Vice-capitaine et un des meilleurs joueurs de l'Olympique de Marseille ces deux dernières saisons, le Congolais Chancel Mbemba connaît un déclassement spectaculaire depuis l'arrivée du nouvel entraîneur de l'OM, Roberto De Zerbi. Entre avertissement, mise à pied, défiance, l'histoire d'amour entre Mbemba et le club français est en train de mal finir.
Qu'elle semble loin cette lune de miel ! Une période où l'Olympique de Marseille et Chancel Mbemba se regardaient avec les yeux de l'amour et fixaient la même direction. Le Congolais avait débarqué libre pour s'engager avec le club olympien. Une saison après, il remportait le Prix-Marc-Vivien Foé et était élu dans l'équipe-type de la Ligue 1, sanctionnant une première saison qui l'avait placé dans le coeur des exigeants et passionés supporters marseillais. « J'ai commencé à faire mes matchs et j'ai senti la joie des supporteurs, confiait-il à RFI. Quand il m'arrive de les croiser, ils m'encouragent beaucoup, me disent merci de me donner à fond. Ça fait plaisir. C'est un bonheur de jouer à l'OM, de donner de la joie aux supporteurs. »
Ça, c'était avant. Avant que ne débarque le nouvel entraîneur Roberto De Zerbi qui décide de ne pas inclure le défenseur congolais parmi ses joueurs appelés à la reconstruction d'une équipe qui a fini à la huitième place la saison dernière en Ligue 1.
Dès lors commence une guerre ouverte entre Chancel Mbemba et la direction du club incarnée par le président Pablo Longoria. Celui-là même qui avait convaincu le Léopard de venir à Marseille. « L'appel du président Longoria pour me faire venir m'a beaucoup touché. C'était la première fois qu'un président m'appelait pour signer dans son club », disait-il.
« Le comportement de l'OM est indigne »
En début de saison, Mbemba est ainsi placé contre son gré dans le « loft » pour s'entraîner avec d'autres « bannis » à l'écart du groupe professionnel. Le club cherche à le transférer, en Arabie saoudite de préférence. Dans cette période tendue, l'ancien joueur de Porto est appelé à l'ordre à deux reprises. La première pour avoir tenu des propos agressifs envers un membre de l'encadrement du club phocéen, la seconde pour ne pas s'être rendu à une convocation pour des examens médicaux concernant son genou. Conséquences ? Une mise à pied avec retenue de salaire de six jours et un entretien lundi dernier 23 septembre en vue d'une sanction pouvant aller de l'avertissement au licenciement pour faute grave.
Mais parallèlement, le Congolais remporte une bataille avec la commission juridique de la Ligue de football professionnelle (LFP) qui somme l'OM de réintégrer son joueur au sein de l'effectif professionnel. Mais le « conflit » semble être allé tellement loin qu'il est difficile de croire désormais à un improbable retournement de situation et à une réconciliation deux deux parties.
Aujourd'hui, le déclassement de Chancel Mbemba et sa mise à l'écart semblent choquer beaucoup d'observateurs du foot, mais peu sont enclins à les commenter. Un ancien joueur de l'OM, qui a passé six années dans le club, préfère « ne pas se prononcer » sur la situation de Mbemba. Également sollicité, son sélectionneur en équipe nationale de la RD Congo, Sébastien Desabre « ne souhaite pas communiquer pour le moment » sur le sujet.
De son côté, son ex-sélectionneur Claude Le Roy, qui l'avait découvert au MK Étanchéité, club de deuxième division du championnat congolais, ne prend pas de gants quand il s'agit de dire ce qu'il pense de l'attitude de l'Olympique de Marseille envers son ex-poulain. « C'est invraisemblable d'arriver à une telle situation. Chancel, c'est quelqu'un d'extrêmement facile à gérer, qui est toujours prêt à tout donner. Ce comportement de l'OM à son égard est indigne. Cela m'étonne même de quelqu'un comme Pablo Longoria, une telle attitude. Ou alors ça veut dire qu'il n'y a plus que le fric qui compte et que l'humain, on l'oublie complétement. »
Les Congolais lancent le « Comité de freinage »
Au sein des supporters congolais où le surnom de « demi-dieu » donné à Chancel Mbemba dit tout de l'adoration des fans, le ressentiment est fort. « Les gens qui se promènent avec le maillot de l'OM se font presque invectiver à Kinshasa maintenant, renseigne Jonathan Masiala, journaliste sportif à la radio congolaise Top FM. Les fans se désabonnent en masse des réseaux sociaux du club marseillais. La situation de Chancel Mbemba est vécue comme une injustice ». Les inconditionnels du « demi-dieu » ont désormais initié le « Comité de freinage » sur les réseaux sociaux. Objectif de ce mot d'ordre : s'attaquer à l'OM de toutes les manières possibles et prier pour la perte du club olympien qu'ils rêvent de voir désormais en Ligue 2.
En attendant, Chancel Mbemba, qui n'a disputé aucune seconde avec l'OM depuis le début du championnat, s'est offert un véritable bol d'air récemment en sélection avec des belles performances en tant que titulaire et capitaine lors des rencontres des Léopards contre la Guinée et l'Éthiopie comptant pour les éliminatoires de la CAN 2025. Comme si cette mise au placard à l'OM était loin d'ébranler le roc de Kinshasa. « Chancel, c'est quelqu'un de solide mentalement et psychologiquement, mais on ne sort pas indemne de telle situation, tempère Claude Le Roy. On a beau être solide, ça fragilise, ça abîme. On peut être costaud, mais il arrive un moment où on peut craquer. Il a besoin d'être soutenu, d'autant plus qu'il n'a jamais connu ce genre de situation. »