Un réacteur nucléaire de 900 MW, c'est-à-dire dix fois plus la capacité de la centrale hydraulique d'Andekaleka, produit en moyenne chaque mois 500.000 MWh, ce qui correspond à la consommation de 400.000 foyers (edf.fr)
En 2019, le nucléaire contribuait à 70,6% de la consommation d'électricité en France. Ce pourcentage devance de loin l'hydraulique (11,2%) et le thermique à flamme (7,9%). Quant aux «énergies vertes», elles demeuraient marginales : éolien à 6,3%, solaire à 2,2%, bioénergies à 1,8%.
L'Allemagne, qui avait entamé un programme drastique de dénucléarisation et de décharbonisation, voudrait ramener sa consommation énergétique à 500 TWh, d'ici 2030, ce qui correspondrait au cinquième de ses besoins de 2022. Et d'importants projets sur l'énergie renouvelable sont en cours : 100 GW d'éolien terrestre, 30 GW d'éolien marin, 200 GW de solaire, 10 GW d'hydrogène (Agence internationale de l'énergie).
À l'échelle mondiale, c'est encore le thermique à flamme qui assure l'essentiel (63,9%) de la fourniture d'électricité. Aucunement surprenant de retrouver les grandes puissances industrielles installées en tête des plus demandeuses de cette énergie thermique à combustion fossile : Chine, États-Unis, Inde, Japon, Russie.
Si on se contente de Wikipédia, le dessin révèle un Madagascar, au mieux écolo, au pire moyenâgeux, en ces années 2020 : «l'énergie dominante reste la biomasse, en particulier le bois» ; «la consommation d'énergie primaire par habitant atteint seulement 17% de la moyenne mondiale» ; «l'électricité, produite pour 57,7% à partir de combustibles fossiles, représente seulement 2,4% de la consommation finale»... D'ailleurs, ce profil dégagé par Wikipédia ne semble présenter aucune ride en comparaison du précédent portrait énergétique brossé par le rapport d'évaluation sur le projet d'Andekaleka, en mai 1978. Les auteurs y évoquaient déjà le bois de chauffage, le fumier séché, le charbon de bois, la bougie...
J'ai entrepris cette petite recherche rapide après l'annonce d'un énième délestage tournant. La Jirama précise que l'étiage impacte sur les sources des barrages hydroélectriques et que, pour «rétablir le niveau des barrages d'Andekaleka, de Mandraka et d'Antelomita», la production d'électricité devra être abaissée en conséquence. Andekaleka, qui fournit la majeure partie de l'électricité pour la Capitale Antananarivo, connaîtrait déjà une baisse d'un mètre.
Après les fuites sur conduite d'eau forcée ou des court-circuits dans les centrales électriques, sinon la «maintenance des infrastructures qui datent depuis la création de la JIRAMA», voilà donc l'implacable Nature, sans autre intervention humaine que destruction alimentaire ou détachement contemplatif. Sur fond d'explosion démographique et d'intense exode rural.
À l'issue de la nationalisation de l'Électricité et Eau de Madagascar (EEM) et de la Société d'énergie de Madagascar (SEM), en 1973, la JIRAMA naquit de leur fusion en 1975. Depuis, quelles autres études que celle d'Andekaleka furent menées sur d'autres rivières, d'autres chutes d'eau, sur la création d'autres lacs-réservoir ? À une époque, la JIRAMA avait sensibilisé contre la déforestation parce qu'elle avait bien compris que sans forêt, il n'y aura plus de pluie, que sans pluie aucune rivière ne coulera, et que ce sera l'étiage toute l'année. Et pour l'éternité.
Toutes ces considérations me viennent à entendre le concert de lamentations adressées uniquement au Directeur Général de la JIRAMA, qui a le malheur d'être payé au taux du marché mondial, bien entendu, astronomique du haut de la petitesse de Madagascar.
Cet ingénieur avait réussi, me semble-t-il, une mission équivalente au Rwanda, de mai 2017 à septembre 2023. En 2022, le Rwanda avait atteint 61% du programme de couverture universelle en électricité. Il s'agissait de connecter au réseau 400.000 foyers chaque année, sur sept ans...
Proprement miraculeux. Et Madagascar attendait un miracle. Sauf que les miracles ne se produisent pas comme ça. Il faut des préalables à un miracle, il faut de la cohérence, il faut de la continuité. Pour les Malgaches : patienter encore, après s'être résignés si longtemps, mais ce fut faute d'avoir trop attendu pour les choix stratégiques qui étaient déjà urgents il y a cinquante ans.