Dakar — Le secrétaire d'État chargé des Sénégalais de l'extérieur, Amadou Chérif Diouf, a jugé nécessaire, jeudi, à Dakar, de privilégier l'information et la sensibilisation des populations sur les conséquences de l'émigration irrégulière, dans le but de l'éradiquer.
"Les jeunes qui partent sont mal informés de ce qu'ils vont trouver. Ils sont mal informés des dangers qu'ils parcourent. Ils sont surtout mal informés des opportunités qu'ils peuvent avoir ici au Sénégal", a dit M. Diouf à l'APS en marge de la quatrième session du dialogue technique entre l'Union européenne (UE) et le gouvernement du Sénégal, sur la migration, le retour et la réadmission des migrants.
Il a assuré que "le gouvernement a pris à bras-le-corps le phénomène de l'émigration irrégulière et compte surtout travailler dans le domaine de la sensibilisation".
Durcir les sanctions requises à l'encontre des "passeurs et des réseaux mafieux"
"Si les jeunes comprennent les politiques que nous comptons mettre en oeuvre dans les domaines de l'industrialisation et de l'emploi, cela leur donnera le courage et la patience d'attendre", a déclaré Amadou Chérif Diouf, ajoutant que "le Sénégal a besoin de toute cette jeunesse pour construire le pays".
L'ambassadeur de l'Union européenne au Sénégal, Jean-Marc Pisani, et le directeur général adjoint de la migration et des affaires intérieures de l'UE, Johannes Luchner, ont pris part à cette rencontre. Des diplomates et des représentants des forces de défense et de sécurité du Sénégal y ont également participé.
"Cette quatrième session du dialogue technique sur le retour et la réadmission, au regard des questions inscrites à l'ordre du jour, est une étape importante de la consolidation de la confiance qui est à la base" des relations du Sénégal avec l'UE, a souligné Amadou Chérif Diouf.
À son avis, a-t-il ajouté, elle permettra aux dirigeants sénégalais et européens d"'examiner le plan d'action et le manuel des procédures, deux documents qui ont fait l'objet de plusieurs discussions et amendements, à travers une démarche inclusive et itérative".
Le plan d'action et le manuel des procédures en question "matérialisent aujourd'hui les progrès qui ont été accomplis par la partie sénégalaise dans sa volonté de respecter ses engagements", a poursuivi le secrétaire d'État chargé des Sénégalais de l'extérieur.
Il a estimé que le dialogue avec les pays membres de l'Union européenne est "une voie incontournable" pour surmonter des défis communs en matière de migration notamment.
Une "approche globale, concrète et pragmatique" de la question de la migration
"Je demeure convaincu que seule une meilleure compréhension de nos préoccupations réciproques permettrait à chacun d'entre nous de mieux saisir la portée de nos positions respectives pour aboutir à un consensus dynamique dans la gestion de la migration", a soutenu M. Diouf.
Le dialogue entre dirigeants sénégalais et européens a l'avantage, pour le Sénégal, d'opérer un "réajustement de notre politique migratoire et de nous doter d'une feuille de route, dans le cadre de l'octroi de l'appui budgétaire, dont de nombreux indicateurs de performance sont relatifs à la question migratoire", a-t-il expliqué.
Le Sénégal va procéder à une révision de son "cadre national de pilotage et de coordination opérationnelle des activités de prévention et de lutte contre la migration irrégulière", a annoncé le secrétaire d'État.
Ce document devrait permettre de renforcer "l'alerte précoce, la collaboration des populations, la sensibilisation et la communication, à l'endroit des jeunes notamment", a-t-il dit.
Amadou Chérif Diouf a insisté sur la nécessité de "corser" les sanctions requises à l'encontre des "passeurs et des réseaux mafieux, sans foi ni loi, qui exploitent la misère et l'incrédulité de jeunes gens en leur soutirant plusieurs millions de francs CFA, contre la promesse d'un eldorado européen".
Il a cité la loi marocaine comme un bon exemple, dans la mesure où, selon lui, elle est très contraignante, condamnant les passeurs à des peines pouvant atteindre dix ans de prison.
En présence des représentants de l'UE, le secrétaire d'État chargé des Sénégalais de l'extérieur a évoqué aussi les difficultés auxquelles sont confrontés ses compatriotes désireux d'obtenir un visa Schengen.
"Je voudrais me faire le porte-voix de mes nombreux compatriotes demandeurs de visas Schengen, pour qui cela est devenu un véritable parcours du combattant", a-t-il dit, ajoutant : "Je sais que vos États sont sensibles à cette préoccupation et je ne désespère pas qu'ils posent des actes positifs pour mieux la prendre en charge."
Un "changement de cap"
Jean-Marc Pisani a assuré les représentants du Sénégal au dialogue technique de "l'engagement ferme" de l'Union européenne aux côtés des autorités du pays, pour "intensifier les efforts communs après le drame de Mbour".
Il fait allusion à la mort de dizaines de personnes dans le naufrage d'une pirogue au large de cette ville située dans l'ouest du Sénégal, le 8 septembre. Des migrants cherchant à se rendre en Europe seraient à bord de cette embarcation.
M. Pisani a proposé au Sénégal et à l'UE d'avoir une "approche globale, concrète et pragmatique" de la question de la migration.
Johannes Luchner a dit qu'il était surtout venu écouter les autorités sénégalaises parler de ce sujet qui, à son avis, doit faire l'objet d'un "changement de cap". L'Europe doit, à son avis, s'y prendre "en investissant autrement".