Congo-Kinshasa: Procès des métis congolais - Procès couleur café au lait à Bruxelles

Plaignantes du procès des métis congolais

C'est un procès couleur café au lait qui se tient en Belgique depuis 2021. Il oppose cinq métisses nées au Congo entre 1946 et 1950, Monique Bitu Bingi ; Lea Tavares Mujinga ; Simone Vandenbroecke Ngalula ; Noëlle Verbeken et Marie-José Loshi, à l'Etat belge qu'elles accusent d'être civilement responsable de crime contre l'humanité.

Cinq plaignantes parmi les 14 000 à 20 000 enfants issus d'unions entre des colons et des femmes indigènes et arrachés à leurs familles pour être rapatriés en Belgique entre 1959 et 1962. Un drame qui concerne non seulement l'actuel RDC mais également le Rwanda et le Burundi.

Déboutées en première instance par le tribunal civil de Bruxelles, elles ont interjeté appel. Un appel qui s'est tenu les 9 et 10 septembre 2024 dans la capitale belge.

Les requérantes arguent notamment du fait que les rapts d'enfants métis ont été organisés par les officiers de l'Etat belge qui contraignaient les mères à se séparer d'eux avec le concours de l'Eglise quand les avocats de l'Etat invoquent des raisons de sécurité dans la mesure où, prétendent-ils, l'abandon des bambins par leur père européen les mettait en danger. Ces enlèvements forcés entraient donc a priori en droite ligne de la mission civilisatrice que se sont imposés les colonisateurs, notamment assurer une meilleure éducation aux peuples indigènes.

En 2019, le Premier ministre Charles Michel avait certes présenté ses excuses au nom de l'Etat belge pour l'enlèvement forcé des métis du Congo, de Rwanda et de Burundi mais ses excuses n'ont jamais été suivies par l'adoption d'une loi de réparation et la Belgique conteste toujours la qualification de crime contre l'humanité. Mais les plaignantes n'en démordent pas. Plus de 60 ans après l'indépendance, il s'agit pour elles d'obtenir des réparations morales et administratives notamment la nationalité belge pour les intéressées et leurs descendants.

En avril 2024, une délégation de enfants des Belges laissés au Congo avait été reçue par les autorités belges mais les choses n'ont pas vraiment évolué depuis ce temps.

Le délibéré de l'appel mis en décembre va-t-il confirmer ou infirmer le verdict de première instance ? Là est la question.

En attendant, ce dossier est la preuve une fois de plus que la Belgique éprouve de sérieuses difficultés à solder son horrible passé colonial en RDC. Une colonie qui, on se rappelle, était considérée comme le patrimoine personnel de Léopold II qui disposait donc de ses richesses et de ses habitants comme bon lui semble avec toutes les horreurs qu'on peut imaginer.

La RDC n'a d'ailleurs de cesse d'exiger des excuses publiques et officielles pour toutes les blessures de tous ordres infligées au peuple congolais, mais pour toute excuse, l'actuel roi Philippe, en visite officiel en juin 2022, n'avait exprimé que de « profonds regrets ». Autant dire que cette politique de ségrégation ciblée et d'enlèvements forcés qui a eu cours pendant cette période coloniale va continuer de diviser pendant longtemps l'ex-Zaïre et son ancienne puissance coloniale dont les relations alternent invariablement entre le tiède et le froid.

Soulignons enfin le fait que les mulâtres étaient souvent écartelés entre les Blancs qui les rejetaient souvent et les Noirs pour qui ces toubabs n'étaient pas des leurs. Une politique de ségrégation qui n'empêchait cependant pas les colons de raffoler de la «chair noire», les métis, dont la majorité est septuagénaire aujourd'hui, étant les fruits vivants de ces liaisons parfois cachées.

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