Congo-Kinshasa: Bruxelles - Une exposition consacrée aux « Résistants d'origine congolaise dans la Résistance belge 1940-1945 »

Prévue du 29 août au 8 septembre, l'exposition initiée par l'association Bakushinta est organisée à l'occasion du 80e anniversaire de la libération de Bruxelles.

L'exposition, dont le vernissage a eu lieu le 29 août à l'« Espace 16 arts », met en lumière les parcours individuels de résistants congolais et métis pendant la Seconde Guerre mondiale. En effet, expliquent les organisateurs, la participation de personnes d'origine congolaise à la Résistance contre l'occupant nazi sur le sol belge durant cette guerre est une réalité largement ignorée.

Ainsi, dans le cadre du programme « À nous l'Histoire : restaurer les mémoires», l'exposition dévoile de nombreux parcours individuels de résistants congolais et métis, ou combattants volontaires. Cette redécouverte, indique-t-on, s'insère dans le cadre plus large de la question de la participation des Congolais et du Congo à la victoire alliée, dont les actes sont restés coincés dans l'angle mort de l'histoire.

Le « Refuge 24 », mouvement clandestin de l' « Armée secrète »

Parmi les personnalités emblématiques congolaises mises en avant au cours de cette exposition figurent les membres du « Refuge 24 », recrutés en 1941 par Fernand Claes pour intégrer le mouvement clandestin de la Légion belge (la future « Armée sécrète »). Parmi les 1300 personnes recrutées, 54 étaient des Congolais installés à Bruxelles, notamment dans les communes de Schaerbeek, Bruxelles-ville, Anderlecht, Saint-Gilles et Ixelles. Âgés de 20 à 60 ans, ils étaient manoeuvres, mécaniciens, cuisiniers, colporteurs, ouvriers fondeurs, huissiers, employés de la loterie coloniale ou même coiffeurs.

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Certains travaillaient pour les services techniques de l'armée belge comme Louis Budiema ou pour la Société nationale des chemins de fer belges. Quelques-uns étaient mariés à des Belges et pères de famille, comme François Kamansa. Parmi les plus âgés, au moins 6 étaient des anciens soldats de la Force publique ou des volontaires de la Première Guerre mondiale : Léon de Cassa, Michel Longo, Joseph Honi, Isidore Tebabi, André Yoka et Antoine Yoka.

François Kamanda, une reconnaissance oubliée

Parmi les Congolais du « Refuge 24 », plusieurs n'ont pas demandé de reconnaissance comme résistants après-guerre soit parce qu'il ne sont pas au courant de la procédure, soit parce qu'ils ne sont pas en mesure de remplir le dossier dans le temps imparti. C'est le cas de François Kamanda. Né à Kabinda, en République démocratique du Congo, vers 1906, ce dernier est arrivé par bateau à Anvers (Belgique) en 1930, en tant que boy d'un fonctionnaire du Congo belge, Henri De Raeck. Par la suite, il trouve un emploi chez Hippolyte Limbourg, à Uccle (Bruxelles), puis auprès de l'avocat Robert Logelain, avec qui il maintient des relations.

Dès 1936, François Kamanda devient garçon-coiffeur et puis, en 1941, propriétaire d'un salon de coiffure à Etterbeek (Bruxelles).Il est le premier coiffeur congolais de Belgique. A l'époque, les salons de coiffure sont des lieux sûrs pour la transmission d'informations et de contacts pour la Résistance car ce sont des lieux de rencontres et de sociabilité.

Le patron de François Kamanda, Robert Logelain, a alors déjà rejoint la Résistance. En 1940, il est l'un des deux fondateurs du journal clandestin « La Libre Belgique », qui est aujourd'hui l'un des plus grands journaux de Belgique.

François Kamanda fait partie de l'Union congolaise, cofondée en 1919 par Paul Panda Farnana, le premier Congolais à avoir étudié en Belgique et en France.

En 1944, son président Honoré Mongay, son secrétaire général Michel Longo, et son trésorier Antoine Yoka sont tous les trois résistants au « Refuge 24 » de l'armée secrète, tout comme ses deux amis, Isidore Bataboudila et Isidore Tebabi.

D'autres membres du « Refuge 24 »

Isidore Tebabi est né en 1897 à Mondongwalé, dans l'ex Congo belge. Ancien soldat de la Force publique, il a participé à la Première Guerre mondiale et a parcouru de milliers de kilomètres pour rejoindre le front à l'Est du Congo.

