BUKAVU, YAOUNDE — La campagne de vaccination contre le Mpox va débuter dans la première semaine du mois d'octobre prochain en République démocratique du Congo (RDC).
Cette campagne de vaccination intervient après la réception, par les autorités sanitaires du pays, des premiers lots de vaccins offerts par l'Union européenne (200 000 doses), les États-Unis (50 000 doses) et GAVI, l'Alliance du vaccin (15 000 doses).
Dans un premier temps, les vaccins, fabriqués par le laboratoire danois Bavarian Nordic, seront administrés dans les provinces les plus touchées par l'épidémie, notamment l'Équateur (au nord de la RDC), le Sud-Kivu et Sankuru, a précisé Jean Kaseya, le directeur général d'Africa CDC, au cours d'une conférence de presse en ligne donnée le 12 septembre dernier.
"C'est grâce à la vaccination qu'on avait pu éradiquer la variole dans les temps passés, et nous pensons que la variole du singe sera aussi éradiquée à travers la vaccination attendue"Claude Bazibuhe, Division provinciale de la santé, Sud-Kivu
Selon ses explications, le gouvernement congolais a décidé d'administrer deux doses de vaccin aux cibles prioritaires parmi lesquelles, le personnel de santé, qui est en première ligne de la lutte contre la variole du singe, les personnes ayant été en contact avec des patients infectés, les couches vulnérables...
Nicaise Ndembi, conseiller scientifique du directeur d'Africa CDC et coordonnateur de la réponse au virus Mpox pour Africa CDC, a déclaré au cours de cette conférence qu'il y a beaucoup de travail à faire avant le démarrage de la vaccination, notamment la micro-planification, l'organisation, la logistique...
« La RDC est un pays vaste qui veut s'assurer que tout soit en place pour garantir un transport sans heurts des vaccins vers les provinces. Nous savons que la formation des agents vaccinateurs a commencé et que la logistique est en place. Le personnel d'Africa CDC va rejoindre les équipes provinciales pour soutenir cette campagne de vaccination », a-t-il indiqué.
« Donnons-nous quelques jours de patience pour permettre à la logistique d'être en place et au plan de communication d'être déployé », a renchéri Jean Kaseya.
Urgence
Dans la province du Sud-Kivu, le Programme élargi de vaccination (PEV) s'attèle à la micro-planification qui consiste à déterminer les besoins dans toutes les zones de santé et à mobiliser toutes les énergies qui vont appuyer cette campagne de vaccination, confie à SciDev.Net Joseph Matundanya, responsable du PEV du Sud-Kivu.
« La vaccination va se passer dans toutes les zones de santé de la province. Il y aura des signes qui seront placées au niveau des centres de santé et d'autres dans des endroits bien choisis. Il y aura des sites fixes avancés et même des sites mobiles selon les cas », dit-il.
La vaccination se déroulera en deux phases. La première phase va concerner trois sur les 34 zones de santé que compte la province du Sud-Kivu, en l'occurrence les zones de santé de Kamituga (l'épicentre de l'épidémie dans la région), d'Uvira et de Nyangezi.
Joseph Matundanya fait savoir que la deuxième phase va cibler quatre zones, notamment les zones de santé de Kadutu, d'Ibanda (ville de Bukavu), de Miti-Murhesa et de Kalehe.
Dans les centres hospitaliers, débordés par l'arrivée des malades, la disponibilité du vaccin suscite l'espoir chez les personnels médicaux.
« Nous avons déjà enregistré huit décès sur les 800 patients que nous traitons ici. Mais l'arrivée des vaccins devrait permettre de ralentir, voire stopper la propagation de cette épidémie », espère Robert Musole Mulambamumba, directeur du centre hospitalier de Kavumu, précisant que sa structure sanitaire, censée accueillir 20 personnes malades par jour, est totalement saturée.
Dans la zone de santé de Nyangezi, l'une des plus touchées par le Mpox, plus de 1 300 cas ont été enregistrés. Pour Olivier Kabarati Amani, médecin chef de cette zone de santé, la campagne de vaccination à venir est « une bonne nouvelle, parce que les vaccins étaient vraiment une urgence ».
Il affirme que malgré la prise en charge des personnes déjà touchées, « la maladie se propage dans notre zone de santé et souvent les plus touchés sont les enfants. Mais nous pensons que grâce à la vaccination, nous aurons à maîtriser l'épidémie et, pourquoi pas, la mettre hors d'état de nuire ».
Olivier Kabarati ajoute que la mobilisation des habitants ciblés par la campagne de vaccination, afin de mieux les préparer, est en cours. « Nous continuons aussi à sensibiliser la population au respect des règles d'hygiène édictées par les autorités sanitaires afin de barrer la route à la propagation de Mpox », précise-t-il.
Vaccin sûr
Pour Joseph Matundanya, la population du Sud-Kivu doit se préparer à recevoir le vaccin, car « c'est le moyen très efficace qui va nous permettre de limiter la propagation de ce virus qui cause déjà d'énormes pertes en vies humaines ».
Abondant dans le même sens, Claude Bazibuhe, chercheur en science de la santé et chargé de communication à la division provinciale de la santé du Sud-Kivu, relève que le vaccin contre le Mpox n'a aucun effet négatif dans le corps humain.
Il explique que la province du Sud-Kivu est actuellement à plus de 6 400 cas, dont 36 décès ; avec environ 5 800 patients guéris et 530 autres qui sont sous traitement.
« Cette vaccination vient déjà appuyer les efforts [...] Il n'y a pas à craindre, car c'est grâce à la vaccination qu'on avait pu éradiquer la variole dans les temps passés, et nous pensons que la variole du singe sera aussi éradiquée à travers la vaccination attendue », soutient-il.
« Que la population se prépare et fasse confiance aux équipes de vaccination, et nous appelons à l'observance des règles d'hygiène individuelles et communautaires pour continuer à limiter la programmation de la maladie en attendant les vaccins », ajoute Claude Bazibuhe.
Le directeur général d'Africa CDC a d'ailleurs promis de participer au lancement de cette campagne et de se faire vacciner « pour montrer aux populations africaines et aux Congolais que ce vaccin est sûr ».
Cependant, les doses de vaccin reçues par la RDC, pays le plus touché par le Mpox, ne sont pas suffisantes, insiste Claude Bazibuhe. Les autorités du pays ont émis un besoin de trois millions de doses. « Nous appelons à une augmentation afin de permettre à toutes les catégories cibles de se faire vacciner », martèle-t-il.
Selon Jean Kaseya, 10 millions de doses sont nécessaires pour la riposte dans tous les pays touchés par la variole du singe.