En Côte d'Ivoire, la rentrée a un goût amer dans la commune de Port-Bouët : le quartier de l'Abattoir y a été rasé juste avant les vacances scolaires. Un « déguerpissement » décidé dans le cadre du programme de lutte contre le désordre urbain à Abidjan. Selon les chiffres officiels - sous-estimés selon le collectif des déguerpis -, près de 600 foyers ont dû quitter les lieux. Trois mois après ce que les habitants appellent la « casse », les écoles du quartier sonnent creux. Reportage.
C'est l'heure de la récréation à l'école primaire « Coopération française », mais la cour reste silencieuse. Pas de sonnerie, pas de cris d'enfants. Oumar est assis sous le préau, dans un uniforme kaki trop grand pour lui. L'élève de CM1 joue tout seul. « Ils ont cassé l'Abattoir, glisse le garçonnet. Ils sont ailleurs. Certains me manquent. Je suis triste ».
Sentiment partagé par Batcho Ouattara. Le jeune homme était élève ici. Il y est instituteur depuis 7 ans. « Je n'ai jamais vu cette situation, je n'ai jamais vécu ça, soupire-t-il. Les autres années, au niveau du cours préparatoire (CP), on avait plus de 60 élèves. Mais cette année, il n'y a rien du tout. Ça me fait vraiment mal de voir que l'école est comme ça : vide ».
« Je n'ai eu qu'un seul inscrit dans mon école »
À l'école maternelle, la directrice, Madame Pélagie ne cache pas son vague à l'âme, non plus. « Je n'ai eu qu'un seul inscrit, souligne-t-elle. D'habitude, les parents viennent vraiment nombreux. Mais, cette fois-ci, c'est compliqué avec cette situation de casse ».
Les directeurs des écoles de l'Abattoir espèrent une reprise rapide des inscriptions. Au total, environ 1 500 élèves les fréquentaient.
Lors du Conseil des ministres du 5 septembre 2024, le président de la Côte d'Ivoire, Alassane Ouattara, a demandé au gouvernement d'organiser au mieux les opérations dites de « libération des emprises » et d'anticiper le soutien aux populations déguerpies.