Maroc: Fatiha Saddas - Le fait que la réforme du Code de la famille passe du Conseil des oulémas au vote au Parlement constitue une révolution douce

Durant le nouveau règne, la question féminine a connu des évolutions positives, avec d'importantes réformes juridiques et politiques. Cependant, une évaluation précise dépend de la comparaison entre les attentes et les réalisations. Nous, en tant que mouvement féminin, tant dans son aspect politique que civil, avons mené des luttes pour réaliser plusieurs acquis aux niveaux juridique et politique. Je ne vous cache pas que nous rêvions depuis la fin des années 70 jusqu'aux années 90 d'un changement d'approche, c'est-à-dire que la lutte des femmes ne doit pas se limiter aux revendications portées par notre mouvement, mais qu'il y ait une réaction de la part de la plus haute autorité de l'Etat surtout dans une question épineuse comme celle de notre cause. Et effectivement, Feu S.M Hassan II a reçu le mouvement féminin qui a remis au Souverain des revendications concernant la réforme du Code de statut personnel qui fut à l'époque un texte sacré.

Avec le nouveau règne et dans le premier discours de S.M le Roi Mohammed VI, nous avons noté un changement radical dans le discours adressé au peuple marocain. Et bien évidemment, l'occasion était propice pour présenter la question féminine avec toutes ses complexités sociétales au jeune Roi. Dans Son discours, nous avons ressenti une volonté moderniste progressiste. A cette époque-là, nous discutions une question fort importante, à savoir comment élever la représentativité des femmes au sein des institutions élues notamment au Parlement. Le nouveau règne est marqué également par un autre fait important, à savoir que la réforme du Code de la famille passe du Conseil des oulémas au vote au Parlement. A vrai dire, il s'agit d'une révolution douce.

La question féminine

La nouvelle ère est marquée par des progrès notables dans le domaine des droits des femmes, tels que la réforme du Code de la famille et de la loi sur la nationalité, l'amélioration de la représentativité des femmes au niveau politique et une relative égalité des chances au niveau de l'accès aux postes administratifs. Mais les objectifs que nous nous sommes fixés en tant que mouvement féminin marocain pour une présence remarquée des femmes aux postes de responsabilité, qu'ils soient politiques ou administratifs, n'ont pas été réalisés à cause de plusieurs dysfonctionnements, notamment ceux liés aux choix des femmes candidates, à la modification du mode de scrutin et à la privation des femmes élues d'accumuler des mandats parlementaires. Il y a aussi des défis dans d'autres domaines comme la violence à l'égard des femmes et l'égalité juridique, culturelle et économique.

Place de la femme dans les partis, les syndicats et la société civile

Soyons francs, aucune femme n'aurait pu accéder à des postes de responsabilité dans ces instances sans le quota instauré grâce à la volonté politique de la part de la plus haute autorité du pays et de la part du gouvernement de l'Alternance consensuelle.

Malheureusement, nous, en tant que mouvement féminin marocain, quand nous avions lutté pour la mise en place du quota, nous l'avons considéré seulement comme une mesure temporaire pour que les femmes puissent mieux se positionner dans l'espace politique. Cela n'empêche pas de reconnaître qu'il y a une amélioration de la représentativité des femmes, mais les progrès sont inégaux. Des efforts supplémentaires pourraient être nécessaires pour garantir la participation effective des femmes aux postes de décision en général.

Bilan des initiatives sociales

Des initiatives telles que l'Initiative nationale pour le développement humain ont eu un impact positif sur les femmes, en particulier dans les zones rurales. Toutefois, une évaluation précise de l'impact nécessite des études et enquêtes de terrain.

Le rayonnement des femmes marocaines

Ces dernières années ont été marquées par l'émergence de la femme marocaine dans divers domaines tels que le sport, les affaires, les sciences et la politique. Cela constitue une nette amélioration des opportunités pour les femmes par rapport à la période précédente.

L'image marquante du nouveau règne

Au cours des 25 dernières années, l'image de la femme et son rôle au sein de la société ont connu des mutations fondamentales. Ces changements, qui ont coïncidé avec ce que l'on appelle la «Nouvelle ère», ont positivement affecté le statut de la femme marocaine, ses droits et ses opportunités dans divers domaines de la vie quotidienne.

Premièrement, sur le plan juridique, cette période a été marquée par d'importantes réformes, notamment celle du Code de la famille en 2004, qui a accordé aux femmes des droits plus larges dans les domaines du mariage, du divorce et de la garde des enfants. La Constitution a également été réformée en 2011 consacrant l'égalité entre les hommes et les femmes en droits et devoirs. Mais il y a un hic, c'est que la mise en oeuvre effective de certaines dispositions de la Constitution fait encore défaut.

Dans le domaine politique, la représentativité des femmes au Parlement et au sein des conseils communaux s'est considérablement améliorée. Nous constatons désormais des femmes occupant d'importants postes ministériels et de décision, ce qui reflète un changement dans l'image stéréotypée du leadership politique.

Sur le plan économique, les femmes marocaines ont accédé à de nouveaux domaines de travail et assumé des postes de direction dans de grandes entreprises. Le nombre de femmes entrepreneuses a connu une hausse et les Marocaines jouent un rôle important dans le développement économique du pays.

Dans le domaine de l'enseignement, l'accès des filles aux écoles et universités a considérablement augmenté. Aujourd'hui, les femmes marocaines excellent dans les domaines de la science, de la technologie, de l'ingénierie et de la médecine, modifiant ainsi l'image traditionnelle quant aux capacités et ambitions des femmes.

Sur le plan social, les femmes marocaines sont devenues plus présentes dans l'espace public. Elles accèdent à des domaines jusqu'à récemment monopolisés par les hommes, participent à des activités sportives et expriment plus librement leurs opinions dans les médias et les réseaux sociaux.

Dans le domaine culturel et artistique, les femmes marocaines sont devenues des penseuses et des artistes, ce qui a contribué à changer l'image stéréotypée concernant la femme et ses capacités créatrices.

Malgré ces évolutions positives, les femmes marocaines restent confrontées à des défis. L'écart entre les sexes existe encore dans certains domaines, notamment dans les zones rurales. Des problèmes tels que la violence à l'égard des femmes qui coûte des milliards de dirhams à l'Etat, et le harcèlement nécessitent davantage d'efforts pour y remédier.

On peut dire que l'image de la femme marocaine durant le nouveau règne s'est considérablement améliorée. Aujourd'hui, la femme est plus autonome et présente dans divers domaines de la vie quotidienne, alliant préservation de son identité culturelle et ouverture aux défis actuels. Le processus visant à parvenir à la pleine égalité et à l'autonomisation des femmes est toujours en cours et nécessite des efforts continus de la part de tous les secteurs de la société marocaine. Nous devons rester mobilisés pour préserver les acquis et en réaliser d'autres.

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