Mali: Médiation pour la libération de politiques - Quelles chances de succès ?

Arrêtés le 20 juin dernier à Bamako, onze cadres politiques de l'opposition sont sous le coup d'une procédure judiciaire qui a connu quelques avancées, ces derniers temp et ce, après plusieurs semaines d'attente.

Ils sont poursuivis pour « opposition à l'exercice de l'autorité légitime », pour avoir tenu une « réunion clandestine » en violation de la mesure de suspension des activités des partis politiques et associations, prise par les autorités de la transition. Une interdiction levée quelques trois mois plus tard, en juillet dernier. Parmi les personnalités arrêtées, figurent plusieurs anciens ministres et leaders de partis politiques, dont Mohamed Ali Bathily du M5 Mali Kura, Yaya Sangaré de l'ADEMA et son camarade de parti, Moustapha Dicko au domicile de qui se tenait ladite réunion.

D'autres figures importantes issues des partis des anciens présidents Ibrahim Boubacar Kéita et Amadou Toumani Touré, font également partie des détenus. A en croire plusieurs sources, cette réunion visait à mettre en place un règlement intérieur de leur plateforme dite « de la déclaration commune du 31 mars », qui regroupe la quasi-totalité des partis et organisations politiques opposées à la prolongation de la transition au-delà du 26 mars dernier, et un plan d'action pour le retour à l'ordre constitutionnel.

Dans ce contexte de lutte contre le terrorisme, les Maliens ont besoin de se réconcilier avec eux-mêmes pour mieux faire face à l'ennemi

Toujours est-il que les détenus ont été auditionnés par le juge d'instruction en charge du dossier, qui a pu recueillir leur version des faits. Ce qui constitue déjà un pas, dans l'attente de leur procès. Et parallèlement à la procédure judiciaire qui a vu les avocats de la défense introduire des demandes de mise en liberté sous contrôle judiciaire devant le juge, des médiations ont été initiées en vue de faciliter l'élargissement des détenus en attendant le procès, à défaut d'obtenir l'abandon des poursuites. Dans ce cadre, des rencontres ont été organisées avec le Haut conseil islamique du Mali qui joue les facilitateurs dans cette affaire.

Mais aussi avec le ministre de l'Administration territoriale, le colonel Abdoulaye Maïga, qui est une figure de proue du gouvernement, et dont le département est en charge des relations avec les partis politiques. La question qui se pose est la suivante : quelles chances de succès d'une telle démarche ? Cela est d'autant plus important que les couteaux semblent tirés entre les autorités de la transition accusées de velléités de s'éterniser au pouvoir sur fond de musellement des voix discordantes, et les partis politiques qui commencent à marquer leur impatience d'un retour à l'ordre constitutionnel dans les meilleurs délais.

Mais dans ce contexte de lutte contre le terrorisme où le pays est amené à compter sur ses propres forces après le départ des forces internationales, les Maliens ont besoin de se réconcilier avec eux-mêmes pour mieux faire face à l'ennemi. Et, un éventuel élargissement de ces personnalités de l'opposition, pourrait contribuer à une décrispation politique et favoriser le dialogue en vue d'un retour à l'ordre constitutionnel dans un cadre concerté.

Il appartient aux différents acteurs de mettre de l'eau dans leur... thé

Car, tôt ou tard, les Maliens auront besoin de se parler pour mieux envisager ensemble l'avenir de leur pays. Et plus tôt ils le feront, mieux cela vaudra. Car, ils ont plus à gagner dans la concertation et la bonne intelligence qu'à rester dans cette perpétuelle guéguerre qui ne profite qu'à l'ennemi. En tous les cas, les défis de l'heure interpellent tous les Maliens épris de paix, de liberté et de justice, qui souffrent dans leur chair, la prise en otage de leur pays par des hordes de bandits sans foi ni loi qui leur ont imposé une guerre injuste qui dure depuis plus d'une décennie.

C'est un défi existentiel qui ne saurait être relevé sans une union sacrée dans laquelle tous les acteurs doivent jouer franc-jeu. C'est dire s'il appartient aux différents acteurs de mettre de l'eau dans leur... thé et de savoir se donner la main en ayant en tête l'intérêt supérieur du Mali. Car, les hommes passent, mais la Nation demeure.

Et autant il s'agit, pour l'opposition, de ne pas constituer un frein à la marche de la transition, autant, pour les autorités intérimaires du Mali, il importe de ne pas donner l'impression de faire dans l'arbitraire et dans la répression aveugle, pour faire mentir tous ceux de leurs détracteurs qui les accusent d'être dans une logique de confiscation du pouvoir. Il y va de l'avenir de la démocratie au Mali. En tout état de cause, maintenant que les initiatives sont lancées, on attend de voir la réaction des autorités judiciaires et politiques maliennes et ce à quoi aboutiront les médiations en cours.

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