Au Mali, le Mouvement du 5-Juin-Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP), proche du Premier ministre Choguel Kokalla Maïga, a organisé un meeting au Centre international de conférence de Bamako pour célébrer les quatre ans de la chute du président Ibrahim Boubacar Keïta (IBK). Suite aux coups d'État du 18 août 2020 et du 24 mai 2021, le pays est dirigé par un régime militaire avec à sa tête le colonel Assimi Goïta, président de la transition. Depuis, le Mali mène une diplomatie de rupture pour s'affirmer sur la scène internationale.
Pour le Premier ministre de transition Choguel Kokalla Maïga, le 18 août 2020 marque « le jour du changement de paradigme politique au Mali ». Ce jour-là, après des semaines de manifestations menées par une coalition hétéroclite de partis et mouvements contre la vie chère, la corruption et les fraudes électorales, le président Ibrahim Boubacar Keïta est renversé. Toutefois, ce n'est qu'après le second coup d'État de mai 2021 que les militaires au pouvoir ont véritablement amorcé une rupture dans leurs choix stratégiques.
Une rupture diplomatique marquée par le rapprochement avec la Russie
Le Mali a rapidement renforcé ses relations avec la Russie pour répondre à ses besoins en équipements militaires et a fait appel aux mercenaires de Wagner pour lutter contre le terrorisme. En parallèle, les relations avec la France se sont détériorées : l'ambassadeur de France a été déclaré persona non grata, et les soldats français de l'opération Barkhane ont été contraints de quitter le pays en 2022.
Près d'un an plus tard, ce sont les Casques bleus de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma) qui ont été priés de plier bagage. Les autorités maliennes accusent la mission onusienne d'« instrumentaliser les droits de l'homme » après plusieurs enquêtes sur les exactions présumées de l'armée malienne et de ses supplétifs russes, notamment à Moura, où le gouvernement malien affirme avoir éliminé des terroristes. Cependant, des enquêtes de l'ONU et d'organisations internationales dénoncent la mort de civils lors de cette opération.
Un repositionnement économique et régional
Sur le plan économique, le Mali se tourne de plus en plus vers les BRICS, dont l'Iran et la Turquie, qualifiés de « partenaires sincères », tout en s'éloignant progressivement de ses alliés occidentaux. Sur le plan régional, le pays forme avec le Burkina Faso et le Niger la Confédération des États du Sahel. Ces trois pays, dirigés par des régimes militaires, envisagent de quitter la Cédéao (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest), après avoir subi des sanctions de cette organisation pour ne pas avoir respecté un retour à l'ordre constitutionnel.
Une transition vers une dictature ?
Alors que les militaires consolident leur pouvoir, aucun calendrier électoral n'a été annoncé au Mali, au Burkina Faso ou au Niger. Pour la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), cette période de transition au Mali semble « se transformer en dictature », comme l'exprime Hassatou Ba-Minté, directrice Afrique de l'organisation.
Aujourd'hui, nous ne sommes pas dans une refondation qui nous amène à un nouvel ordre démocratique au Mali (...). Nous assistons à une dégradation très grave, que ce soit dans la situation des droits humains ou dans la lutte contre le terrorisme. (...) On constate également la détérioration de la situation économique et sociale. Le dialogue politique est rompu (...). C'est très inquiétant pour nous, et nous alertons contre un risque de dictature militaire au Mali.