Sénégal: Comment Macron compte reprendre la main

analyse

Si les derniers mois ont connu un développement important dans les relations entre Paris et Bangui, il n'en demeure pas moins que dans sa stratégie, le dirigeant français, Emmanuel Macron, compte se servir de Bangui afin de reprendre la main dans les régions où la France a perdu son influence. Retour sur les dessous insoupçonnés de la feuille de route adoptée le 17 Avril 2024.

Bangui- Paris, les secrets du deal politique

Suite à un deuxième tête-à-tête en moins de six mois (après celui qui a eu lieu en Septembre 2023), Emmanuel Macron a orchestré une fois de plus un déjeuner de travail avec son homologue Faustin Archange Touadéra. Si les présidences française et centrafricaine ont parlé, au sortir de cette rencontre très attendue, de l'existence d'une « feuille de route » entre Paris et Bangui, il n'en demeure pas moins que le contenu de ce document d'entente n'a jamais été rendu officiel. Toutefois, des sources de « Confidentiel Afrique » à Bangui et à Paris ont révélé en exclusivité les points saillants du nouveau plan de coopération franco-centrafricaine.

Reprise de l'aide budgétaire

Bien qu'ayant réussi à faire adopter une nouvelle Constitution qui lui permettra sans aucun doute de briguer un troisième mandat, Faustin Archange Touadéra fait depuis face aux « caisses vides » de l'Etat. Ses partenaires russes et rwandais, qui le soutiennent sur le plan sécuritaire, en plus de ne pas lui offrir le graal dont il a besoin pour faire « survivre son régime », l'entretien des « anges gardiens » pèse en effet énormément sur le budget centrafricain, soit plus de 4 milliards de francs CFA, selon des sources indiscrètes auprès du Trésor public.

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Conscient de la fragilité économique de son partenaire, le régime Macron a donc annoncé la reprise de son aide budgétaire, qui, d'après de sources à la présidence centrafricaine, pourrait intervenir avant la fin de cette année. En rappel, l'aide budgétaire française à la Centrafrique qui pèse environ 10 millions d'Euros, avait été gelée en 2021, après que Paris ait indiqué être « victime de campagne délibérée de diffamation et de sentiments antifrançais » dans le contexte « d'une guerre hégémonique » menée par Moscou via le défunt groupe Wagner.

« Soutien à la tenue des élections locales »

Si les élections locales ont été reportées à plus de quatre reprises en Centrafrique pour manque de financement, le nouveau cadre de coopération entre Paris et Bangui prévoit un financement de 2 millions d'Euros. L'annonce faite précédemment par les autorités centrafricaines a été confirmée samedi dernier par le Porte-parole de l'Autorité Nationale des Elections, M. Théophile Momokoama dans un débat politique sur une chaine nationale. En cas d'encaissement de ce précieux graal, la Centrafrique pourrait organiser les élections locales en Avril 2025 alors que celles-ci n'avaient pas été organisées dans le pays depuis plus de 38 ans.

« Aide humanitaire et appui aux projets de développement »

Au-delà de l'aide budgétaire et du soutien à l'organisation des élections, Paris prévoit aussi appuyer les projets de développement qui touchent notamment aux domaines tels que les infrastructures, la santé, l'éducation, le sport, la formation professionnelle, la société civile ainsi que la jeunesse. Selon une source diplomatique française, ces projets seront aussi bien mis en oeuvre par l'Agence Française de Développement (AFD) que par des départements sectoriels en Centrafrique.

Qu'attend Macron de sa stratégie savamment ourdie ?

Depuis les négociations ayant conduit à l'adoption de cette feuille de route, l'on assiste à la baisse drastique des manifestations antifrançaises en Centrafrique. D'après une source proche de l'opposition, il ne fait l'ombre d'aucun doute que cela fait partie des recommandations fermes du coté centrafricain.

Ne désespérant pas quant à sa demande consistant le divorce entre Bangui et Wagner, Paris propose, selon des sources à l'ambassade de France à Bangui, le renforcement de la coopération militaire entre le Rwanda et la République centrafricaine, d'autant plus que l'homme fort de Kigali, Paul Kagamé est toujours considéré par Paris comme un allié diplomatique et militaire fidèle et puissant dans les régions du grand Lac et au-delà. Une proposition qui semble ne pas déranger le dirigeant centrafricain qui prend Kagamé pour « modèle de gouvernance ».

En outre, comme l'explique un observateur de la vie politique en RCA, Macron compte jouer sur la double posture de Touadéra (président en exercice de la CEMAC et épicentre de l'influence russe en Afrique francophone) afin de « redéfinir le nouveau de cadre de coopération entre Paris et ses anciennes colonies ». Y parviendra-t-il ? Seulement, à Bangui, la stratégie diplomatique « macronienne » semble plutôt bien marcher.

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