Le gouvernement kényan a annoncé préparer de nouvelles mesures fiscales pour faire face à une dette colossale, au risque de relancer la contestation au sein de la population.
Au Kenya, la loi de finances publiques 2024, qui était discutée en juin, a déclenché un mouvement de contestation fort de la jeunesse qui s'est traduit par des semaines de manifestations meurtrières.
Une cinquantaine de personnes ont trouvé la mort dans la répression des forces de l'ordre. Le président William Ruto avait été contraint de retirer le projet de loi le 26 juin et la contestation avait baissé.
William Ruto samedi (17.08), puis son ministre des Finances, John Mbadi, dimanche, ont annoncé toutefois que de nouvelles taxes étaient en passe d'être instaurées. Très peu de détails sont disponibles pour le moment.
On sait cependant que l'écotaxe, très contestée par les entreprises, sera de retour et que les produits sensibles, comme les serviettes hygiéniques, seront épargnés par les augmentations.
Un trou dans le budget du gouvernement
Jason Braganza, économiste et directeur de l'ONG panafricaine Afrodad, revient sur les raisons de cette crise financière. Selon lui, "la raison pour laquelle on en est arrivé là est que les propositions de taxes dans la loi de finances publiques 2024 ont été considérées comme extrêmement punitives et régressives, et imposant une lourde charge fiscale sur la population. En même temps, il y avait une perception généralisée et des preuves suggérant que les dépenses du gouvernement étaient plutôt extravagantes".
L'annulation de la mesure fiscale a créé un trou équivalent à 2,4 milliards d'euros dans le budget du gouvernement, aggravé par le retrait de certaines taxes imposées l'année dernière et jugées inconstitutionnelles le 31 juillet dernier par la Cour d'appel.
Le gouvernement dit maintenant manquer d'argent pour financer des projets de développement alors que le Kenya traverse une crise de la dette nationale. 70% des revenus de l'Etat servent à rembourser les nombreux prêts.
Les manifestations pourraient reprendre
Kwame Owino, directeur de l'Institut kényan des affaires économiques, note que "le gouvernement a accumulé des dettes depuis 2013 et 2014 et ces dernières années évidemment, les échéances sont arrivées, en commençant avec les Eurobonds. Les dettes sont devenues exigibles et les revenus n'ont pas grandi aussi vite que les obligations d'emprunt, donc cela a mis sous pression les dépenses du gouvernement".
Pour Jason Braganza, la dette est une des raisons de la contestation populaire. Il estime qu'"il y a un défi de la responsabilité de la dette, de la gestion et de la transparence, de la gouvernance globale de la dette et cela a causé beaucoup des protestations publiques".
Ces nouvelles annonces font ainsi craindre une reprise des manifestations.