" L'habit ne fait pas le moine, mais on reconnaît le moine à son habit ", ont ainsi été condensés en une seule maxime le rôle et la valeur sociale accordés au vêtement. Que dit le vêtement de la personne qui le porte, des personnes qui le regardent et enfin que dit-il de la société ?
D'un rôle primitif strictement utile qui consistait à se protéger du froid, à établir une barrière physique entre l'environnement, ses peuples microscopiques et le corps, et à couvrir sa pudeur, le vêtement a, au fil des siècles et des mouvements sociaux, des organisations sociales, pris une valeur esthétique et/ou identitaire.
Le vêtement envoie un message, il affiche une appartenance à un groupe donné. Les corps armés ont conçu, au meilleur de cette illustration, des vêtements de terrain, l'emblématique treillis, ou des vêtements d'office et de cérémonie qui tous, selon les grades qu'ils affichent aux épaulettes renseignent sur le rang de la personne en face et au respect, au protocole qui lui sont dus, quel que soit son âge, son genre ou autre caractéristique identitaire non-militaire.
La vie civile a elle aussi, de son côté, apparemment été inspirée par la même muse et a adopté ces codes de hiérarchisation sociale sur la base du vêtement. Le vêtement, sans doute parce qu'il est, au rang et au compte de l'apparence physique, la première chose que l'on voit d'une personne avant d'interagir avec elle, le premier message que l'on reçoit d'elle, de sa présence.
Ainsi, les personnes bien habillées sont naturellement perçues comme attractives, fiables, et capables de prendre soin des autres puisqu'elles prennent visiblement soin d'elles-mêmes.
Cette perception sociale prête pourtant le flanc à un immense biais cognitif, collectif et individuel. En effet, d'observer comment les gens sont plus sensibles à l'apparence qu'à l'essence, que le respect et les privilèges sont préférentiellement accordés à ceux qui s'habillent bien, accordent un soin particulier à leur image, la plupart des gens et certains profils déviants en particulier, vont détourner le rôle de marque sociale du vêtement vers celui de masque social.
Dans un mimétisme pervers et artificiel et sans qu'elles n'en aient forcément les moyens, certaines personnes vont prioriser l'image coûte que coûte, au point de contracter des dettes, de vivre dans des pires conditions, pourvu qu'elles aient leur peau de luxe, une image factice pour impressionner leurs vis-à-vis et dans le pire des scenarii les tromper, les escroquer.
Il va de soi qu'il est humainement plus facile de confier son argent à quelqu'un qui est bien habillé, en costume-cravate, qu'à une personne à l'apparence négligée. Ce n'est peut-être pas pour rien que les banquiers sont à leurs heures de service toujours tirés à quatre épingles. C'est de l'ordre de la psychologie humaine, c'est une perception de fiabilité, donc de confiance acquise de façon subliminale.
Pourtant, le vêtement, en tant que faire-valoir social, est peut-être aussi une simple perception culturelle. Bien que certaines positions sociales, certaines professions et certains milieux sociaux exigent un standard vestimentaire, l'élégance et la coquetterie restent de l'ordre de dispositions individuelles.
Si l'on se fie à ces grandes figures qui ont favorablement marqué l'histoire de l'humanité, tout domaine confondu, on se trouve un peu perplexe de réaliser qu'elles sont souvent et foncièrement détachées du carcan de l'image. À porter les lunettes, on se rendrait peut-être compte que l'essence de l'humain est ailleurs.