Horreur à Endebess ! Tel pourrait être le titre d'une nouvelle, d'un roman ou d'un feuilleton à l'eau de rose qui a fini tragiquement en 3 épisodes en 4 jours de tournage.
Le synopsis : une belle athlète de 33 ans, Rebecca Cheptegei, victime de crises de jalousie à répétition de la part de son compagnon, Dickson Ndiema Marangach, a été brûlée vive par ce dernier. Hospitalisée durant 3 jours, elle succombera malheureusement à ses graves blessures, laissant 2 orphelines de 9 et 11 ans, et son compagnon jaloux entre les mains des médecins, lui-même brûlé à 30 %, victime de l'incendie criminel qu'il a allumé.
Le film dramatique, sous l'inspiration d'un scénariste ingénieux, pourrait prendre fin avec ce grand suspense : le criminel hospitalisé ignore l'indignation familiale, nationale et mondiale devant son inqualifiable barbarie, sans qu'on sache si les médecins pourraient le sauver de la mort afin qu'il réponde devant les juridictions compétentes.
Hélas, mille fois hélas, l'horreur d'Endebess, qui s'est poursuivie à l'hôpital de référence d'Eldoret, a été vécue pour de vrai dans la région ouest du Kenya, où est morte Rebecca Cheptegei, une athlète ougandaise, spécialiste en course de fond.
Après avoir gagné ou été placée dans plusieurs compétitions majeures dans son pays, en Afrique et dans le monde, elle a rêvé d'une médaille olympique en s'alignant pour le marathon féminin aux derniers jeux de Paris. Bien qu'elle n' y ait été que 44e, le fait d'avoir réalisé les performances minimales pour être qualifiées en dit long sur ses aptitudes pour les courses de fond. C'est bien pour améliorer son potentiel d'athlète qu'elle s'était installée à Endebess, dans l'ouest du Kenya, pour être en contact avec d'autres sportives de haut niveau, des entraîneurs d'expérience et l'environnement favorable des hauts plateaux du Rift, qui ont aidé à faire plus d'un grand champion ou grande championne kényane ou venue d'ailleurs s'y former.
Son jaloux et colérique compagnon, Dickson Ndiema, en a décidé autrement en l'arrosant d'essence le 1er septembre et lui mettant le feu, qui plus est, comble de compulsion maladive, devant ses 2 filles. Brûlée à 80 %, la malheureuse a succombé à ses blessures après avoir "développé une infection bactérienne de septicémie".
Si, d'après leurs voisins et l'enquête de police, Rebecca et Dickson formaient un couple qui avait constamment des disputes familiales, on ignore le dernier casus belli qui a sublimé la colère du meurtrier pour qu'il passe à l'acte irréparable. Quelle que fût la raison de leur dernière dispute de couple qui bat de l'aile, rien, absolument rien, ne peut expliquer cette extrême violence. A moins d'avoir "pété les plombs". Pour quel traumatisme dépressif ou sous l'effet de quelle substance anxiogène ? On ne le sait pas encore.
Ce que l'on sait, c'est que ce film d'horreur n'est malheureusement pas un fait divers isolé au Kenya, en Ouganda et même en Afrique en général. Trop de femmes sont trop souvent victimes de violences sous nos tropiques. Qu'elles soient conjugales, sociétales ou des crimes de réseaux organisés, les filles et femmes de 15 à 49 ans sont les plus affectées par ces violences qui touchent entre 33 à 51% d'entre elles en Afrique subsaharienne, selon des statistiques de l'OMS publiées en 2021.
Rebecca Cheptegei n'est donc pas une victime de plus, c'est un emblématique holocauste, symptomatique de la violence conjugale en Afrique. En Ouganda, son pays d'origine, ce sont environ 33% des couples et 34% au Kenya, son pays de résidence, qui souffrent de disputes familiales fréquentes, accompagnées de violences physiques.
Pour le cas spécifique des athlètes femmes assassinées par leur conjoint, Rebecca Cheptegei est la 3e en 3 ans (2021-2024). On comprend alors la grande clameur d'indignation qui monte de partout : des athlètes et des fédérations d'athlétisme ougandais et kényans au Comité olympique, en passant par la fédération mondiale d'athlétisme, Rebecca est une suppliciée de trop sur l'autel des violences faites aux femmes, particulièrement en Afrique.