Installé à Bruxelles, il épouse une femme belge avec qui il a fils en 1940. Il exerce la profession d'employé de bureau lorsqu'il est contacté pour rejoindre le groupe du « Refuge 24 ». Son activité de résistant armé est reconnue dès 1948.

Antoine Yoka

Pour sa part, Antoine Yoka est né en 1892 à Equateurville (Aujourd'hui Mbandaka). Il a rejoint l'armée belge en 1914. Engagé chez les 2es carabiniers, il participe aux combats d'Anvers puis à la bataille de l'Yser. Par la suite, il est fait chevalier de l'Ordre de Léopold et reçoit la Croix de guerre ainsi que la Croix de l'Yser. En 1940, il s'installe à Bruxelles avec son épouse Hélène et exerce la profession de bobineur (Placer des bobines dans des appareils électriques, NDLR). Il a également rejoint le groupe du « Refuge 24 » dès 1941. La qualité de résistant armé lui est reconnue en 1948.

Isidore Bataboudila

Isidore Bataboudila est né en 1905 à Tumba (Ex Congo belge). Installé en Belgiquen, il épouse une femme blanche suisse alémanique. Infirmier à l'hôpital Sainte-Elisabeth d'Uccle et membre de l'Union congolaise, il est également bénévole pour le secours d'hiver; une organisation caritative créée avec l'autorisation de l'occupant. En 1941, il est recruté par Honoré Mongay pour intégrer le « Refuge 24 ». Isidore Bataboudila y assure des missions de liaison et héberge, pendant neuf mois, deux personnes juives persécutées. Lors de son enterrement, l'une de ces personnes est présente et lui rend hommage. Son action durant la guerre est reconnue au titre de la résistance armée.

Honoré Mongay

Huissier de justice, Honoré Mongay est né en 1903 à Likata (Congo belge). Célibataire, il intègre le premier bataillon de la deuxième compagnie des services généraux de la future « Armée secrète », en décembre 1901, et en devient sergent. Chef de section, il assure le recrutement et l'ensemble des liaisons entre le commandement et ses hommes. Il assume les fonctions de police militaire à la libération et reçoit le statut de résistant armé en 1948, avant de retourner s'installer à Léopoldville, dans les années 1960.

Louis Caro Ikale

Louis Caro Ikale est né en 1908 à Boma. Représentant de commerce et célibataire, il est recruté par Fernand Claes en 1941 pour effectuer des patrouilles et toutes autres missions requises par ses chefs. Il reste à la disposition de ceux-ci durant toute l'occupation et devient responsable de section. A la libération, il assure des fonctions de police militaire et de maintien de l'ordre jusqu'au 15 octobre 1944. En 1948, il reçoit le statut de résistant armé.

Paul Molina

Un autre membre de ce groupe, Paul Molina, est né en 1908 à Mokulu, dans l'ex Congo belge. Arrêté par la police allemande le 12 août 1943, pour espionnage au profit des alliés, il est emmené en Allemagne, où il est incarcéré à la prison de Kassel, puis jugé par le Conseil de guerre. Transféré en Belgique à la prison de Saint-Gilles, il est régulièrement battu. En mars 1944, il est hospitalisé à l'hôpital Saint-Pierre et décède le 21 janvier 1945 des suites des sévices subis (Malnutrition et mauvais traitements). Sa participation à la résistance est reconnue à titre posthume. Son fils, Paul Molina, né en 1936, reçoit une aide ponctuelle en tant que fils de résistant armé.

Etienne Mavakala

Pour sa part, Etienne Mavakala est né en 1907 à Kimanda, dans l'ex Congo belge. En 1941, il est mécanicien et a épousé une Belge, Elise Rieters. Il est recruté pour le « Refuge 24 », où il assure des missions de liaison. En 1948, il reçoit une reconnaissance comme résistant armé au sein de l'armée secrète.

Michel Longo

Michel Longo, quant à lui, est né en 1895, à Séké-Banza. Il participe aux combats de 1914 sur le sol belge comme volontaire dans le 17e régiment d'artillerie. Plusieurs fois décoré, il devient voyageur de commerce et épouse une femme belge. Comme d'autres compatriotes, il est contacté par Fernand Claes en 1941 pour se mettre au service de la lutte contre les Nazis.

Malade au moment de la libération de Bruxelles en septembre 1944, il ne peut répondre à l'ordre de mobilisation de sa compagnie. Sa demande de reconnaissance en tant que résistant armé est alors refusée.

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