Au Mali, pas de libération provisoire, du moins pas tout de suite, pour les 11 cadres politiques de la « Déclaration du 31 mars », qui réclame le retour à l'ordre constitutionnel.
Arrêtés le 20 juin dernier, ils sont poursuivis notamment pour « opposition à l'exercice de l'autorité légitime ». Ils s'étaient réunis dans un domicile privé alors que les autorités de transition avaient suspendu les activités politiques des partis et associations. Le juge d'instruction a ordonné le 9 septembre leur mise en liberté sous contrôle judiciaire. Mais le 19 septembre, le procureur a fait appel.
« Au lieu de montrer de la compassion en ces heures sombres », déplore un cadre de la « Déclaration du 31 mars », en référence à la double attaque meurtrière qui vient de frapper Bamako, « au lieu d'appeler au rassemblement des Maliens, l'État préfère les maintenir en détention contre l'avis du juge d'instruction. Que veut-on finalement ? », s'indigne encore cette source.
Les partis signataires n'ont pas souhaité réagir officiellement, pour ne pas crisper les autorités judiciaires.
L'appel formulé par le procureur du tribunal de la commune 5 de Bamako doit désormais être examiné par la chambre d'accusation de la cour d'appel.
Les avocats des 11 anciens ministres et dirigeants politiques, détenus depuis près de trois mois, se montrent également prudents et confiants. « Cet appel est inopportun, estime Maître Hyacinthe Koné, l'un des avocats de la défense. Je ne vois pas comment ils vont le fonder juridiquement : est-ce qu'aujourd'hui, il y a encore une nécessité de les garder en prison ? Ce sont des chefs de famille, des responsables, ils ne vont pas fuir ! Et des dispositions sont même prises pour empêcher qu'ils ne fuient ! Donc la justice n'a plus besoin de cela, estime encore l'avocat. Si on doit les juger, qu'on les laisse en liberté et le moment venu, on les juge. »
Appel aux hommes de justice
Pour Maître Koné, la restauration de la confiance entre les autorités, la classe politique et les citoyens maliens plaident dans le même sens : « Même au niveau social, on parlait de réconciliation. Il faut un apaisement ! Donc cet appel ne sied pas. J'en appelle à tous les hommes de justice : qu'ils respectent la loi et qu'ils soient courageux. Si le droit est dit, et nous n'avons aucun doute là-dessus, nos clients doivent être libérés. »
Aucune échéance n'a été précisée pour l'examen en appel de la demande de mise en liberté sous contrôle judiciaire.
Les autorités maliennes de transition avaient suspendu les activités politiques entre avril et juillet dernier, invoquant des raisons d'« ordre public ». Décision prise par décret, sur une base légale contestée.
Au cours de cette période, les onze dirigeants politiques avaient osé tenir une réunion privée, au domicile de l'un d'entre eux. Ils avaient alors été interpellés sans mandat.
Leurs proches dénoncent une procédure politique, destinée à annihiler toute velléité de contestation du régime en place. Mais Ils gardent bon espoir que les négociations menées en coulisses, ainsi que la droiture des juges, leur permettront d'obtenir prochainement la mise en liberté provisoire des onze cadres politiques, jusqu'à leur procès. Sa date n'a pas encore été fixée.