Sénégal: Les khalifes de Touba

En prélude au Grand Magal de Touba de cette année, la ville sainte de Cheikh Ahmadou Bamba Khadimou Rassoul refuse déjà du monde. Comme à l'accoutumée et à la veille de chaque Magal, la cité religieuse ne cesse d'accueillir la visite de personnalités ou de leaders politiques accueillis soit par Serigne Moussa Nawél Mbacké ou par Serigne Bassirou Abdou Khadre Mbacké, le Porte-parole du Khalife ou encore par Serigne Dame Atta Mbacké avant d'avoir une audience avec le Khalife Général, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké.

Aujourd'hui, gardien du legs du fondateur du mouridisme Cheikh Ahmadou Bamba Khadimou Rassoul, le Khalife Général, Serigne Mountakha Bassirou Mbacké, à la tête de la communauté mouride depuis le 10 janvier 2018, tient à perpétuer l'oeuvre de ses prédécesseurs. Du Premier Khalife Serigne Moustapha Mbacké à l'actuel Khalife Serigne Mountakha Mbacké, Sud quotidien propose le portrait de ces 8 Khalifes généraux qui se sont succédé pour perpétuer depuis 1927 le legs du vénéré guide du Mouridisme.

CHEIKH MOUHAMADOU MOUSTAPHA «KARIM» MBACKE (1927-1945)

L'empreinte du gardien du temple

Premier Khalife de Cheikh Ahmadou Bamba, Mouhamadou Moustapha Mbacké ; fils de Cheikh Ahmadou Bamba et de Sokhna Aminata Lo ; est né le 17 septembre 1888 à Darou Salam. Après des humanités auprès de Serigne Ndame Abdou Rahmane Lo, compagnon du fondateur du mouridisme, Mame Thierno Birahim Mbacké, frère cadet du Cheikh, et enfin de son père, il se distingua très tôt par son dévouement. Lorsque le Cheikh Ahmadou Bamba fut rappelé à Dieu en 1927, il s'illustra d'abord, malgré les moyens de transport quasi inexistants, à transférer avec une grande discrétion le Saint homme à sa dernière demeure de Touba. Mais aussi en jouant le rôle de père et rassembleur de la grande famille du Cheikh.

A l'instar de son Père, il a créé pour eux des daaras, véritables pôles de développement où, en dehors de l'enseignement du Coran et de la liturgie, le travail productif est érigé au rang de véritable sacerdoce. C'est ainsi que, pour doter les Cheikhs, il eut à fonder de nombreux villages dont on peut, pour mémoire, citer quelques-uns des plus connus : Tindody, Taïf, Naïdé, Darou Naïm, Kaél, Bayla. La plus grande réussite de Cheikh Mouhammadou Moustapha est sans doute la construction de la Grande Mosquée de Touba, recommandation majeure de Cheikh Ahmadou Bamba.

Pour les besoins de sa construction, le premier Khalife de Serigne Touba avait réussi la construction du chemin de fer reliant Diourbel à Touba afin de faciliter le transport des matériaux lourds et pour désenclaver la capitale du mouridisme fondée en 1888. Le père de Serigne Cheikh Mbacké «Gaindé Fatma» quittera ce bas monde en 1945.

CHEIKH MOUHAMMADOU FADILOU MBACKE (1945-1968)

Le charisme

Cadet (de six mois) de Serigne Mouhamadou Fadilou, Cheikh Mouhamadou Fadilou a vu le jour, le 27 du mois de Rajab, à Darou Salam, en 1889. L'un des faits marquants de sa biographie restera sans doute cet attachement à Cheikh Ahmadou Bamba qui s'est manifesté lors d'une rencontre avec le guide. « Je ne suis ni le père, ni le frère, ni l'oncle d'aucun d'entre vous. Je suis une créature vouée au service exclusif de Dieu.

Ceux d'entre vous qui auront choisi de m'accompagner sur ce chemin que j'ai réhabilité, ceux-là sont mes fils, neveux, frères et talibés », avait lancé Cheikh Ahmadou Bamba. Serigne Fallou avait aussitôt fait un acte d'allégeance qu'il déclinera ensuite en ces termes : «Notre espoir est en Toi, Toi qui nous as ouvert les portes de la félicité. Je Te vends mon rang de fils pour acquérir la gloire d'être Ton talibé.» En 1945, Serigne Fallou, devenu second khalife, plongea corps et âme dans la poursuite des travaux de la Grande Mosquée dont l'inauguration sera effectuée le 7 Juin 1963.

Le guide religieux a surtout réussi à donner une grande dimension au Magal de Touba en demandant à toute la communauté mouride de se rendre dans la cité religieuse pour célébrer à l'unisson le Grand Magal de 1948. Le Charismatique guide a été rappelé à Dieu en 1968 après 23 ans de règne. Le Magal du Kazou Rajab qui lui est dédié est encore célébré chaque année par la communauté mouride et reste l'un des plus grands événements religieux de Touba.

CHEIKH ABDOUL AHAD MBACKE : (1968-1989)

Le bâtisseur

Cheikh Abdoul Ahad est né en 1914 à Diourbel. La naissance de ce premier enfant de l'après exil a suscité, selon la tradition, une vive émotion de la part du Cheikh qui lui prédit un destin hors du commun. A sa naissance, le troisième Khalife Général des Mourides, Cheikh Ahmadou Bamba, prenant à témoin ses plus proches disciples déclara : « Priez pour lui afin qu'Allah lui accorde longue vie car, en lui, je place un espoir immense.

Le fils de Sokhna Maryama Diakhaté et frère aîné de Serigne Chouhaïbou entama ses humanités coraniques sous la conduite de son oncle et érudit Serigne Hamzatou Diakhaté ». Agriculteur émérite, il s'est investi dans ses exploitations de Touba Bélel, de Bokk Barga, de Kadd Balooji, de Mbara Dieng. Il a exercé le métier de commerçant cependant, sans jamais encaisser de ses clients plus qu'il ne lui est dû.

Il s'est même essayé au transport en commun. Quand, le 6 août 1968, Serigne Fallou retourne à son Créateur, Cheikh Abdoul Ahad continue l'oeuvre de construction et de modernisation de Touba. Il s'affirma comme un bâtisseur et son Khalifa a surtout rimé avec le développement prodigieux de la cité «Gnack Caaxaan», pour décliner un autre de ses surnoms, Serigne Abdoul Ahad est considéré comme le bâtisseur ou l'homme de la transformation de la cité religieuse.

En quelques années, Touba sera en chantier avec un plan de circulation en période de Magal, son lotissement, l'extension de la Grande mosquée, l'approvisionnement en eau, sans compter d'importants travaux de la Grande Mosquée, une Bibliothèque équipée qui compte des ouvrages du monde musulman et des écrits du Mouridisme.

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