Madagascar: Pavel Durov, c'est combien de divisions ? (Partie II)

De novembre 2021 à décembre 2022, Elon Musk avait perdu 165 milliards de dollars (Guinness World Records) mais sa fortune personnelle valait encore 178 milliards de dollars. Entre-temps, en octobre 2022, il avait acquis Twitter pour 44 milliards de dollars. À lui seul, c'est une «force quasi-gouvernementale» (cf. Noam Cohen, «The Know-It-Alls : The Rise of Silicon Valley as a Political Powerhouse and Social Wrecking Ball»).

Les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ont vu le jour dans cette Silicon Valley devenue mythique. Serait-il possible que le «libertarian mindset», qu'on suppose aux fondateurs des GAFAM, soit partagé par le russe Telegram et le chinois TikTok ?

C'est en Europe, «vieux continent» spectaculairement absent de l'enjeu actuel, que la doctrine libertaire est née au 19ème siècle, s'il ne fallait citer que le philosophe allemand Max Stirner (1806-1856) et son ouvrage «L'Unique et sa propriété», paru en 1844. Paradoxalement, les héritiers de l'individualisme extrême offrent une plate-forme pour «jouer collectif», l'essentiel semblant que «le jeu» soit en marge d'une autorité étatique, par-dessus une institution officielle (car publique), et outre une légalité extérieure à chaque individu.

Pavel Durov, qui vante pour «Telegram» le triptyque ultime «indépenance-secret-liberté», passe pour une «icon among free speech advocates» (The Guardian). Que lui reproche la justice française ? Un manque de modération ou une absence de censure. Les récentes émeutes anti-immigrés en Grande-Bretagne auraient été orchestrées via «Telegram», qui passe pour être la plateforme préférée des antivax et des complotistes. De là à conclure que s'y sont réfugiées les personnalités d'extrême-droite chassées de Facebook et de Twitter, en 2019...

Alors, les médias sociaux, un média à part entière ? Ce qui nous ramènerait à la conclusion du Rapporteur du projet de loi de 1881 sur les journaux, en France : «La presse est libre, elle est désormais responsable». En «self-avowed libertarian» (The Guardian), «libertarien revendiqué» (Le Monde), adossé à une fortune colossale, les Elon Musk ou les Pavel Durov challengent les États, voire les unions d'États, dans un «rapport de force entre puissance publique et patron de réseaux sociaux».

«Citoyen du monde qui vit merveilleusement bien sans mère patrie» disait de Pavel Durov l'ancien président russe Dimitri Medvedev. Après avoir dû céder son premier «bébé», VKontake, créé en 2006, réseau social russophone passé devant Facebook en Russie et dans les anciens pays du bloc soviétique, Pavel Durov crée «Telegram» en 2013 et choisit l'exil. Si sa société est basée aux Emiratis, il acquiert discrètement et rapidement la nationalité française en août 2021, «after a low-profile procedure about which Paris remains highly discreet» (The Guardian).

Alors, «too big to fail» ? De cette conclusion, lucide mais résignée, que les entreprises trop importantes au sein du macrocosme, trop cruciales pour la garantie de l'équilibre socio-économico-politique, avec tellement d'interconnexions avec le système financier, obligent les gouvernements à intervenir pour leur sauvetage. Et quand bien même, au coeur du débat, la concentration extrême des richesses qui pourrait affaiblir les démocraties qui pourtant volent à leur secours.

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