles le veulent et qu'elles en ont besoin" affirme Aïssatou Sangaré sur un air de regret. A la question de savoir, pourquoi les femmes ont cette peur, Aïssatou répond en ces termes : "certains maris s'opposent à ce que les femmes se planifient, souvent c'est la belle mère". Poursuivant, elle indique : "j'avais mis l'implant à une femme, qui avait déjà fait 6 enfants et son mari l'a obligé à l'enlever le lendemain en faisant tout en un scandale au centre de santé".
Le témoignage de Aïssatou sur ce phénomène n'est pas un cas isolé. À Mamou, dans le centre de santé de HorèMamou, une localité où l'utilisation des services reste confrontée à de forts préjugés, les femmes se cachent pour rencontrer l'agent PF. Dans ce centre de santé, les femmes viennent généralement la nuit car elles ne veulent pas être vues de peur d'être stigmatisées.
Femmes et sages - femmes disent non à ces barrières
Face à cela, des prestataires de santé comme Aïssatou innovent pour que les besoins des femmes en planification familiale soient entièrement satisfaits. "Dans la semaine, j'ai des jours où je reste au centre de santé tard la nuit pour recevoir les femmes qui ne veulent pas être vues ici la journée par leurs connaissances" explique - t - elle. "Parfois, certaines femmes prennent des comprimés, mais n'emportent pas tout de peur que le mari tombe sur le paquet, donc je garde une partie pour elles" explique - t elle.
L'Inspectrice régionale de la Santé de la région de Mamou a indiqué dans son allocution de circonstance à l'occasion du lancement de la campagne PF 2024, que la question de la planification familiale au Fouta est très sensible. "Certaines femmes cachent même leur cachet (produit contraceptif) dans le toît de leur case ou dans le mur de leur toilette, juste pour ne pas qu'une autre personne tombe sur ça" témoigne - t - elle.
A chaque fois qu'une femme désire une méthode contraceptive mais se trouve bloquée, les sages - femmes et autres agents PF habilités, trouvent des voies alternatives. A macenta, venue rencontrer la sage femme pendant la période de la gratuité des services PF, une jeune femme, qui a décidé avec son mari de se planifier, préfère que l'implant lui soit posé sur la cuisse. La raison de ce choix peu commun est très simple, comme nous l'explique la jeune femme : "mon mari m'a donné l'autorisation pour me planifier, mais ma belle mère ne veut pas et souvent, elle tate mon bras pour voir s'il n y a pas le batonnet, donc, je préfère mettre l'implant sur ma cuisse".
Plus que jamais, les femmes et les sages - femmes imaginent ensemble des stratégies pour contourner toutes ces barrières. Cette solidarité aide à soutenir davantage les efforts nationaux pour accélérer le zéro besoin non satisfait en planification familiale en Guinée.