Les grandes réformes judiciaires promises par le ministre de la Justice Constant Mutamba se font attendre, comme le rappelle la situation à la prison de Makala.
A peine nommé au mois de mai, Constant Mutamba a tout de suite annoncé ses intentions. Sur son compte X, le 30 mai, le ministre de la Justice a précisé qu'il s'emploiera à administrer une thérapie de choc, par des réformes judiciaires courageuses et audacieuses. Il soulignait également que des actions judiciaires fortes seraient initiées contre les auteurs de l'agression militaire rwandaise.
Au mois d'août, lors des assises entre la Cour pénale internationale et la RDC, Constant Mutamba a appelé à l'émission d'un mandat d'arrêt contre le président rwandais pour des crimes commis dans l'est du pays.
Constant Mutamba a longtemps milité au sein de l'opposition en RDC. En 2023, il a été candidat à la présidence de la République sous les couleurs de son parti politique : la Dynamique progressiste révolutionnaire, la Dypro.
Leader du mouvement Dypro et candidat au poste de porte-parole de l'opposition politique, il ne s'est pas toujours fait des alliés dans la classe politique congolaise.
Pas de résultats concrèts
Au sein de la société civile, les avis sont assez contrastés, surtout après le récent carnage qui a eu lieu à la prison centrale de Makalaqui a coûté la vie à plus d'une centaine de personnes.
Le militant de la Lucha, Steward Muhindo, déplore le côté sensationnel des déclarations du ministre de la Justice.
"On l'a vu apporter des matelas, on l'a vu se présenter à Makala pour libérer certains détenus, mais il est triste de constater que toutes ces décisions n'ont pas permis de désengorger Makala", déplore le militant. "Toutes ses sorties médiatiques, toutes ses actions cosmétiques, évidemment que cela offre une visibilité et tout ce qui va avec, mais sur le plan des résultats, on a tous vu que, notamment à l'échelle de la seule ville de Kinshasa, de la seule prison de Makala, il n'y a ni désengorgement, ni amélioration des conditions de détention."
A l'inverse, pour Franck Citende, secrétaire exécutif du Réseau national des ONG des droits de l'Homme en RDC, le ministre de la Justice s'attaque au vaste chantier de l'impunité et mérite d'être soutenu dans ses actions.
"Il est vrai que depuis qu'il est en fonction, comme il s'attaque à un réseau mafieux, des gens qui ont toujours pris ce pays en otage, ces gens lui en veulent, en veulent à son existence, en veulent à sa vie", confie M. Citende à la DW. "Nous soutenons son action pour qu'il y ait un vrai changement dans le pays, pour que la justice, qui est actuellement malade, puisse trouver le meilleur remède.
Mettre fin à l'impunité
En termes de défis, l'un des plus grands chantiers auquel s'attaque le ministre Constant Mutamba est celui des crimes économiques et les détournements d'argent public.
Nick Elebe est juriste, il insiste pour que l'Etat puisse renforcer la sécurité de ceux qui oeuvrent dans ce sens.
"Après des années de capture de l'Etat et d'autres formes de crimes économiques graves, des personnes qui se sont enrichies ne souhaitent pas voir la situation changer. Et quiconque s'engage dans la lutte contre l'impunité de ces crimes aura certainement une cible dans son dos", renseigne le juriste. "L'Etat congolais devrait à tout prix renforcer la sécurité des acteurs judiciaires intègres, de ceux et celles qui s'engagent pour que se termine ce type de crimes en République démocratique du Congo."
Passer de la parole aux actes
Sur son compte X, Constant Mutamba précise que des réformes sont en cours et vont se poursuivre. Il a même annoncé, au mois d'août, que des réseaux mafieux sont démasqués et "craquent déjà".
Des déclarations remises toutefois en question par des voix critiques du gouvernement qui demandent, avant tout, que la parole soit liée aux actes.