Ile Maurice: Entre démission, arrestations et radiation des charges... une saga tumultueuse

Alors que la démission de Sherry Singh - ami proche du Premier ministre, Pravind Jugnauth, devenu son adversaire politique - en tant que «Chief Executive Officer» de Mauritius Telecom (MT) en juillet 2022 à la suite des allégations de «sniffing», avait déjà fait grand bruit, les arrestations et enquêtes qui ont suivi ont porté sur des questions loin, très loin, de ce scandale. Retour sur les principaux faits marquants de la bataille juridique de Sherry Singh depuis sa démission de MT, ainsi que sur la radiation de plusieurs charges provisoires.

Affaire cuivre : «timing spécial» de la SST

En mai 2023, Sherry Singh est convoqué par la Special Striking Team (SST) dans le cadre d'une enquête sur la saisie de 22 tonnes de cuivre d'une valeur de Rs 22 millions chez Tradeway International Ltd, à La Tour-Koenig, le 10 avril de la même année. Raison : la police souhaite comprendre si Sherry Singh a favorisé cette société indienne dans la vente de câbles en cuivre de MT lors de l'appel d'offres lancé en... 2019. La SST, sous la supervision de l'assistant surintendant de police Ashik Jagai, perquisitionne alors le domicile de Sherry Singh dans la soirée. Ce dernier et son épouse sont arrêtés et maintenus en détention policière. Le couple fait face à une accusation provisoire de «conspiracy to commit money laundering»

Cette enquête conduit également à l'arrestation de quatre personnes, en l'occurrence France Santharum, responsable de la chaîne d'approvisionnement, Rakesh Persand, directeur de Tradeway International Ltd, Rajhree Bundhoo et Vishal Bundhoo. Des soupçons du blanchiment d'une somme de Rs 500 millions sont évoqués, car la quantité de cuivre serait de 50 000 tonnes, alors que Sherry Singh aurait déclaré n'avoir vendu qu'environ 8 000 tonnes. L'affaire amène de nombreuses personnes à se demander la raison pour laquelle, alors que ce dossier remonte à cinq ans, que ce n'est qu'après que Sherry Singh ait décidé de quitter Lakwizinn du Mouvement socialiste militant qu'une enquête de police a été ouverte.

%

En juillet 2023, une autre enquête policière conduit à une deuxième arrestation de Sherry Singh. Cette fois, il lui est reproché d'avoir donné, au siège de MT, des instructions à deux personnes pour effacer des données informatiques avant sa démission. Il est provisoirement inculpé de «giving instruction to commit a misdemeanour» dans le sillage de cette enquête.

«Enter» Danesh Ellayah

En mar s 2023, la Cour suprême accède à la demande de la Financial Intelligence Unit (FIU) de geler plusieurs biens de Sherry Singh, ainsi que ceux de DIX de ses proches collaborateurs, dont ceux de sa femme, Varsha Singh, et de Danesh Ellayah, un proche de Sherry Singh qui est propriétaire de la société DNS Consulting Ltd. Le 1er septembre 2023, une troisième enquête de police, cette fois concernant une affaire de malversation présumée liée à l'achat par MT de Smart Box 4K, conduit à des arrestations. La police soupçonne que le prix de ces boîtiers aurait été artificiellement gonflé lors de leur achat par MT, favorisant DNS Consulting Ltd. Et ce, à travers une entité étrangère nommée Anglomobility DMCC. La SST perquisitionne les domiciles de Danesh Ellayah et de Sherry Singh. Tous deux sont arrêtés, interrogés under warning et libérés sous caution.

Or, le 12 septembre 2023, la juge Karuna Gunesh-Balaghee accède à la demande de Danesh Ellayah et de DNS International Limited, et annule le gel des avoirs ordonné en mars de la même année. Cette décision repose sur les arguments «trop vagues» de la FIU elle-même et sur les documents justificatifs soumis par Danesh Ellayah. Par la suite, il sera révélé que la majeure partie de l'argent reçu par les sociétés d'Ellayah provient du... bureau du Premier ministre.

Trois jours plus tard, le 15 septembre 2023, Danesh Ellayah et quatre autres personnes sont arrêtés par des agents de la défunte Independent Commission Against Corruption - désormais appelée Financial Crimes Commission - sous l'inculpation provisoire de «public official using office for gratification» en vertu de la Prevention of Corruption Act. En décembre 2023, la FIU obtient un nouvel ordre de la Cour suprême, gelant les avoirs et les comptes bancaires de Danesh Ellayah. Cet ordre, émis par le juge Shameem Hamuth-Laulloo, a une durée de validité de six mois et vise à préserver les actifs pendant le déroulement de l'enquête.

Par ailleurs, les démêlés de Sherry Singh avec la police ne cessent de se multiplier. En janvier de cette année, l'ex-CEO de MT est à nouveau arrêté dans le cadre de l'enquête sur le détournement présumé de matériel et d'équipement dans les centres MUGA (Multi Use Games Area) et est libéré sur parole.

Radiation des charges provisoires

Malgré les nombreuses enquêtes et arrestations, plusieurs des charges provisoires ont été rayées. En avril de cette année, la magistrate Warda Peerally SayedHossen a rayé l'accusation provisoire contre Danesh Ellayah, concluant que la poursuite n'avait pu produire de preuves solides. La magistrate a également fait ressortir, entre autres, qu'il n'y avait aucune preuve pour démontrer que l'homme d'affaires était impliqué dans le processus de prise de décision, ni aucune preuve d'un quelconque accord entre lui et Sherry Singh. Par conséquent, en juin, en cour de district de PortLouis, la magistrate Naazish Sakauloo a rayé l'accusation de complot pour escroquer MT contre Sherry Singh dans le cadre de cette même enquête. L'ex-patron de MT maintient quant à lui être victime de persécution depuis qu'il a décidé de dénoncer l'affaire de «sniffing».

Le samedi 3 août, le magistrat Arun Rohamally, siégeant au tribunal de Rose-Hill, a également rayé l'accusation provisoire de «public official using office for gratification» qui pesait sur Danesh Ellayah. Selon les dernières informations, l'homme d'affaires a déposé, le mardi 13 août, une plainte devant la Cour suprême pour réclamer des dommages de Rs 227 millions contre l'État et le commissaire de police, Anil Kumar Dip. Ceci, en raison d'un préjudice subi après que leurs passeports aient été saisis par les officiers du Passport and Immigration Office à l'aéroport sir Seewoosagur Ramgoolam, sans qu'aucune explication n'ait été fournie.

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.