Ziguinchor — Cent vingt-six femmes d'ex-combattants du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), formées dans les activités génératrices de revenus, ont annoncé vendredi, à Ziguinchor (sud), leur ambition de mettre en place un Groupement d'intérêt économique (GIE), en vue de s'impliquer dans la paix et le développement de la région
"Nous sommes inscrites dans la voie tracée par nos époux et qui est d'oeuvrer pour la paix. Aujourd'hui, nous voulons travailler, contribuer à notre autonomie financière et au développement de nos terroirs", a déclaré leur porte-parole, Gnima Goudiaby, lors d'une assemblée générale, dans les locaux de la Dynamique de paix en Casamance.
En mai 2023, au moins 250 combattants du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC) avaient acté le dépôt de leurs armes lors d'une cérémonie organisée à Mongone, une localité du département de Bignona, qui abritait par le passé une importante base du mouvement irrédentiste.
Gnima Goudiaby, habitante de Mongone, un village de la commune de Djignaky, estime que c'est l'engagement de leurs époux qui a d'abord conduit au dépôt des armes puis à cette rencontre.
"Nous avons besoin de partenaires pour nous accompagner dans cette dynamique, car nous voulons subvenir aux besoins de nos familles et aider nos maris", a-t-elle plaidé, soulignant que certaines femmes d'ex-combattants s'activent notamment dans le commerce et la couture, tandis d'autres parmi elles s'investissent dans leurs propres projets.
Elle a expliqué que "c'est tout le sens de cette assemblée générale pour la mise en place d'une structure chargée de prendre en charge les préoccupations des femmes des ex-combattants et de trouver des partenaires".
"Les femmes d'ex-combattants, après des formations sur des activités génératrices de revenus, ont décidé de se retrouver pour mettre en place un GIE [groupement d'intérêt économique] avec la mise d'un bureau chargé de coordonner leurs activités", a fait savoir Henry Ndecky, coordonnateur de la Dynamique de paix en Casamance.
En tant qu'accompagnateur, facilitateur, médiateur, acteur de la société civile et citoyen sénégalais, M. Ndecky s'est dit honoré et heureux de voir les épouses des ex-combattants de Diakaye marquer l'histoire à leur manière.
Il a noté que cette rencontre intervient surtout à la veille de la célébration de la Journée internationale de la paix, prévue ce samedi. Cette année, l'évènement met le focus sur le vivre ensemble et l'éducation à la paix.
"Nous continuerons à lancer un appel à toutes les factions pour aller à des négociations avec l'Etat du Sénégal, pour que la paix revienne définitivement en Casamance et pour le bonheur de tout le monde", a-t-il assuré. Il ajoute que ces épouses d'ex-combattants de Diakaye sont les premières actrices du processus de paix en Casamance.
"Leurs maris qui avaient décidé d'aller au front pour une cause qu'ils ont voulu défendre, ont compris 40 ans après que ce n'est pas l'option armée qui était la meilleure", a dit le coordonnateur de la Dynamique de paix en Casamance.
"Les ex-combattants, dans les négociations avec l'Etat du Sénégal, ont eu la présence d'esprit de dire que s'il y a des moyens à donner aux femmes le mieux serait de les former en entrepreneuriat afin qu'elles puissent fortifier ce qu'elles possèdent", explique-t-il.
Seyni Badji, le chargé de communication à IRAPA (Initiative pour la réunification des ailes politiques et armées du MFDC), a rappelé que plus de 100 femmes d'ex-combattants ont été formées en entrepreneuriat.
"A l'issue de la formation, les femmes se sont rendu compte qu'individuellement ça allait être difficile de s'en sortir et le mieux était de s'organiser en GIE", a souligné M. Badji.
Le chargé de communication d'IRAPA soutient que ces femmes d'ex-combattants sont aujourd'hui mieux placées que n'importe qui pour parler de la paix, saluant leur implication dans le développement pour soutenir les hommes à l'échelle de la famille, du village et de la région.
Sur le sort des ex-combattants de Diakaye, Seyni Badji, membre également du comité de négociation et de suivi-évaluation des accords de paix entre l'Etat du Sénégal et Diakaye, a indiqué que le processus de réinsertion est presque à la phase II de l'accompagnement de ces derniers.
"La première phase a déjà connu un grand succès compte tenu du fait que sur les 250 combattants qui avaient déposé les armes, 180 ont reçu une formation en métiers et ont commencé une activité au niveau de leur village", a signalé M. Badji.