Onze condamnés à mort ont été exécutés aux États-Unis, depuis janvier 2024. Vingt-sept états sur cinquante y maintiennent la peine capitale dans leur arsenal répressif. Comme l'Inde, le Japon, l'Indonésie. La Chine, la Russie, Taïwan, Singapour. Aux États-Unis, pour les exécutions capitales, cinq états autorisent le peloton d'exécution, sept la chambre à gaz, huit la chaise électrique, et la plupart l'injection létale.
En 1945, les Nations Unies sont nées, pour ainsi dire, sur la «liquidation» des criminels de guerre condamnés à mort au procès de Nuremberg. Hitler, eût-il survécu au siège de Berlin, et à la capitulation de l'Allemagne nazie, aurait subi un sort plus atroce que celui de Mussolini, lynché par la foule, et pendu par les pieds piazzale Loreto, à Milan.
Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, nombre de criminels nazis ont été traqués par trois figures devenues emblématiques, l'Autrichien Simon Wiesenthal (rescapé des camps de concentration) et le couple franco-allemand Beate et Serge (fils d'un déporté) Klarsfeld, afin que les abominations de l'Holocauste ne restent pas impunies. Cette vengeance, parce qu'il n'y a pas d'autres mots plus authentiques pour désigner la démarche, leur a attiré, sinon la sympathie, au moins une certaine légitimité.
Adolf Eichman : capturé par le Mossad en Argentine en 1960, sera jugé en Israël et exécuté en 1962 ; Franz Stangl : l'ancien commandant du camp de Treblinka a été arrêté au Brésil en 1967, extradé en Allemagne, il y fut jugé mais «seulement» condamné à la perpétuité, l'Allemagne de l'Ouest ayant, dès 1949, banni la peine de mort ; Klaus Barbie, le «boucher de Lyon», avait été appréhendé en Bolivie pour être extradé en France : l'abolition de la peine de mort en 1981 lui valut quatre ans de prison à vie, de 1987 à 1991.
En Inde, on se souvient de l'émotion suscitée, jusqu'à l'international, par l'affaire du viol collectif, suivi du meurtre de Jyoti Singh, surnommée Nirbhaya, en décembre 2012, dans un bus circulant à Delhi. Cette affaire et d'autres ultérieures (affaire de Kathua en 2018, affaire de l'Hyderabad Vet en 2019, affaire Hathras en 2020) ont graduellement légitimé l'application ultime de la peine de mort pour la protection de la femme en Inde. Aujourd'hui, 3 septembre, le gouvernement indien fait ratifier pour le Bengale la loi dite «Aparajita Woman and Child Bill» qui punira de mort le viol.
À Madagascar, la rubrique des faits divers devient un catalogue des pires atrocités et d'abominations qu'il n'y a plus à hésiter associer avec l'inhumanité absolue de certains individus égarés en notre humanité. Madagascar a emboîté le pas aux pays occidentaux et a aboli la peine de mort en 2015. Ces deux informations ne doivent pas avoir de lien entre elles.
On se fiche que la condamnation à mort d'un monstre suffise ou pas à dissuader d'autres psychopathes de passer à l'acte. La société n'a juste pas à vivre avec la perspective d'un tel «autre» en vie. La pensée même de son droit à la défense, l'invocation de circonstances atténuantes, l'excuse souvent plaidée d'irresponsabilité, après la commission d'un acte de barbarie, est une insulte au bon sens et bafoue notre adhésion aux règles sociales, surtout en leurs principes moraux et éthiques. Il ne faut plus qu'à la douleur et l'humiliation, on refuse le droit à une légitime colère qui attend de l'État l'exercice de son monopole de la violence légitime.