Ile Maurice: Même les crématoriums s'y brûlent...

17 Septembre 2024

En dépit des promesses, les champs de canne cèdent la place aux villas. Et pour ne pas déranger les nouveaux habitants, on veut même déplacer un crématorium à Anse-la-Raie. Notre pays continue sur sa lancée de développement économiquement et écologiquement contestable, car basée uniquement sur l'immobilier. À Anse-la-Raie, un énième projet de smart city est déjà en route.

Ce sont 94 hectares de terres appartenant à une riche famille, couverts il y a quelques mois de cela de champs de cannes et de végétation luxuriante, y compris de palétuviers, qui disparaîtront. Avec ce vaste projet immobilier, il y aura encore moins de sucre à exporter. Mais le propriétaire du terrain aura des villas de luxe à vendre. Le projet est certes sur un terrain privé, mais l'on peut se demander comment et quand le propriétaire a réussi à obtenir le permis de conversion de terrain agricole en terrain immobilier, surtout après que le gouvernement ait pris l'engagement de relancer la culture de la canne. (Voir hors-texte)

L'autre problème, c'est qu'en sus de leur terrain, les promoteurs veulent prendre un crématorium traditionnel, c'est-à-dire avec incinération à l'air libre et utilisant du bois. Or, les habitants ne veulent pas bouger car ils utilisent le crématorium depuis plus d'un siècle.

Seenarain Ramjuttun est une figure très connue du mouvement Pa Tous Nou Anse-la-Raie. Il s'est fait entendre, avec Vashish Bijloll, contre le projet d'Avinash Gopee de prendre possession du centre de jeunesse du même endroit. Il s'est aussi élevé contre l'accaparement d'un terrain de l'État par un hôtelier qui l'a converti en court de tennis.

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«Move zer»

Seenarain Ramjuttun, qui fait partie des forces vives d'Anse-la-Raie, est d'autant plus remonté contre le projet de smart city qui, juge-t-il, affectera les zones humides des environs. Pour lui, il est évident que ce n'est pas le terrain abritant le crématorium qui intéresse les promoteurs mais le crématorium lui-même, dont les promoteurs veulent se débarrasser, probablement en raison de la fumée qui gênera les nouveaux habitants des villas. «Ou alors, pour dégager la vue qui est obstruée par le crématorium et les grands arbres qui l'entourent, et permettre à ses clients de voir la mer.» À moins qu'ils aient peur des «move zer», soupire-t-il.

Les promesses pour relancer la culture de la canne à sucre

Le fameux rapport sur le «National Biomass Framework» de janvier 2023, dont on n'entend plus parler, préconisait fortement la relance de l'industrie cannière si ce n'est pour l'utilisation de la bagasse pour la production d'énergies renouvelables, une production qui est tombée de 381 GWh en 2015 à 246 GWh en 2021. Le sucre exporté ne semblait pas intéresser la Mauritius Cane Industry Authority (MCIA) qui a préparé le rapport. Le Premier ministre déclamait pourtant la semaine dernière, à Petit-Raffray, combien il tenait à l'agriculture.

Le rapport promettait un «Cane Replantation Scheme» de Rs 200 millions par an pour six ans pour aider les... gros planteurs de canne.

Le rapporteur, le «Chief Executive Officer» de la MCIA, Satish Purmessur, parlait aussi de l'importance des champs de canne pour contrôler l'érosion et agir comme capteurs de carbone. Il lançait même une puissante mise en garde contre la réduction des surfaces plantées de canne : «This downward trend will continue in the absence of sweeping measures to boost sugarcane production. Higher amount of sugarcane will indirectly help to materialise the biofuel project.» Satish Permessur ferait mieux de venir faire un tour à Anse-la-Raie, recommande Seenarain Ramjuttun.

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