Vohémar est une ville située sur la côte Nord-est de Madagascar, dans l'ancienne province d'Antsiranana.
Selon la tradition, les premiers habitants sont des Antavaratra (Nordistes) et des Antiharana (habitants des rochers ou actuels Antakarana). Des Arabes y pratiquent à l'époque le commerce. La ville prend naissance aux quartiers Androronana et Antsorolava, au pied du contrefort qui limite la plaine située au Sud. Le nord de la ville est alors appelé Andranovaka car il est tout couvert de buissons de «dara» (Phenix Reclinata aux fruits comestibles).
Par la suite, l'extension de la ville vers la plaine amène la découverte de nécropoles avec mobilier « auquel l'ignorance de la population n'attacha aucune importance » (Clovis Ralaivola, académicien). La tradition se contente de transmettre que les squelettes qu'on y voit, sont ceux de personnes de petite taille. «Leur disposition spéciale et méthodique dans les nécropoles leur fait attribuer une origine non aborigène. Ils doivent être ceux de 'mpihavy' (immigrants) connus sous le nom de Rasikajy. »
Selon Pierre Vérin, on désigne habituellement sous le nom d'Antalaotra les anciens habitants des comptoirs du Nord-ouest et de Rasikajy ceux de Vohémar. Les Rasikajy étaient sincèrement islamisés puisqu'on les a retrouvés couchés la tête à l'Est, les yeux tournés vers le Nord dans l'attente du coup de trompette du jugement dernier. Mais à leurs dépouilles, étaient associés tous leurs objets précieux, bijoux, poteries, ustensiles, armes. Une coutume malgache très différente des normes d'inhumation authentiquement musulmane. D'autres ustensiles, finis au tour, sont aussi visibles, taillés dans du chloritoschiste.
Et l'archéologue français d'ajouter: « Les Rasikajy de Vohémar se mélangèrent aux habitants du Nord et beaucoup de leurs descendants figurent parmi les Anjoaty actuels, mais d'autres émigrèrent vers le Sud. »
Cherchant le sens du mot Rasikajy, le linguiste Clovis Ralaivola le rattache à la locution dialectale locale « tsy kaja » (infatigable). Car « l'art de tailler des ustensiles dans du chloristoschiste exigeait beaucoup de patience, de soins, de répétitions surtout à une époque où les outils étaient encore rudimentaires ». Le chloristoschiste est d'ailleurs connu à Vohémar sous le nom de « vaton-dRasikajy» (roche de Rasikajy). Mais « ni les Vohémariens ni les descendants de Rasikajy n'ont continué cet art qui, avec les outils modernes, se réaliserait avec plus de facilité ».
Une autre vague d'immigrants islamiques se fixe plus tard à Vohémar. Ce sont les Anjoaty. Ce mot signifie « andafy » (outremer). Selon un chef naturel de ce Foko en 1970, Raobilahy Tsiasavika, « ses ancêtres étaient des rescapés d'une ile appelée Mijoa, située en Arabie et dévastée par la tempête à une époque qu'il ne peut déterminer, même approxi-mativement ».
Ils ont pris place dans une embarcation de fortune, passent par Mijomby (Mer Rouge) et débarquent à Ampasindava-Ambilobe en pays antakarana. Le roi de la contrée leur assigne la région de Bobaomby au Cap d'Ambre, l'Extrême-Nord de l'ile, comme refuge. Mais seul leur chef s'y fixe, ses compatriotes continuent leur voyage pour débarquer à Vohémar où les deux femmes rescapées et quatre hommes s'installent. Le reste du groupe poursuit vers le Sud et atteint Matitanana (Manakara). « Il a formé les ancêtres des Antemoro. »
Selon un autre descendant des premiers Anjoaty, l'arrivée de ces derniers coïncide avec le règne de Rangita en Imerina (vers 1520-1540). Au cours de leur périple le long de la côte Ouest en direction de Vohémar, certains descendent à Besalampy, Ambato-Boeni..., mais le gros du groupe se fixe à Vohémar. «C'est ainsi que les coreligionnaires d'autres régions viennent, de temps en temps, en pélerinage à Ambavan'Iharana qui est la pointe nord de la plaine de Vohémar et qui recèle des nécropoles d'Anjoaty. Vohémar est ainsi devenue la capitale de ce groupe ethnique. »
Les Anjoaty respectent certaines coutumes particulières, telles que l'inhumation dans le sable de la plage, l'obligation à une mère de se baigner à la mer dans les 24 heures qui suivent son accouchement; et en souvenir de l'un de leurs ancêtres, Akoholahi-mbezo, défense aux hommes qui ont les cheveux grisonnants de manger du poulet.