Dakar — Des acteurs de la santé ont plaidé mardi pour une inversion du modèle de financement des soins de santé primaires (SSP), principalement supportés jusque-là par les ménages à hauteur de 55,9%.
"Les ménages financent principalement les soins de santé primaires (SSP), alors qu'à la conférence d'Alma-Ata, les Etats s'étaient engagés à financer à hauteur de 15% les SSP. La santé devrait être un axe prioritaire en inversant le modèle de son financement", a déclaré Amadou Kanouté, directeur exécutif de l'Institut panafricain pour la citoyenneté, les consommateurs et le développement (Cicodev Africa).
Il prenait part à une session des dialogues sur le thème "Les soins de santé primaires (SSP) au Sénégal : Quelles pistes pour un financement adéquat, équitable et pérenne ?"
Selon Amadou Kanouté, les comptes de la santé pour 2017-2021 "révèlent que l'esprit de la déclaration d'Alma-Ata, [faite en 1978, aux Etats-Unis], a été dévoyé avec ce schéma de financement", suivant lequel "ce sont plutôt les ménages qui financent principalement les SSP et les Etats y participent".
Sous ce rapport, la Cicodev estime que "le système sanitaire devrait être un axe prioritaire de transformation systématique en inversant le modèle de son financement", selon son directeur exécutif.
Il ajoute que "les SSP sont la porte d'entrée vers la [Couverture sanitaire universelle-CSU], dans ce sens, un financement adéquat à travers l'éducation à la santé et à la prévention ouvriraient la porte vers la CSU".
"Le référentiel économique, la souveraineté économique, pharmaceutique, cet esprit se retrouve dans la lettre d'Alma-Ata lorsque nos Etats se sont engagés à faire de la santé une priorité avec la participation communautaire à un coût qui leur est soutenable. D'où le sens de la campagne de plaidoyer pour un financement adéquat et pérenne des "soins de santé primaires", a expliqué Amadou Kanouté.
Pour Isidore Siénellou, représentant la Banque mondiale à cette rencontre, "la logique voudrait qu'on ait des SSP financés par l'Etat avec une participation des ménages".
"Le Sénégal peut faire mieux parce qu'il a un niveau de richesse acceptable", a-t-il soutenu en martelant que "le financement par les ménages est régressif" et "entraine des iniquités et des inégalités".
"Nous lançons ce cri pour que les Etats mettent plus de ressources dans le financement des "soins de santé primaires, qui représentent 90%" des besoins sanitaires des populations, et "c'est pourquoi nous souhaitons que les SSP soient intégrés dans leur agenda", a-t-il plaidé.
Marie Sarr Diop, conseiller technique au ministère de la Santé et de l'Action sociale, soutient qu"'il est important de renverser la tendance".
"La mise en place des mécanismes de financement est nécessaire pour le financement durable des SSP, gage d'un système de santé pérenne", a-t-elle indiqué.
"Dans le cadre du financement de la santé en 2024, le Sénégal se situe à 9,4% de l'objectif d'Abuja", selon les statistiques du ministère des Finances et du Budget.
"Dans cette proportion, a ajouté M. Diop, il faut aussi prendre en compte les autres financements de santé dans les autres ministères", dans le cadre du budget alloué au secteur sanitaire.
Elle a lancé "un appel à tous les acteurs", afin qu'ils ne ménagent "aucun effort" pour accompagner la mobilisation des ressources pour la prise en charge des soins de santé humaine.