Ghana: Jeux paralympiques - Le Ghanéen Frederick Assor, un ambassadeur du cyclisme africain à Paris

Frederick Assor dispute ses deuxièmes Jeux paralympiques en cyclisme sur piste, après ceux de Tokyo. Le Ghanéen de 39 ans et son pilote Rudolf Mensah n'ont certes pas brillé ce jeudi 29 août, avec le moins bon chrono en poursuite individuelle sur 4 000 mètres. Mais le coureur, devenu aveugle à l'âge de 14 ans, n'en savoure pas moins sa présence à Paris et son statut d'unique ambassadeur africain de la discipline.

« J'ai fait quel chrono ? 6 minutes 30 ? Et les Australiens ? Je pense que j'ai déjà fait bien mieux que ça ! » Frederick Assor, Ghanéen de 39 ans, est encore haletant, alors qu'il descend tout juste de la piste du Vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yvelines, théâtre des compétitions de cyclisme des Jeux de Paris 2024.

Cet athlète aveugle et son pilote sont certes éliminés dès le premier tour, avec le plus mauvais temps des épreuves de poursuite sur 4 000 mètres, ce jeudi. Mais celui qui n'avait pris part qu'à des Jeux paralympiques à huis-clos à Tokyo, Covid-19 oblige, a savouré chaque seconde de son expérience française, avec les cris du public cette fois. « C'est très, très fort, très encourageant, lance-t-il. À Tokyo, c'étaient mes premiers Jeux paralympiques. Et là, j'ai l'impression d'avoir droit à une seconde chance ». Fier, il souligne : « J'ai été la seule personne à concourir pour l'Afrique et le Ghana [en cyclisme sur piste à Tokyo, NDLR], le seul Africain parmi tous les pays du continent. Et là, je suis encore la seule personne à avoir concouru pour l'Afrique et le Ghana. Ainsi, le monde a vu ma performance et celle de mon pays. »

« Ce sport vous libère de vous-même »

Un Ghanéen sur un vélo, ce n'était pourtant pas évident. Alors qu'il y a en effet une vraie tradition de cyclisme (sur route) dans des pays voisins comme le Burkina Faso ou la Côte d'Ivoire, le Ghana ne jure que par le football, voire la boxe, l'athlétisme et le hockey sur gazon. « J'ai découvert cette discipline grâce aux efforts du Secrétaire général de la Fédération ghanéenne, Shaaban Mohammed », explique Frederick Assor.

Avant cela, celui qui a perdu la vue à l'âge de 14 ans, s'était surtout adonné à des sports plus classiques comme le foot, en bon Black Star. Mais lorsqu'il a grimpé sur une selle pour la première fois, en 2009, ce fut la révélation.

« Cela vous donne plus de confiance, plus de force et vous libère de vous-même, confie-t-il. Parce qu'en tant qu'aveugle, vous ne pouvez pas voir ce qu'il se passe. Mais vous vous rendez compte que vous roulez sur quelque chose qui monte, monte, monte, monte (le long de la piste). Et, sans vous en rendre compte, vous pouvez monter jusqu'au sommet. On ne voit pas. Mais on a l'impression de monter et que tout est glissant. Accidentellement, on peut tomber et avoir de la malchance. Mais cela a justement renforcé ma confiance ».

« Nous n'avons pas de vélodrome »

Il faut aussi une bonne dose confiance envers son partenaire, puisque les coureurs aveugles sont guidés par un pilote valide à l'avant. Rudolf Mensah, celui d'Assor depuis 2017, évoque avec tendresse cette relation très spéciale. « Frederick est mon meilleur ami et j'étais heureux de rouler avec lui aujourd'hui, lance-t-il en serrant affectueusement le bras du paralympien. Nous nous connaissons parfaitement. Quoi que je lui dise, même si je lui fais juste un signe, il comprend ce que je veux dire ». L'intéressé confirme : « On vit dans des villes différentes. Mais quand il faut préparer des compétitions comme celle-ci, je vais rester avec Rudolf pendant des mois, pour qu'on s'entraîne. Ou alors, on va dans un autre endroit et puis on y reste pendant des mois pour s'entraîner ensemble et pour mieux se comprendre. »

Les Ghanéens peuvent ainsi croiser le duo sur les routes sinueuses du pays, les vélodromes étant inexistants dans la sous-région, hormis au Nigeria. « Comme je le dis toujours, en Afrique, nous avons des manques par rapport au reste du monde : les équipements, la formation, les installations pour la formation, les types d'entraînement, soupire Frederick Assor. Dans les autres pays, ils ont tout ça et le temps de s'entraîner. Mais chez nous, nous n'avons pas de telles choses. Même un vélodrome. Il faut qu'on vienne aux compétitions avant de pouvoir voir un vélodrome et de pouvoir s'y entraîner ».

Les deux Ghanéens repartiront pour des tours de pistes le 1er septembre, durant le contre-la-montre sur 1 000 mètres de ces Jeux parisiens. La suite, Frederick Assor la voit en 2026 avec les prochains Jeux du Commonwealth, puis en 2028 avec ceux paralympiques de Los Angeles. « Sur la route ou sur la piste », conclut-il. Mais toujours sur un vélo.

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