Chaque fois qu'une maladie se déclare dans le monde, comme la variole, il appartient à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) de déterminer l'importance à lui accorder, et notamment s'il s'agit ou non d'une urgence sanitaire publique de portée internationale.
Les efforts déployés au niveau mondial pour gérer les épidémies remontent à la peste noire en Europe au 14e siècle. Depuis lors, des règles ont été élaborées et affinées pour faire face à l'émergence de nouvelles maladies et à la complexité croissante d'un monde de plus en plus interconnecté.
De nombreuses maladies peuvent affecter un grand nombre de personnes. Mais toutes les maladies ne sont pas considérées comme des urgences sanitaires publiques.
La gravité d'une épidémie dépend de plusieurs facteurs.
Ceux-ci comprennent le degré de contagiosité et le potentiel de propagation rapide, la gravité de l'infection, le taux de létalité (le nombre de personnes infectées qui meurent), la disponibilité de vaccins ou de traitements (c'est plus grave s'il n'y en a pas), l'impact sur les voyages et le commerce, et le contexte socio-économique.
Ce qu'elle déclenche
La déclaration d'une "urgence sanitaire publique de portée internationale" par l'OMS entraîne un certain nombre de conséquences.
Tout d'abord, elle signale un engagement à fournir des ressources internationales pour la réponse.
Deuxièmement, elle permet d'appliquer d'autres dispositions du Règlement sanitaire international. Ce règlement est issu du Règlement sanitaire international du milieu des années 1900, utilisé pour lutter contre les épidémies de choléra. À cette époque, les effets sociaux et économiques des épidémies transfrontalières étaient de plus en plus connus, et l'on s'inquiétait des interférences indues avec le commerce.
En 1969, le règlement a été renommé "Règlement sanitaire international" par l'OMS. Il a ensuite été modifié en 1973 et en 1981. Mais même à cette époque, il ne couvrait que trois maladies : le choléra, la fièvre jaune et la peste. Les principes qui les sous-tendent sont les suivants :
une sécurité maximale contre la propagation internationale des maladies avec un minimum d'interférence avec le trafic mondial.
En 1995, une révision formelle a été entamée afin d'élargir le champ d'application de la réglementation en proposant six catégories de syndromes à déclaration obligatoire :
- syndrome de fièvre hémorragique aiguë,
- syndrome respiratoire aigu,
- syndrome diarrhéique aigu,
- syndrome de jaunisse aiguë,
- syndrome neurologique aigu, et
- d'autres syndromes à déclaration obligatoire.
En outre, cinq facteurs ont été proposés pour déterminer si un groupe de syndromes était urgent et d'importance internationale. Il s'agit d'une transmission rapide dans la communauté, d'un taux de létalité élevé et inattendu, d'un syndrome nouvellement reconnu, d'un profil politique et médiatique élevé et de restrictions commerciales ou de voyage.
La dernière révision du règlement remonte à 2005, après l'épidémie de SRAS de 2003.
Les cinq principaux changements par rapport à la version précédente étaient les suivants :
- une extension considérable du champ d'application du règlement,
- la création d'obligations pour les États de développer des capacités minimales de surveillance et de réponse,
- l'octroi à l'OMS du pouvoir d'accéder à des sources non gouvernementales d'informations sur la surveillance et de les utiliser,
- l'octroi à l'OMS du pouvoir de déclarer une urgence de santé publique de portée internationale et de formuler des recommandations sur la manière dont les États parties y font face ; et
- l'intégration des notions de droits de l'homme dans la mise en oeuvre de la réglementation.
Le règlement définit les modalités de gestion d'une situation d'urgence. Il s'agit notamment d'établir une liste d'experts nommés par le directeur général de l'OMS dans tous les domaines d'expertise pertinents. Un comité d'urgence est ensuite constitué à partir de cette liste pour avis. Le comité doit se prononcer sur une série de questions liées à la gestion de l'épidémie. Il s'agit notamment de déterminer si un événement constitue une urgence mondiale et à quel moment il convient d'y mettre fin.
Plus qu'un problème de santé
Mais la réglementation n'a qu'une portée limitée. De nombreux pays ne peuvent s'y conformer faute de ressources.
De nombreux problèmes liés aux urgences mondiales ne sont pas des problèmes de santé spécifiques, mais concernent la société civile, l'engagement communautaire, l'ordre public et le contrôle des frontières. Lors de l'épidémie d'Ebola de 2014, par exemple, une équipe de sensibilisation sanitaire a été massacrée en Guinée parce que la population locale craignait que des étrangers ne viennent dans leur village. Au cours de la conférence COVID-19, nous avons également assisté à des troubles civils dans certains pays. Toutes ces questions sont à prendre en considération par l'OMS lorsqu'elle décide de déclarer ou non une urgence de santé publique de portée internationale.
Ceci est un extrait revisé d'un article précédemment publié par The Conversation Africa écrit par C Raina MacIntyre et Obijiofor Aginam.
C Raina MacIntyre, Professor of Global Biosecurity, NHMRC L3 Research Fellow, Head, Biosecurity Program, Kirby Institute, UNSW Sydney
Obijiofor Aginam, Principal Visiting Fellow & Former Deputy Director, International Institute for Global Health (UNU-IIGH), United Nations University