«Bien que les tribunaux n'aient pas le pouvoir d'appliquer directement des mesures disciplinaires aux policiers, ils peuvent refuser de leur permettre de tirer avantage d'un abus de pouvoir en considérant leur comportement comme un abus de procédure.» Le magistrat Rishi Hardowar, siégeant au tribunal de Flacq, a, dans un ruling rendu hier, rayé l'accusation provisoire de complot qui pesait contre Dassen Narayanen, ancien vigile de l'ex-hôtel Legends.
Il était provisoirement accusé d'avoir comploté, en janvier 2011, avec Sandeep Moneea, de voler une carte magnétique d'une chambre de l'hôtel Legends afin de commettre un vol dans cette chambre, occupée à ce moment-là par John McAreavey et son épouse, Michaela Harte. Vingt-neuf mois après sa deuxième arrestation, survenue le 29 mars 2022, dans le cadre d'une nouvelle enquête sur le meurtre de l'Irlandaise Michaela Harte, survenu il y a 13 ans, le magistrat Hardowar a conclu que la police n'avait pas pu justifier si la nouvelle arrestation du suspect était une décision raisonnable et nécessaire, ni fournir des explications quant à l'action ou à l'inaction de l'enquête policière entre 2013 et 2022. «Une période de plus de deux ans après la nouvelle arrestation et plus de neuf ans après la première annulation de l'information provisoire soulève de réelles inquiétudes», a souligné le magistrat.
Ce ruling est l'un des derniers jugements du magistrat Rishi Hardowar, qui quitte bientôt la magistrature après avoir soumis sa démission. Dans ce jugement de 18 pages, il a été très critique envers la façon dont cette affaire avait été traitée par la police. Dassen Narayanen avait été arrêté en mars 2022 pour complot en vue de commettre un vol. Les empreintes sur la carte magnétique et sur une serviette de la chambre d'hôtel, ainsi que le témoignage d'un ancien collègue ayant affirmé avoir vu Dassen Narayanen se diriger vers la chambre du couple Michaela Harte-John McAreavey, sont les éléments qui avaient conduit à une nouvelle arrestation de l'ancien vigile de l'ex-hôtel Legends, plus de 11 ans après ce drame.
L'équipe de la Major Crime Investigation Team (MCIT) du Sud, dirigée par le surintendant de police (SP) Ghoorah, avait procédé à l'arrestation de Dassen Narayanen. Selon les enquêteurs, de nouveaux éléments incriminaient l'ancien vigile de l'hôtel où l'Irlandaise avait été tuée en 2011. Or, la preuve dont ils parlaient était en réalité l'ADN de Dassen Narayanen, retrouvé sur la carte magnétique de la chambre du couple et sur une des serviettes qui étaient dans la chambre. Les enquêteurs soupçonnaient Dassen Narayanen d'avoir volé la carte magnétique pour la remettre à l'un des protagonistes déjà arrêtés dans cette affaire, qui n'a toujours pas été élucidée.
Les avocats de Dassen Narayanen, Meᣵ Poonam Teeluckdharry et Vikash Teeluckdharry, avaient demandé la radiation des accusations provisoires sur plusieurs points, notamment le délai écoulé dans cette affaire et l'absence de nouveaux éléments de preuve. Lors du contre-interrogatoire de l'enquêteur principal, le SP Ghoorah de la MCIT, plusieurs points clés avaient été soulevés. L'enquêteur avait admis qu'aucune nouvelle déclaration n'avait été recueillie depuis 2011 et que son enquête reposait uniquement sur les déclarations du suspect concernant le vol de la carte magnétique. Il avait confirmé que l'ADN du suspect avait été retrouvé sur la carte magnétique et dans la chambre de la victime, mais il n'avait pas pu préciser la date de réception des résultats ADN.
Le magistrat Hardowar a souligné que la complexité d'une affaire nécessite davantage de témoins, une documentation plus lourde et un temps de préparation prolongé. Cependant, l'enquêteur n'avait ni mentionné le nombre de témoins ni évoqué la lourdeur des documents. Il avait tenté de s'appuyer sur un rapport ADN, dont il ne se souvenait pas de la date de réception, mais ne l'avait finalement pas utilisé pour l'enquête de 2022. En ce qui concerne le traitement de l'affaire par les autorités judiciaires, le magistrat a noté qu'aucune des parties n'avait invoqué de retard déraisonnable. Le magistrat Hardowar a rappelé que les Police Standing Orders sont des directives que seuls les policiers doivent respecter, et qu'une violation sans excuse valable peut entraîner des mesures disciplinaires.
«The Courts have the power to interfere with the prosecution because the judiciary accepts the responsibility for the maintenance of the rule of law that embraces a willingness to oversee executive action and to refuse to countenance behaviour that threatens either basic human rights or the rule of law», a déclaré le magistrat Hardowar. En tenant compte du délai injustifié écoulé, du comportement des autorités, de la nature de l'affaire, ainsi que du passage du temps qui n'a pas pu être justifié, la cour a conclu que le retard était déraisonnable.