Afrique: Accès à l'information - «Non aux secrets», exhortent les journalistes du monde entier

communiqué de presse

Partout dans le monde, l'accès à l'information publique risque d'être restreint au nom de la sécurité nationale et de la législation antiterroriste, qui élargissent de plus en plus les définitions des « informations classifiées » et limitent les exceptions pour le journalisme.

De plus, l'obstruction au travail journalistique prend de nombreuses formes, allant de l'interdiction d'assister à certains événements et du refus d'accès à l'information publique, à la convocation par la police pour ne pas avoir divulgué l'identité de sources anonymes.

De nombreux détenteurs du pouvoir utilisent cet accès pour entraver le travail des journalistes et faire taire les médias, au mépris de la démocratie et de la bonne gouvernance. Le journalisme est un bien public, mais il doit fonctionner dans des conditions qui permettent son libre exercice sans crainte d'être menacé, persécuté, attaqué ou assassiné.

À l'occasion de la Journée internationale de l'accès universel à l'information, la FIJ se penche sur cinq cas issus de différentes régions du monde pour illustrer la manière dont le droit universel à l'information, y compris le droit des citoyens à rechercher, recevoir et diffuser des informations, a été violé par des gouvernements, des autorités publiques et des forces de sécurité.

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Moyen-Orient et monde arabe : Israël viole délibérément le droit d'accès à l'information au niveau mondial

« Le gouvernement israélien prive délibérément des milliards de personnes à travers le monde de leur droit à la liberté d'expression et les gouvernements et acteurs internationaux du monde entier sont complices en ne faisant pas assez pour arrêter le massacre des journalistes et pour lever l'interdiction d'accès aux médias internationaux », déclare la FIJ.

Suite à l'attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre et à la guerre brutale d'Israël à Gaza, le gouvernement israélien a bloqué l'accès des civils à l'enclave en invoquant des « problèmes de sécurité ». Depuis près d'un an, seuls les journalistes palestiniens basés à Gaza et, dans une très faible mesure, les équipes de médias internationaux intégrés à l'armée israélienne dans des conditions contrôlées, ont pu rendre compte de la situation sur le terrain. En outre, les politiques israéliennes visant à terroriser et à tuer les journalistes de Gaza - au moins 127 journalistes palestiniens ont été tués selon la FIJ - constituent une tentative flagrante de contrôler le récit de la guerre et de dissimuler les violations des droits de l'homme.

La FIJ et ses affiliés, avec son affilié le Palestinian journalists syndicate (PJS), continueront à soutenir les journalistes palestiniens et à réitérer leurs appels à Israël pour qu'il mette fin à l'effusion de sang à Gaza et qu'il lève l'interdiction qui pèse sur les médias étrangers.

Afrique : le projet de loi sur l'information met en péril le droit d'accès à l'information en Somalie

Le projet de loi somalien sur l'information officielle (OIB) - approuvé par le Conseil des ministres en mars 2024 et transmis au Parlement fédéral pour approbation - fait peser de graves menaces sur la liberté d'information, la gouvernance démocratique et les droits de l'Homme. Le texte législatif contient des dispositions étendues sur la confidentialité et les informations relatives à la sécurité nationale, y compris des sanctions liées à l'espionnage, et n'établit pas d'exemptions claires et bien définies, ce qui remet en cause la liberté d'expression et le droit d'accès à l'information.

« L'autorité excessive accordée aux institutions de sécurité nationale dans le cadre du projet de loi sur l'information officielle favorise une culture du secret, allant à l'encontre des objectifs d'ouverture et de confiance du public », a souligné Omar Faruk Osman, Secrétaire général du Syndicat national des journalistes somaliens (NUSOJ).

La FIJ, la Fédération des journalistes africains (FAJ), le NUSOJ et d'autres organisations de défense de la liberté de la presse ont appelé le gouvernement somalien à retirer le projet de loi du processus législatif et à le soumettre à des consultations approfondies avec toutes les parties prenantes concernées.

Asie-Pacifique : en Malaisie, des journalistes ont été convoqués pour n'avoir pas révélé leurs sources

Trois journalistes du média indépendant Malaysiakini - B Nantha Kumar, Hariz Mohd et Shahrin Aizat Noorshahrizam - ont été convoqués au poste de police de Dang Wangi à Kuala Lumpur pour y être interrogés le 9 août, à la suite de la publication d'un article concernant un possible remaniement de la direction de la police royale de Malaisie (RMP). Les journalistes ont été interrogés par les forces de l'ordre pendant plus d'une heure, l'enquête de la police étant centrée sur la découverte de l'identité des sources anonymes citées dans l'article. L'avocat des journalistes, Rajsurian Pillai, a déclaré à la suite de l'interrogatoire que les journalistes avaient refusé de violer la confidentialité des sources.

Les journalistes sont passibles d'une peine maximale de trois ans, assortie d'une amende de plus de 50.000 MYR (environ 11.800 USD). Dans une déclaration commune, la FIJ s'est jointe au Syndicat national des journalistes de Malaisie péninsulaire (NUJM) pour critiquer les enquêtes et affirmer le droit à la confidentialité des sources dans la couverture de l'actualité dans l'intérêt public, ce qui est essentiel pour garantir le droit du public à savoir.

