Madagascar: Falihery Razafindrakoto - « Les organisations de personnes handicapées ont un rôle clé à jouer dans la mise en oeuvre de ce nouveau code. »

interview

Le nouveau Code du travail malgache, récemment validé par la Haute Cour Constitutionnelle via la Décision n°11-HCC/D3, marque une étape importante dans la prise en compte des droits des personnes handicapées. Parmi ses 395 articles, 12 sont spécifiquement dédiés aux questions de handicap. Falihery Razafindrakoto, président du Réseau Malgache du Handicap, a accepté de nous livrer ses premières impressions sur les réformes et leur impact réel.

Dans ce nouveau code du travail, quelles sont les dispositions qui vous semblent les plus encourageantes pour la promotion des droits des personnes handicapées ?

Parmi les avancées les plus notables, je citerai tout d'abord la définition élargie de la discrimination, qui inclut désormais le handicap. C'est un progrès qui devrait nous permettre de mieux lutter contre les discriminations à l'embauche et dans le milieu professionnel. De plus, les mesures d'adaptation des postes de travail et les incitations pour les entreprises qui embauchent des personnes handicapées sont des signaux positifs qui témoignent d'une volonté politique de favoriser l'inclusion. L'introduction de quotas d'embauche pour les personnes handicapées est également un mécanisme important qui peut avoir un impact significatif sur l'emploi des personnes handicapées.

Vous parlez souvent de la conception du handicap dans vos publications. Que promeut le code à cet égard ?

L'Article 152 du Code du travail définit les personnes en situation de handicap comme celles dont les perspectives d'emploi sont réduites en raison d'un handicap physique, mental ou sensoriel. Cette définition reste relativement restrictive et ne prend pas en compte toute la diversité des situations de handicap. Elle ne couvre pas explicitement le handicap psychosocial, laissant de côté des individus qui pourraient nécessiter des adaptations spécifiques pour leur intégration professionnelle. De plus, le terme « handicap mental » utilisé peut prêter à confusion en amalgamant déficiences intellectuelles et troubles mentaux. Ce qui pourrait entraîner une interprétation restrictive et une application inégale des mesures d'inclusion. Le code se concentre davantage sur les handicaps physiques et sensoriels, négligeant parfois les besoins spécifiques liés aux handicaps invisibles ou cognitifs.

Vous avez parlé d'adaptation de travail. Pourriez-vous nous en donner quelques exemples concrets ?

Les aménagements raisonnables sont essentiels pour permettre aux personnes handicapées de travailler dans des conditions optimales. Cela peut aller d'aménagements simples, comme l'installation d'une rampe d'accès, à des adaptations plus complexes, comme la fourniture d'un ordinateur adapté ou d'un logiciel de reconnaissance vocale. Pour les personnes malentendantes, par exemple, des systèmes d'amplification sonore ou des dispositifs de sous-titrage pour les réunions peuvent être mis en place. Pour les personnes ayant un handicap visuel, l'adaptation des documents en braille ou l'utilisation de logiciels de lecture d'écran sont des mesures nécessaires. De plus, pour les personnes ayant des déficiences intellectuelles, il est important de simplifier la communication et d'adapter les supports de formation.

Pourriez-vous donner quelques types d'incitations qui pourraient être mises en place pour encourager davantage les entreprises à s'engager dans cette démarche ?

Les incitations fiscales constituent un levier pour encourager les entreprises à embaucher des personnes handicapées. Des réductions d'impôts pourraient être accordées aux entreprises qui atteignent un certain quota d'emploi de personnes handicapées. En outre, des exonérations de charges sociales pourraient être envisagées pour les salaires versés aux travailleurs handicapés. Ces mesures financières permettraient non seulement de compenser les éventuels coûts supplémentaires liés à l'adaptation des postes de travail, mais aussi de valoriser l'engagement des entreprises en faveur de l'inclusion. Il est important de mettre en place des dispositifs de financement pour accompagner les entreprises dans leurs projets d'aménagement. Enfin, la reconnaissance publique, sous forme de certifications, pourrait aussi encourager les entreprises à adopter des pratiques inclusives, en valorisant leur image auprès du grand public et de leurs partenaires commerciaux.

Quels sont les défis à relever pour que ces mesures soient réellement effectives sur le terrain ?

La sortie des différents textes d'application est vivement attendue pour être plus précis dans les mesures à mettre en place. Ces textes sont essentiels pour clarifier les modalités d'exécution des dispositions du code. Et leur publication permettra aux employeurs, aux employés, et aux organisations de personnes handicapées (OPH) de mieux comprendre et appliquer ces nouvelles règles. Nous attendons également beaucoup de la mise en place d'une institution appropriée par le Ministère chargé du Travail et de l'Emploi. Cette institution jouerait un rôle central dans la coordination des efforts pour rendre le marché du travail plus inclusif.

Pour finir, comment voyez-vous le rôle des organisations de personnes handicapées dans l'application de ce nouveau code ?

Les organisations de personnes handicapées ont un rôle clé à jouer dans la mise en oeuvre de ce nouveau code. Nous devons continuer à sensibiliser l'opinion publique, à former nos membres à leurs droits et à accompagner les personnes handicapées dans leurs démarches.

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