Burkina Faso: Identification des NUS cibles du projet Sustlives - « Il fallait choisir parmi 3 familles de cultures, les espèces qui sont négligées et sous-utilisées », Fanta Tietiambou

5 Septembre 2024
interview

Le projet Sustlives s'emploie à mettre en lumière 6 cultures négligées et sous-utilisées (NUS). Découvrez dans cet entretien avec la responsable du suivi des activités liées aux échanges de connaissances et d'informations entre les parties prenantes du projet Sustlives, agroéconomiste, botaniste et phytoécologue, Fanta Tietiambou. Elle explique aussi le processus de sélection de ces cultures et le déroulement de la co-recherche entre les chercheurs et les paysans pour leur vulgarisation.

Dans le cadre du projet Sustlives, comment les cultures négligées et sous-utilisées (NUS), cibles pour la transition vers des systèmes agro-alimentaires durables, ont-elles été identifiées dans le cadre de la mise en oeuvre du projet ?

Tout à commencé par un appel à projet qui avait imposé de travailler sur 3 familles de cultures à savoir les légumineuses, les tubercules et les légumes. Il faillait choisir parmi ces familles de cultures des espèces qui sont encore Négligées et sous-utilisées (NUS). Les espèces négligées sont celles qui n'ont fait l'objet d'assez d'études par la recherche scientifique.

Pour ces espèces, il y a donc encore des domaines qui présentent des lacunes non encore explorées en matière de connaissances scientifiques. Quant aux espèces sous-utilisées, ce sont celles qui n'ont pas été suffisamment valorisées ou qui ne sont pas très bien connues par la population. Pour choisir les différentes espèces, il y a eu d'abord une revue de la littérature, en utilisant les bases de données déjà disponibles à l'université.

Ce qui nous a permis de dresser une première liste de ces espèces potentielles. Puis, l'équipe de coordination du projet, avec le partenaire responsable de l'activité relative à l'identification des NUS cibles (l'alliance Bioversity CIAT) a fait le tour pour recueillir les avis de quelques parties prenantes notamment celles qui travaillent dans le domaine de l'agroécologie.

Enfin, en utilisant la méthodologie développée par l'alliance Bioversity-CIAT, les espèces potentielles ont été classées par ordre et les 6 étant en première position ont été retenues. Il s'agit de la patate douce et le fabirama comme tubercules, l'oseille de Guinée (comme le Bissap), l'amarante et le moringa au niveau des légumes et le voandzou du coté des légumineuses.

La co-recherche et l'innovation des acteurs sur les chaines de valeurs des NUS constituent les piliers pour impulser le changement de comportement dans le cadre de la mise en oeuvre du projet. Comment se traduisent-ils sur le terrain ?

Le projet Sustlives considère les communautés rurales comme étant des parties prenantes bénéficiaires des actions. De ce fait, avant d'initier une recherche, l'équipe recueille d'abord l'avis des communautés. Pour cela, les chercheurs engagés dans le projet étudient à travers une enquête, les perceptions et connaissances paysannes sur le sujet afin de déterminer la stratégie d'intervention la plus efficace qui répond à leurs attentes. Concrètement, nous organisons des sorties sur le terrain auprès de ces bénéficiaires avec les spécialistes de chaque espèce.

Par exemple, docteur Romaric Nanema est le spécialiste du fabirama et du voandzou, docteur Zacharia Kiébré est celui de l'amarante (légumes feuilles en générale). A partir de leurs connaissances techniques, ils donnent des orientations aux paysans sur la base de leurs préférences. En plus, les communautés assistent les chercheurs tout au long de la recherche pour la mise en oeuvre de nouvelles techniques. Par exemple, dans le cadre de la sélection variétale participative, les semis, le repiquage et le suivi régulier ont impliqué les paysans.

Quels sont les résultats qui ont été engrangés depuis le début du projet ?

Par rapport à l'échange d'informations et de connaissances entre les parties prenantes, chaque année, nous organisons 2 réunions réunissant en moyenne une trentaine d'organisations et environ une cinquantaine de participants. Lors de ces réunions, les responsables des activités du projet présentent les activités qu'elles ont réalisées, les résultats concrets obtenus et les prochaines étapes prévues.

Les réunions nous permettent également de planifier les activités que nous allons réaliser avec les parties prenantes. Par exemple, la prise en compte du réseau partie prenante parmi les bénéficiaires pour les formations ou l'attribution de certains modules de formations à certaines structures parties prenantes. Par ailleurs, ces rencontres périodiques nous permettent de recueillir les avis des parties prenantes sur l'implémentation des activités du projet. Egalement, les membres de l'équipe ont participé à des ateliers, colloques et festivals organisées par les parties prenantes.

Dans la mise en oeuvre de ses activités, Sustlives a impliqué plus de 30 organisations différentes en tant que conseillers, formateurs dans leurs domaines de compétences, bénéficiaires de formations pour le renforcement de leurs capacités dans leurs domaines d'intérêts et évaluateurs de certaines activités. Grâce au projet Sustlives, sa démarche collaborative de mise en oeuvre, des connexions bilatérales ont été établies et développées entre les membres du forum. Ainsi, en dehors des activités du projet Sustlives, des collaborations sont en cours.

Quelles sont les difficultés rencontrées ?

Au début, nous avons eu quelques soucis dans la compréhension globale du projet. En effet, le projet compte 16 activités qui sont pilotées par 8 structures partenaires différentes. Nous avons par exemple des structures anglophones, qui, depuis la Finlande, doivent mettre en oeuvre des activités au Burkina Faso. Au regard de la crise sécuritaire et politique, certains partenaires ont eu des difficultés à mener correctement eux-mêmes leurs activités.

Ce qui les oblige à diriger à distance ces activités par personnes interposées. Cela impact dans l'implémentation des activités. Vu la diversité des partenaires qui ont souvent des activités qui doivent s'exécuter au même moment, la mise en oeuvre laisse échapper certaines informations importantes. Une autre difficulté est liée à l'absence d'un secrétariat technique formel.

Quelles propositions pour une amélioration du fonctionnement du projet ?

Un secrétariat technique pourrait être très utile pour faciliter la mise en oeuvre des activités. Également, une meilleure planification des différentes activités serait aussi un atout pour éviter les chevauchements d'activités.

Quelles sont les prochaines étapes ?

Dans le cadre de l'échange de connaissances et d'informations entre les parties prenantes, nous comptons tenir les 2 réunions annuelles qui sont prévues. Dans la mise en oeuvre des autres activités du projet, l'équipe du projet va impliquer les parties prenantes, s'impliquer aussi dans les activités de ces parties prenantes et renforcer la visibilité du projet Sustlives.

Dans le cadre de l'activité de soutien aux startups dirigés par les femmes et les jeunes qui est mise en oeuvre par le CIHEAM-Bari, il reste à renforcer les capacités de 4 entreprises qui viennent d'être retenues à la suite de l'appel à projet sur des thématiques qu'elles ont choisies, puis mettre à leur disposition du matériel et des équipements d'une valeur de 3000 euros.

Concernant l'activité qui porte sur le renforcement des capacités des acteurs de la chaîne de valeur, il reste également des ateliers de formation sur le « Rôle des NUS pour la sécurité alimentaire », « la nutrition et la gastronomie-Action collective et NUS » et sur « Autonomisation des femmes et NUS ». Pour ce qui est de l'activité qui porte sur l'Accès, sélection, multiplication et distribution des semences des NUS, cibles tolérantes au stress, il reste à distribuer aux paysans les semences des 6 NUS produites en grande quantité par les chercheurs en milieu paysan.


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