Europe: en France, un journaliste a été empêché par la police de couvrir un événement politique

Cette année, la plateforme Media Freedom Rapid Response (MFRR), qui surveille les violations de la liberté des médias dans les États membres de l'UE et les pays candidats, a enregistré 155 alertes concernant 239 journalistes et entités médiatiques entravés dans leur travail journalistique. La majorité d'entre eux, soit 96 alertes, se sont vu bloquer l'accès à des événements, y compris le refus arbitraire d'accréditation ou d'enregistrement.

Viennent ensuite 35 alertes concernant des journalistes qui se sont vu refuser l'accès à des informations, y compris l'absence de réponse à des demandes de renseignements, et 26 alertes concernant des contenus journalistiques dont la diffusion sur des sites web et des comptes de médias sociaux a été bloquée.

Le 12 septembre, le journaliste français Gérard Fumex, rédacteur en chef du portail d'information local Librinfo, a été empêché de force par des policiers de couvrir les sessions parlementaires du parti de droite Les Républicains, y compris l'arrivée du nouveau Premier ministre Michel Barnier à Annecy, dans le sud-est du pays. Alors que le journaliste s'apprêtait à interviewer l'un des élus, il a été interrompu par des policiers qui ont procédé à un contrôle d'identité.

Selon son employeur, la police lui a d'abord interdit de couvrir l'événement au motif que sa carte de presse devait être renouvelée. Or, une carte de presse expirée n'empêche pas légalement un journaliste d'exercer sa profession. M. Fumex a également expliqué que les fonctionnaires lui ont dit qu'ils avaient une demande du ministère public pour vérifier son identité. Le journaliste n'a pas pu voir de copie de cette demande.

Amérique latine et Caraïbes : la réforme du gouvernement argentin compromet la transparence de la gestion publique et le droit d'accès à l'information

Le gouvernement de Javier Milei a incorporé des exceptions restrictives à la réglementation de la loi sur l'accès à l'information publique en Argentine par le biais d'un décret publié au Journal officiel le 2 septembre. Contrairement à l'esprit initial de la législation, la récente réforme limite la définition de l'« information publique » et établit un critère discrétionnaire pour déterminer ce qu'est une information « secrète ».

En d'autres termes, elle nuit à la transparence de la gestion publique. Le Syndicat argentin des travailleurs de la presse (FATPREN) et ses syndicats membres ont tiré la sonnette d'alarme au sujet de l'impact que cette mesure pourrait avoir sur le travail des journalistes pour assurer la transparence et la responsabilité des gouvernants, car elle restreint l'accès au droit à l'information et réduit une partie de la tâche journalistique d'investigation et de diffusion, rétrécissant, une fois de plus, le droit à la liberté d'expression.

« Nous sommes préoccupés par le fait que ce règlement s'aligne sur une série de décisions politiques du gouvernement national qui cherchent à contrôler et à obscurcir l'information sur les actions et les actes du gouvernement »,a déclaré lae FATPREN dans un communiqué. « Cette dernière mesure vient s'ajouter à la discrétion dans les émissions et les accréditations dans les actes officiels, à la censure et à la tentative de vider les médias publics, aux agressions publiques contre les journalistes qui diffusent des informations sur le président Milei ou qui expriment des opinions dissidentes par rapport au discours officiel du gouvernement, et à la répression contre les travailleurs de la presse pendant les manifestations ».

Le Secrétaire général de la FIJ, Anthony Bellanger, a déclaré : « Année après année, nous voyons des gouvernements et des services de sécurité du monde entier entraver le travail des journalistes et porter atteinte au droit du public d'accéder à l'information. C'est scandaleux. Nous, les journalistes, disons : « Non aux secrets ». Nous avons le droit d'accomplir notre devoir d'informer le public sans craindre d'être menacés, intimidés ou attaqués. Nous demandons aux gouvernements du monde entier de rendre publique l'information et de cesser d'interférer dans le travail des journalistes.»

La Présidente de la FIJ, Dominique Pradalié, a déclaré : « À l'occasion de la Journée internationale de l'accès universel à l'information, je veux prendre l'exemple de Julian Assange, qui a été libéré en juin dernier. Assange est libre, mais l'affaire Assange n'est pas close et concerne tout le monde. Le 1er octobre, ce journaliste, membre de la FIJ, assistera à Strasbourg (France) à une audition parlementaire du Conseil européen organisée par la commission des affaires juridiques et des droits de l'Homme après son rapport sur sa détention et sa condamnation et ses effets dissuasifs sur les journalistes et le droit d'être informé.

Cette commission demande notamment aux Etats-Unis - observateur au Conseil - de modifier la loi sur l'espionnage de 1917 afin d'en exclure les éditeurs, les journalistes et les lanceurs d'alerte. Le 2 octobre, un débat en plénière est prévu et un vote devrait avoir lieu sur ce rapport et ces recommandations. Il en va de l'accès universel à l'information que nous célébrons aujourd'hui.»

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