Madagascar: Les Anjoaty, des faiseurs de miracles

Rasikajy, Onjatsy ou Anjoaty? D'après l'académicien linguiste Clovis Ralaivola, des sources orales et écrites semblent faire allusion au même groupe ethnique, « Anjoaty serait la forme moderne résultant de l'évolution phonétique de Onjatsy ».

En 1648, Etienne de Flacour écrit : « L'Ondzatsy est un pêcheur qui est blanc et descend des Zafiramini... » À quoi Grandidier ajoute: « Les Onjatsy du Sud-Est sont les descendants d'Onjatsy du Nord. »

Fernand Kasanga, Anakara lettré, affirme que les Onjatsy sont des Arabes blancs pêcheurs provenant de Hedzaz, village sur le Nord de la Mer Rouge. Ils se sont installés d'abord dans le Nord-Ouest de Mada-gascar, puis côtoient vers le Nord pour s'installer à Iharana ou Vohémar.

Si les Rasikajy sont réputés habiles artisans, la tradition attribue aux Anjoaty le pouvoir de faire des miracles en raison de leur sainteté. « On rapporte à ce sujet qu'il leur suffirait de désigner du doigt des noix de coco pour les faire tomber au sol et qu'ils pouvaient transporter de l'eau avec un récipient en treillis. »

En 1877, le mission-naire B.T. Bachelor effectue une visite dans le Nord-Ouest de l'ile. Voici ce qu'il note: « Sur la côte Ouest aussi bien que sur la côte Est, le voyageur trouvera des gens bien respectés par les autres qu'on appelle Onjatsy. C'est une catégorie de gens très intéressants (...) Ils sont les descendants (ou les représentants selon un témoignage qui m'a dit que les vrais Onjatsy ont disparu) de la vieille caste de prêtres dans la tribu. La signification de leur nom est Saint et la plupart des gens du Nord de Madagascar leur attribuent toujours un pouvoir surnaturel tel que celui de faire des miracles et de bénir ou de maudire des gens de façon à changer le cours des circonstances temporelles. Dans leur ministère religieux, ils maintiennent plusieurs coutumes qui démontrent cela dans un système de sacrifice et d'adoration. Les Onjatsy se marient entre eux. »

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Selon un chercheur natif du pays, le mot « onjatsy » signifie « ona zatry » (olona zatra en merina) « autrement dit étrangers assimilés ». Et d'après Fernand Kasanga, « onjatsy » est la malga-chisation du mot Hedraz, nom du village d'origine de ce groupe ethnique.

De leur côté, Alfred et Guillaume Grandidier indiquent que les Onjatsy, les Antambahoaka, les Antemoro et les Antalaotra sont des immigrants originaires d'Arabie cités pour avoir colonisé Anjouan. À la suite d'une guerre de religion qui a éclaté aux Comores au XIe siècle, guerre provoquée par l'arrivée de nouvelles vagues d'immigrants, les vaincus cherchent refuge sur les côtes Nord de Madagascar jusqu'à Vohémar, et même dans le Sud-Est.

Vohémar est aussi appelé Iharambazaha (aux rochers des Blancs), «Tsiram-bazaha » (le port des Blancs) pour Flacourt. Mais son nom original se perd à la suite du départ des Européens de la zone au XVIe siècle.

Le voyageur Mayeur qui visite Vohémar en 1775, écrit: « On voit un peu avant d'arriver dans le Sud de Voyemare, les restes de deux bâtiments en pierre de forme carrée, lesquels paraissent anciens. Ces monuments ne sont point l'ouvrage des gens du pays, aussi est-il de tradition chez eux qu'ils l'ont été par des Blancs qui habitèrent autrefois cette partie de l'ile. Il y avait, selon eux, une pointe de terre qui s'étendait fort au large et formait un port très beau, très spacieux, très sûr où les vaisseaux étaient parfaitement à l'abri. Mais un fort ouragan ayant submergé la pointe, le port se trouva détruit et bientôt comblé. Une suite naturelle de ce désastre fut l'abandon de l'établissement et la retraite des Blancs. »

Dans son dictionnaire manuscrit, Barthélémy Huet de Froberville ajoute: « Les ruines dont parle M. Mayeur dans son voyage du Nord sont situées dans le Sud de la rivière de Vohémar, à peu de distance de la mer. Il en a trouvé d'autres semblables sur différents points de la côte et des iles qui avoisinent le Cap d'Ambre toutes faites à peu près des mêmes matériaux et sur le même modèle, toutes inconte-stablement l'ouvrage des Européens.

Celle de la rive de Vohémar qui est la première à se présenter en montant vers le Nord, est un carré en maçonnerie fait à chaux et à sable, des pierres galets semblables à celles qui couvrent les côtes de l'Isle de Bourbon. Des embrasures ou ouvertures non fermées y ont été aménagées qui dominent la mer. Cette bâtisse est partagée dans sa largeur par un mur de refend. »

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