Le Comité des droits des personnes handicapées (ou Committee on the Rights of Persons with Disabilities, CRPD) des Nations unies a examiné, les 26 et 27 août, le rapport soumis par Maurice concernant la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Un des sujets de préoccupation abordé par le CRPD est la séparation des élèves handicapés des autres écoliers, ce qui contribue à leur marginalisation.
Les experts ont aussi souligné le manque de participation active des personnes handicapées dans les processus d'amélioration de leurs conditions de vie. Il a été recommandé à Maurice de renforcer ses lois contre la discrimination et d'adopter une approche reposant sur les droits de l'homme pour le traitement des personnes handicapées au lieu d'une approche strictement médicale. Le CRPD adoptera ses observations finales sur le rapport de Maurice le 5 septembre.
Le comité s'est attardé sur la séparation des élèves handicapés des autres écoliers, contribuant à leur marginalisation. De plus, plusieurs élèves handicapés abandonnent leurs études faute d'aménagements adéquats dans les établissements scolaires pour répondre à leurs besoins spécifiques. Les experts ont souligné l'importance d'intégrer pleinement les enfants handicapés dans le système éducatif général et de mettre fin à leur institutionnalisation dans des structures non supervisées par l'État, gérées par des organisations non gouvernementales.
Un des points centraux soulevés par les experts concerne aussi l'absence de participation véritable des personnes handicapées, par l'intermédiaire de leurs organisations représentatives, dans les processus visant à améliorer leur vie. Un expert a exprimé sa préoccupation sur le fait que ces personnes semblent rester invisibles à Maurice, malgré les engagements pris par le gouvernement pour promouvoir une société inclusive.
La ministre de la Sécurité sociale, Fazila Jeewa-Daureeawoo, a assuré lors de son intervention que la Convention relative aux droits des personnes handicapées allait de pair avec la Constitution de Maurice. Elle a précisé que plusieurs articles clés de la Convention, notamment ceux relatifs aux droits à la vie, à la liberté personnelle, à la liberté d'expression et à la protection contre la discrimination, étaient déjà inscrits dans la Constitution mauricienne. Toutefois, le CRPD a recommandé un renforcement des lois contre la discrimination, y compris une révision de la Constitution pour mieux lutter contre la discrimination envers les personnes handicapées.
Le CRPD a également exprimé des inquiétudes concernant la possibilité, toujours existante, d'être admis à l'hôpital contre son gré à Maurice. Une experte a demandé des clarifications sur la façon dont les personnes handicapées et leurs organisations représentatives participaient au contrôle du système de santé mentale.
La ministre a été priée de fournir des détails sur les mécanismes mis en place pour garantir que les admissions forcées ne se produisent pas, en particulier pour les personnes handicapées. Le comité a en outre évoqué la nécessité de réformer la Mental Health Act de 2019 pour mieux protéger les droits des personnes handicapées.
Le comité a aussi mis en avant la protection insuffisante des données personnelles des personnes handicapées. Les experts ont demandé des précisions sur les mesures prises par le gouvernement mauricien pour protéger ces informations sensibles et garantir leur confidentialité. Par ailleurs, l'accès des personnes handicapées aux informations publiques reste limité. Le CRPD a recommandé de généraliser l'utilisation de la langue des signes et d'améliorer l'accessibilité des services publics.
Les experts ont également mis en lumière les besoins spécifiques des femmes handicapées, notamment leur participation aux prises de décision et leur accès au marché de l'emploi. Ils ont exprimé des préoccupations quant à l'inadéquation des abris pour les femmes victimes de violence domestique, qui ne sont pas équipés pour recevoir des femmes handicapées. Les subventions pour l'acquisition de dispositifs techniques, comme les fauteuils roulants, sont souvent limitées aux personnes de moins de 60 ans, excluant ainsi une partie de la population handicapée. Le comité a appelé à une révision de ces critères pour mieux répondre aux besoins de toutes les personnes handicapées.
Harmonisation des définitions
L'harmonisation des définitions du handicap dans les textes de loi mauriciens a également été recommandée. Le CRPD a souligné l'importance d'une approche uniforme pour évaluer le handicap, notamment pour l'attribution de subventions. Il a également demandé la raison pour laquelle Maurice maintenait des réserves sur les articles 9 et 24 de la Convention, qui concernent respectivement l'accessibilité et l'éducation inclusive. Le comité a soulevé des questions sur l'existence de mécanismes de recours pour les personnes handicapées qui s'estiment victimes de discrimination.
Le comité a par ailleurs estimé que des exceptions à la loi permettaient à certains employeurs de ne pas respecter les prescriptions en matière de recrutement d'employés handicapés. Un expert a demandé si le refus de procéder à des aménagements raisonnables au travail était parfois autorisé. Une autre experte membre du CRPD s'est enquise sur le nombre de personnes handicapées bénéficiant de prestations à Maurice et ce qu'il en était de la situation de nombreux enfants handicapés qui vivent dans les rues.
La délégation mauricienne a souligné l'importance accordée par le gouvernement à la participation des personnes handicapées dans les processus décisionnels, notamment en ce qui concerne les lois les touchant directement. Elle a mis en avant la nouvelle loi sur la protection des personnes handicapées, élaborée avec la contribution active des personnes concernées, comme un jalon crucial vers une société plus équitable.
Le gouvernement prévoit également d'organiser un atelier pour recueillir des suggestions en vue de l'élaboration du plan stratégique 2025-2030. En outre, Maurice s'efforce d'adapter ses lois et normes d'accessibilité pour lever ses réserves sur les articles 9 et 24 de la Convention, mais demande davantage de temps pour y parvenir.