Alors que le mouvement Endbadgovernance annonce une nouvelle contestation sociale, à compter du 1er octobre 2024, le président Bola Ahmed Tinubu n'a toujours pas réagi à l'ultimatum. Le chef d'État nigérian se mure dans le silence depuis son discours du dimanche 4 août. Le mouvement contre la mauvaise gouvernance s'est achevé ce samedi 10 août 2024 après 10 jours plus ou moins agités dans tout le Nigeria.
Il clamait, durant sa campagne électorale, que c'était son tour de diriger le Nigeria. Bola Ahmed Tinubu fait face aujourd'hui à la plus importante crise politique de sa carrière. Comme si le vertige du pouvoir et son entourage proche le coupaient du Nigeria réel. Un pays où chaque zone géographique a manifesté selon ses propres intérêts durant ces 10 derniers jours.
Traditionnellement bastion de l'agitation sociale, le Sud-Ouest yoruba s'est mobilisée sans trop de violence, ni pillage. Dans quatre États et surtout Lagos, le Sud-Est a totalement ignoré la manifestation. Plusieurs figures de la communauté ibo avaient incité au boycott pour éviter « de devenir des boucs émissaires ».
La situation a tourné quasi à l'insurrection dans le Nord haoussa et peul où plusieurs gouverneurs ont dû décréter le couvre-feu. Beaucoup de cortèges pacifiques se sont transformés en scènes de pillages. L'apparition de drapeaux russes largement commentée dans la sphère politique n'a pas occulté la mort de dizaines de manifestants tombés suite à des tirs présumés de la police ou de l'armée. Ces dix jours de contestation sont la preuve que le Nigeria va mal.
Le président Tinubu va devoir faire preuve d'imagination pour éviter que son pays ne sombre dans une crise plus profonde à partir du 1er octobre 2024.
Revendications concernant le salaire minimum
L'une des revendications des manifestants est l'augmentation du salaire minimum à l'équivalent de 146 euros, alors que le pays connait une grave inflation. Le chef d'État a signé une loi fédérale le faisant passer de 17 euros à 41 euros par mois.
Esther, une mère de famille qui survit avec des revenus en dessous du salaire minimum, se sent concerné par les revendications du mouvement même si elle n'a pas pris part aux manifestations dans Abuja. « 1 centime d'euro par 1 centime d'euro. Parfois, je gagne entre 17 centimes et 30 centimes d'euro par jour... Mon mari est artisan. Et l'argent n'est même pas suffisant. Je compte toujours sur les membres de ma famille pour m'aider. »
Handicapée mobile et par manque de réseau, Esther n'a jamais pu décrocher un emploi salarié. Cette diplômée en linguistique survit en vendant des arachides devant chez elle. « Ça donne envie de se suicider. Je l'ai envisagé il y a longtemps... Quand je me pense à ma famille, je me dis qu'il n'y a pas de raison de se tuer. Tant qu'il y a de la vie, je remercie Dieu de m'avoir donné deux merveilleux enfants. »
Le bien-être des employé(e)s : c'est la priorité de Sabrina Henshaw. Dans son centre de formation aux métiers de la restauration haut de gamme, Sabrina a anticipé la loi fédérale sur le salaire minimum. « Ce n'est pas seulement une question d'argent. C'est une question de valeur. Et les gens nous admirent. Nous avons une marque qui s'est imposée parce que nous payons plus que le salaire minimum à tout notre personnel ». La patronne de la Chief's Academy se bat pour que ses salariés ne basculent pas dans la pauvreté comme des millions de travailleurs nigérians.