Sénégal: Ouverture du musée-mémorial du Joola, tant attendu par les proches des victimes du naufrage

Ce 26 septembre 2024 à Ziguinchor, dans le sud du Sénégal, marque l'ouverture du musée-mémorial du Joola, ce navire qui a fait naufrage 22 ans plus tôt au large de la Gambie, un drame ayant fait officiellement 1 863 morts. Un événement important pour les proches des victimes. Reportage.

Le 26 septembre 2002, en pleine nuit, le Joola, sombrait au large de la Gambie. Le ferry avait quitté quelques heures plus tôt le port de Ziguinchor, au sud du Sénégal, pour Dakar. La catastrophe a fait officiellement 1 863 morts. Ce naufrage reste l'une des pires catastrophes maritimes au monde depuis celui du Titanic qui a fait 1 500 morts en 1912.

À Ziguinchor, dans le sud du pays, ce 26 septembre 2024 marque aussi l'ouverture du musée-mémorial du Joola, très attendu par les familles des victimes. Il aura en effet fallu 22 ans pour que ce musée ouvre finalement ses portes d'où est parti le ferry.

Pour l'occasion, les bateaux du port ont fait sonner leurs alarmes. Cinq membres du gouvernement étaient présents. Le ministre des Forces armées Birame Diop, de la Jeunesse, des sports et de la culture Khady Diène Gaye, de l'Intérieur Jean-Baptiste Tine, de la Fonction publique Olivier Boucal et le ministre du Travail Yankhoba Diémé sont venus de la capitale pour inaugurer le bâtiment, tout comme le ministre des Affaires étrangères gambien Mamadou Tangara et l'ambassadrice des Pays-Bas (deux victimes venaient des Pays-Bas), car au total 12 nationalités sont concernées par ce drame. Annoncé dans un premier temps, le Premier ministre Ousmane Sonko, n'est finalement pas venu, à la grande déception des familles.

La délégation a d'abord visité le mémorial, un gigantesque bâtiment en forme de bateau placé au bord de l'eau juste à côté du port, avant d'assister à une série de discours.

« Devrais-je parler à leur place ? », a interrogé Sira Gassama, l'une des 1900 personnes devenues orphelines, suite au naufrage, dans un émouvant discours.

Ce musée mémorial se veut aussi être un lieu de recueillement pour les familles, alors que, sur les près de 2 000 victimes, moins de 500 corps, ont été retrouvés, la plupart restés prisonniers du bateau. Sans sépulture, beaucoup de familles disent ne pas pouvoir faire leur deuil.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle nombre d'entre elles continuent de demander le renflouement de l'épave pour que ce cimetière ne reste pas en mer. Une demande toujours refusée à ce jour par les autorités. Pour l'heure, seule l'hélice récupérée sur le bateau et restaurée, ainsi que quelques effets personnels de victimes retrouvés sur l'épave, sont exposés dans le musée-mémorial. Des témoignages vidéos de rescapés sont également visibles.

« Un édifice qui me permet de faire le deuil »

« N'oubliez pas le Joola », peut-on lire, en gros caractère à l'entrée du musée-mémorial. L'importance d'avoir un lieu pour se recueillir, c'est aussi ce dont témoigne Moussa Diamé, père de trois enfants disparus dans le naufrage : « Pour moi, c'est un édifice qui me permet de faire le deuil, parce que, à chaque fois que je le vois, aussitôt, ça me fait penser à mes enfants et à chaque fois que je passe, j'en fais un lieu de recueillement, parce que c'est un lieu de prière. Je prie à chaque fois que je passe à côté du mémorial. Moi, je dis que c'est un édifice qui me permet non seulement de prier pour mes enfants, mais une fois de plus de me ressaisir et de permettre, à tout le monde, de se rappeler ce qu'il s'était passé. ».

Seul le corps de la fille aînée de Moussa Diamé a pu être enterré. « À chaque 1er septembre, je commence à ressentir le poids, le départ de mes enfants vers l'infini, explique-t-il. À chaque moment de recueillement du 26 septembre, c'est la frousse qui revient : l'angoisse, la frousse... J'essaie de me ressaisir, mais je sens en moi-même qu'en fait je ne suis plus celui que j'étais ».

Ne pas oublier cette tragédie, c'est l'obsession des familles et c'est la raison pour laquelle celles-ci continuent de demander, entre autres que le 26 septembre soit déclaré journée du souvenir par l'État du Sénégal, que ce naufrage le plus meurtrier de la marine civile soit commémoré par un jour férié.

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